Les Rencontres d’Arles 2018 : les 10 expos incontournables

Avec plus de 30 expositions disséminées un peu partout dans l’ancienne capitale provinciale de la Rome antique, Les Rencontres d'Arles s'imposent cette année encore comme LE festival international de la photographie. Face à cette abondance de créativité, IDEAT a sélectionné pour vous 10 expos parmi les plus passionnantes de cette 49e édition.

Robert Frank et Raymond Depardon : « America great again ! »
En détournant ce slogan popularisé par le président américain, Sam Stourdzé, directeur des Rencontres, rend hommage à deux photographes européens. D’abord le Suisse Robert Frank (né en 1924) est présenté à travers quelques 110 tirages originaux dont ceux non publiés de sa série culte, « Les Américains », éditée voilà soixante ans tout juste par Robert Delpire. Ils sont accompagnés de planches-contacts, commentées par Robert Frank lui-même. Ensuite, le Français Raymond Depardon (né en 1942), qui loin des séries humanistes qu’il prend son temps à réaliser en France, découvre New York en 1968. « J’ai appris à travailler très vite, comme un pianiste fait ses gammes. A l’Américaine, en mettant toutes les chances de mon côté, notamment en maîtrisant parfaitement la technique », déclare-t-il. Outre ses clichés de rues, quelques grands formats pris dans le Dakota ponctuent le parcours.
Robert Frank: Sidelines et Depardon USA, 1968-1999, jusqu’au 23 septembre, Espace Van Gogh.

Manhattan, New York, 1981. Avec l’aimable autorisation de Raymond Depardon/Magnum Photos.
Manhattan, New York, 1981. Avec l’aimable autorisation de Raymond Depardon/Magnum Photos. Raymond Depardon

La Palestine par Taysir Batniji
Des annonces immobilières de maisons détruites durant l’attaque de Tsahal contre Gaza en 2008 et 2009 (« Houses »), des miradors israéliens compilés en noir et blanc à la manière de Bernd et Hilla Becher (« Watchtowers »), ces deux séries signées Taysir Batniji, né en 1967 à Gaza six mois avant la guerre des Six-Jours évoquent le quotidien des Palestiniens aujourd’hui. Elles sont exposées avec « des photos souvenirs », composées de textes, de dessins et de vidéos, qui nourrissent la mémoire de cousins éloignés, immigrés aux Etats-Unis. Un parcours qui témoigne de l’exil et de l’affirmation de son identité.
Taysir Batniji, Gaza to America, Home Away from Home, jusqu’au 23 septembre, chapelle du Méjean

Série Pères, 2006. Avec l’aimable autorisation de l’artiste, de la galerie Sfeir-Semler Beyrouth/Hambourg et de la galerie Eric Dupont, Paris.
Série Pères, 2006. Avec l’aimable autorisation de l’artiste, de la galerie Sfeir-Semler Beyrouth/Hambourg et de la galerie Eric Dupont, Paris. Taysir Batniji

Le voyage posthume de Robert Kennedy
Le 5 juin 1968, Robert F. Kennedy, candidat démocrate à la présidentielle, est assassiné à Los Angeles. Trois jours plus tard, sa dépouille est acheminée en train de New York à Washington. Deux millions d’Américains se massent le long des voies pour rendre hommage au 35e président des Etats-Unis d’Amérique. Paul Fusco (né en 1930) photographie les adieux touchants de ces citoyens brandissant des pancartes ou effectuant le salut militaire. En écho, l’artiste hollandais Rein Jelle Terpstra (né en 1960) a rassemblé les clichés et les films amateurs pris le long du passage du convoi et révèle ainsi le contre-champ de cet événement tragique. Quant au plasticien français Philippe Parreno (né en 1964), il a reconstitué le cortège funéraire en tournant un court métrage selon le « point de vue du mort ». Une confrontation en trois volets qui associe le passé et le présent, la grande et la petite histoire, le photojournalisme et l’art contemporain.
Paul Fusco, Rein Jelle Terpstra et Philippe Parreno,  The train, le dernier voyage de Robert F. Kennedy, l’Atelier des forges

Magnum Photos, sans titre, série RFK Funeral Train, 1968. Avec l’aimable autorisation de la Danziger Gallery.
Magnum Photos, sans titre, série RFK Funeral Train, 1968. Avec l’aimable autorisation de la Danziger Gallery. Paul Fusco

Véronique Elléna : le monde tel qu’il est
Des natures mortes, des portraits, des paysages… Cette première rétrospective présente le travail d’une observatrice attentive aux petits riens de la vie. Des fragments de réalité peuplés d’anonymes – « Les Cyclistes », « Ceux qui ont la fois » ou « Les Invisibles », ces sans-abris dont on devine la présence à quelques couvertures abandonnées sur les marches d’une église – que Véronique Elléna (née en 1966) photographie sans artifice en suivant un protocole : à la chambre, en lumière naturelle et frontalement. Ces tirages évoquent souvent des tableaux célèbres tel « Lever de lune » au Havre tout imprégné de Monet, ou un poulpe vu en gros plan de Chardin. Le monde tel qu’il est, familier et étrange à la fois.
Véronique Elléna. Rétrospective, jusqu’au 30 décembre, musée Réattu, 10, rue du Grand Prieuré, Arles (13). Tél. : 04 90 49 37 58. 

Le cycliste, série Ceux qui ont la foi, 2003. Avec l’aimable autorisation de l’artiste.
Le cycliste, série Ceux qui ont la foi, 2003. Avec l’aimable autorisation de l’artiste. Véronique Ellena

William Wegman : amours chiennes
Sur l’affiche des Rencontres, un chien habillé d’un pull porte autour du cou un collier de grosses perles rouges (voir ci-dessus). C’est l’un des polaroids grand format de William Wegman (né en 1943), qui, depuis les années 1970, met en scène ses Braque de Weimar en les travestissant en mère au foyer, avocat, diva à talons, prêtre, ouvrier agricole… Autant de représentations métaphoriques des comportements humains à travers lesquelles le photographe américain revisite l’histoire de l’art : le romantisme, le cubisme, le nu… L’humour et la couleur en plus.
William Wegman, Etre humain, jusqu’au 23 septembre, palais de l’archevêché.

Tamino et sa flûte enchantée, 1996. Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sperone Westwater Gallery.
Tamino et sa flûte enchantée, 1996. Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sperone Westwater Gallery. William Wegman