Un fauteuil à lattes, en métal et velours, rappelant les bancs publics (Giardinett), une suspension en passementerie inspirée des robes du XIXe siècle (Madama), des modules d’étagère graphiques (Musa) ou un tapis trompe-l’œil façon papier froissé (Neversaid), Mogg ne s’interdit rien et mêle allègrement les styles. « Tout part de l’idée, résume Nicola Galbiati, fondateur de la marque italienne, l’éclectisme nous caractérise et nous permet de nous différencier dans un marché difficile », poursuit-il.
Avant de lancer Mogg – contraction de Mobili (meubles) et Oggetti (objets), l’architecte de formation évolue pendant près de quinze ans dans l’entreprise familiale de meubles MinottiItalia, où il devient directeur artistique de la ligne Moco, qui se distingue avec l’étagère à livres Ptolomeo de Bruno Rainaldi, Compas d’or 2004 (aujourd’hui éditée par Opinion Ciatti).
Après un différend avec son associé, Nicola quitte le navire en 2010 et, clause de non-concurrence oblige, prend un an de réflexion avant de voler de ses propres ailes. Imaginé au moment de Moco mais jamais réalisé, le premier produit Mogg fait office de manifeste. Ordinaryday, une commode ressemblant à un tas de planches de bois brut simplement empilées, dessinée par le Belge Raphaël Charles, résume l’esprit de la maison.
Impertinent, décalé, souvent drôle. « Ce n’est pas notre best-seller mais il nous représente bien. Il est différent, spécial, mais on peut s’en servir au quotidien. » Faire la différence et se distinguer avec des produits uniques qui se remarquent, tel est l’ADN de l’éditeur. « Nous sommes une petite société indépendante et devons nous démarquer avec une identité culturelle forte, c’est notre seule arme dans ce marché (…) On peut les aimer ou non, mais nos produits doivent être identifiables par leur caractère fort. »
Si les créations Mogg arborent souvent une touche d’humour, à l’image de la lampe Blabla en forme de bulle de BD dans laquelle on peut inscrire un message, elles restent toujours fonctionnelles. L’un des best-sellers, le lampadaire Tri.Be.Ca, recèle dans son pied plusieurs étagères et des prises USB.
Une quarantaine de designers de tous horizons – en majorité italiens mais aussi néerlandais, français (Philippe Nigro) ou américains – ont déjà collaboré avec le nouvel éditeur Claudio Bitetti, qui avait œuvré pour Moco, a suivi Nicola dans sa nouvelle aventure et signé une dizaine de pièces, dont les tabourets en liège King & Queen, évoquant des pions d’échec. D’autres créateurs ont été repérés à la London Design Week ou au Salone Satellite de Milan, vivier de jeunes designers.
C’est le cas de Marcantonio Raimondi Malerba que Nicola Galbiati a découvert avant qu’il ne dessine ses fameuses Monkeylamp pour Seletti. Il a signé chez Mogg Piantama, lampe d’architecte noire accrochée à un rondin de bois brut ou encore la suspension végétale Amazzonio. Nouveau venu, le jeune duo italien Studiopang s’est fait remarquer avec Cellula, présenté à Milan en mai dernier. Cet ingénieux système d’étagères modulables en métal a été primé du Young & Design 2018.
Avec une grande exigence de qualité et de petites productions, Mogg se positionne sur un créneau plutôt haut de gamme, à l’image de Zanotta, Moooi ou Capellini. « J’aime beaucoup ces marques, elles pourraient être mes maîtres », avoue Nicola Galbiati. À la différence de Moco, Mogg ne fabrique pas ses produits. « Cela nous permet d’avoir une approche à 360 degrés et de nous autoriser de nombreuses libertés », précise son fondateur. Seuls le contrôle qualité, le packaging et un peu d’assemblage sont réalisés dans ses locaux, à Giussano, en Lombardie.
Les autres étapes de production sont pour l’instant sous-traitées à proximité, dans la Brianza, région majeure du design italien. Mais à l’avenir, l’homme de 44 ans se dit ouvert à la possibilité de produire à l’étranger. Cette année s’annonce exceptionnelle pour la jeune société italienne : en juin dernier, ses résultats étaient supérieurs de 30 % à ceux de 2017. Nicola se réjouit de ce succès dans un marché assez difficile et espère que son label, essentiellement vendu en Italie, en France, en Espagne et en Suisse, va continuer de se développer et devenir un acteur important du secteur. On le lui souhaite !