Dans les années 1960, les designers italiens expérimentent tous azimuts. De Joe Colombo à Superstudio, ils s’en donnent à cœur joie pour réinventer l’industrie du meuble en mettant à profit les technologies et matériaux qui apparaissent dans cette période effervescente.
Mario Bellini (1935-), qui débute sa carrière en 1963 chez Olivetti, fait partie de cette génération dorée. En 1969, il livre à Flos une lampe livrée dans un emballage à plat (flatpack) constituée d’une seule feuille d’acier inoxydable poli que l’usager doit enrouler et plier pour lui donner sa forme finale. Cette volonté d’impliquer l’utilisateur final dans la fabrication de ses objet est alors en plein boom. Il suffit de songer à la Mama de Gaetano Pesce, auto-gonflante grâce à des gaz rares (désormais interdits) qui donnent sa forme finale à cette assise en mousse. Ou à Enzo Mari, qui prêche cette intervention dans tous ses objets.
Intelligence et grâce
Le concept de la Chiara est venu à Bellini d’une de ses réflexions. Dans notre quotidien, la lumière nous vient quasiment toujours de façon réfléchie ou filtrée : par les nuages, les murs de la ville ou de son intérieur… « J’ai décidé de dessiner un dispositif qui prendrait une source lumineuse artificielle et la projetterait dans notre environnement avec intelligence et grâce ». Le designer s’empare alors d’une paire de ciseaux et d’une grande feuille de carton et y découpe une forme qui peut se plier en cylindre coiffé d’un chapeau en deux parties qui agit comme un réflecteur orienté à 45 degrés.
Sergio Gandini, l’emblématique patron de Flos, accueille cette maquette rudimentaire avec enthousiasme. Il fait travailler ses équipes sur un premier prototype, constitué d’une feuille de métal dont la base est découpée en trois endroits afin d’assurer sa stabilité et de fixer la douille de l’ampoule.
Une nouvelle façon de faire la lumière
Facétieux, Bellini baptise sa création Chiara, un mot qui, comme en Français, est à la fois un prénom (celui d’une de ses filles en l’occurrence…) et signifie « claire », un adjectif qui colle particulièrement bien à cette lampe qui propose une nouvelle façon de faire la lumière dans les intérieurs…
Cet automne, Flos a décidé de ressortir la Chiara de ses cartons et d’en livrer une version modernisée par Mario Bellini himself. Le liseré en caoutchouc, qui borde la feuille de métal, a été complètement retravaillé pour le rendre plus solide et l’ampoule qui faisait autrefois chauffer le cylindre a été remplacée par une source LED avec variateur. Quant à l’intérieur du cylindre, sa surface est traitée pour concentrer au mieux la lumière.
Le maestro a aussi planché sur deux nouveaux coloris : gris foncé et or rose et il a donné à Chiara une petite sœur, une version miniature que l’on peut poser sur un meuble, une table basse ou les étagères d’une bibliothèque. Cinquante ans après sa sortie, la Chiara demeure en effet une lumière idéale pour la lecture…
> Lampe Chiara de Mario Bellini (1969). Grand modèle (1,45 m), 1 735 €. Petit modèle (41 cm), 370 €. Flos.