« La mode se démode, le style jamais. » Marie-Ange de Charry aurait pu faire sienne la maxime de Coco Chanel. Dans son appartement, on ne verra jamais les gimmicks du moment : fauteuils habillés de bouclette blanche et portes tapissées de cannage. « Quand je cherche l’inspiration, je vais chez un fabricant et je lui demande d’emblée ce qu’il ne vend pas. En général, je trouve ce que j’aime », s’amuse-t-elle.
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« Classic with a twist »
C’est ainsi qu’elle a repéré la mosaïque de pierre recouvrant l’îlot central de sa cuisine, dans des dégradés de marron qui, dans un autre appartement, auraient été incongrus. La propriétaire dirige une agence immobilière parisienne, Lieux particuliers. Son hobby ? La décoration, une passion insatiable qui la pousse à déménager souvent, pour le plaisir d’un nouvel exercice.
« Mon métier me fait découvrir toutes sortes d’endroits. J’ai remarqué que les décors qui se démodent le plus sont ceux où les professionnels ont trop modernisé sans respecter l’architecture d’origine. Ce sont ces intérieurs qu’il faut refaire de fond en comble. On ne réécrit pas Versailles tous les quatre ans. Dans un haussmannien, quand les moulures, les parquets et les cheminées sont restés, l’harmonie n’est jamais dénaturée. »
Dans le beau classique qu’elle habite actuellement, elle a commencé par restaurer les plafonds avec un staffeur, remettre les portes avec moulures et retrouver des radiateurs anciens. Ce troisième étage ensoleillé appelait des teintes lumineuses, un jeu que Marie-Ange pratique avec gourmandise.
« Chez Farrow&Ball, je choisis toujours la peinture Cat’s Paw, qui ressemble à du caramel-beurre salé, dont personne ne veut – elle a été archivée ! (aucun échantillon n’est disponible, NDLR). Dans la cuisine, il y a un marbre rose poudré très rare que l’on trouve à Florence. J’ai pour habitude de doubler tous les rideaux dans une même tonalité. Cette fois-ci, c’est un rose bonbon. Chez Mériguet-Carrère, je pourrais prendre toute la gamme de peinture acidulée d’India Mahdavi. J’ai d’ailleurs trois pots couleur Mandarine encore en réserve. »
Le dressing et la bibliothèque de l’une des chambres sont revêtus de panneaux laqués. « La composition est empruntée à un paravent des années 50 vu aux puces, que je n’ai pas pu acquérir. Mais j’ai gardé l’idée », confie-t-elle avec malice.
Une caverne aux trésors
Entre deux déménagements, Marie-Ange conserve uniquement ses tableaux et deux grands fauteuils hérités de ses grands-parents qu’elle a fait retapisser cent fois. Le reste dépend de ses pérégrinations nocturnes sur les sites Internet Selency et Design Market ou de ses découvertes aux puces de Saint-Ouen.
« Je n’achète pas grand-chose de neuf, sauf chez India Mahdavi. Mon plaisir, c’est de mélanger ce qui, sur le papier, ne va pas ensemble. Finalement, on obtient un classique amusant. »
Dans cette ambiance, deux carapaces de tortue et un flamant rose naturalisé cohabitent avec des chaises africaines et une composition d’assiettes Vallauris représentant des crustacés.
Un tableau Manga de Bernard Pras est accroché au-dessus d’une lampe des années 70 avec son abat-jour pop d’origine. Un papier peint de Jeanne de Marguerye, inspiré des dessins de Dom Robert, est posé dans le corridor séparant les pièces de vie de la partie nuit. La chambre parentale est ovale, un défi pour la propriétaire de cet appartement.
« Forcément, rien n’est droit. Alors j’ai demandé au staffeur de construire une cloison reprenant les courbes de la pièce. Elle est installée aux deux tiers de l’espace. Ce qui a permis de créer derrière un petit couloir où nous avons placé une vasque sur mesure épousant l’arc du mur. La baignoire a été disposée un peu plus loin. »
Dans cet assemblage de couleurs, de motifs et de styles, des boiseries contemporaines en chêne tracent des lignes nettes afin de tout ranger et de tout dissimuler. C’est le cas dans l’entrée où une banquette et une bibliothèque offrent des alcôves chaleureuses. Dans la cuisine, l’électroménager disparaît dans des placards. Quand on les ouvre, l’intérieur de l’appartement est jaune vif. On ne se refait pas.
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