En 1990, Bobby Dekeyser lance sa marque de mobilier outdoor avec l’audace iconoclaste que seuls les autodidactes peuvent avoir. Son pari ? Faire tresser aux Philippines, selon la technique vernaculaire du rotin, du mobilier d’extérieur utilisant une fibre synthétique brevetée, affichant une résistance exceptionnelle aux conditions climatiques.
Vingt-sept ans plus tard, Dedon peut s’enorgueillir de faire partie de la short-list des marques outdoor haut de gamme. Ses collections ont fait le tour du monde, dans des jardins exclusifs comme dans les sites incroyables shootés par Bruce Weber. C’est d’ailleurs à travers les photos de ces campagnes publicitaires mythiques qu’Ed Barber et Jay Osgerby se sont familiarisés avec la marque il y a une dizaine d’années. « Lorsque vous êtes assis dans votre bureau de Londres par un jour de pluie, vous ne pouvez que rêver devant ces paysages paradisiaques », avoue avec une franchise désarmante Jay Osgerby.
Le contact entre Dedon et les designers de la table Tobi-Ishi pour B&B, de la chaise Tip Ton pour Vitra ou de la flamme des JO Londres ne remonte qu’à deux ans. Mais le courant est tout de suite passé : « La qualité des rapports humains est une dimension importante de notre travail, précise Jay Osgerby. Avec Dedon, tout s’est déroulé dans une grande fluidité sur le mode de la conversation. » Le résultat ? « Tibbo », une collection à l’élégance intemporelle qui évoque la simplicité et la précision du design japonais doublée d’une réelle versatilité outdoor/indoor.
Une jolie façon de rendre hommage à la philosophie fondatrice de Dedon – faire passer le salon à l’extérieur – en lui tendant un miroir inversé. « Notre habitude de la météo britannique nous pousse à considérer le mobilier outdoor comme extrêmement temporaire, poursuit Jay Osgerby. Notre choix de dessiner une collection en bois – du teck indonésien provenant de plantations durables – tient au fait qu’il nous semblait essentiel que les meubles puissent facilement vivre à l’intérieur [comprendre “cohabiter esthétiquement”, NDLR]. »
Tout a été conçu avec, à l’esprit, cette quête d’harmonie globale, si japonaise : « La taille de certaines pièces étant très généreuse, nous avons cherché à utiliser le moins de matière possible. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi la technique du bois tourné pour les pieds. La table a des dimensions impressionnantes, mais elle semble flotter dans l’espace. Les chaises ont été pensées comme faisant partie intégrante de la table : lorsqu’on les repousse – elles sont très tactiles, grâce au teck –, elles s’ajustent comme s’il s’agissait de tiroirs dans une boîte. Les coussins du fauteuil sont là pour apporter un confort supplémentaire mais l’on peut très bien s’asseoir directement sur l’assise en fibre tressée, si l’on sort de l’eau avec un maillot mouillé par exemple. Mais si l’on doit passer trois heures à table avec du bon vin, de bons plats et des conversations intéressantes, on sera ravi de profiter de leur confort ! »
Cette extrême attention aux détails, toujours fonctionnels et jamais gratuits, se double même chez les deux designers britanniques d’une prise en considération du contexte, acquise sans doute lors de leur master en architecture au Royal College of Art, à Londres. Il suffit, pour s’en convaincre, de les écouter expliquer qu’une de leurs « autres priorités était de créer une forme qui soit tout sauf chaotique puisque la nature l’est suffisamment et que le mobilier ne doit aucunement se retrouver en compétition avec elle ». Une belle leçon de modestie et de cohabitation.
La collection « TIBBO » en chiffres
- Production : Indonésie.
- Nombre de prototypes réalisés : 20.
- Nombre de pièces de la collection : 10 (6 tables – dont un plateau de repas de 338 x 103 cm pouvant accueillir jusqu’à 10 convives ! –, 2 bancs, 1 chaise repas et 1 fauteuil).
- Matériaux : teck et fibre synthétique Dedon.
- Coloris des coussins : 3 (blanc, brun charbon et gris lin).