Pionnière de la composition non figurative, la peintre Helen Frankenthaler (1928-2011) fut longtemps assimilée au courant de l’expressionnisme abstrait. Le musée Guggenheim de Bilbao lui consacre aujourd’hui une large rétrospective.
À lire aussi : Isamu Noguchi au musée LaM de Lille : une incroyable rétrospective
Libérer la couleur
D’abord, il y eut sa rencontre avec le peintre d’origine zapotèque Rufino Tamayo qui, le premier, l’initia à l’importance de la couleur et de la forme ; puis, sa découverte des grands maîtres européens, dont Vassily Kandinsky, Joan Miró, Henri Matisse, et surtout Paul Cézanne, qui influença sa manière de concevoir le paysage. Ces diverses sources d’inspiration aboutissent en 1952 à la réalisation de Mountains and Sea, peinture qui la rend immédiatement célèbre. Du haut de ses 24 ans, Helen Frankenthaler (1928-2011) vient de bouleverser le monde de l’art, encore dominé par des hommes.
Les caractéristiques de cette pièce annoncent celles à venir: elle est monumentale – 219,4 x 297,8 cm –, comporte une partie vierge, sans aucun pigment, et laisse le dessin préparatoire affleurer sous les couleurs, qu’elle a diluées et versées directement sur la toile brute.

Avec cette palette atmosphérique, elle vient d’inventer le soak stain (« tâche par imprégnation »), une technique qui deviendra sa signature et reliera les pionniers de l’expressionnisme abstrait à ceux du mouvement Color Field, notamment représenté par Mark Rothko. C’est à cette artiste que le musée Guggenheim de Bilbao rend hommage en exposant chronologiquement une trentaine de ses peintures.
D’Open Wall (1953), une composition qu’elle décrit comme une juxtaposition de formes et d’espaces à Santorini (1965), vaste surface de couleur mauve striée à ses extrémités de deux bandes, une bleue et une jaune, qui évoque la lumière de cette île grecque, à Ocean Drive West #1 (1974) ou encore Southern Exposure (2002), l’œuvre d’Helen Frankenthaler, comme indifférente au Pop Art, à l’art conceptuel ou à l’hyperréalisme, se fait de plus en plus contemplative.

Elle est présentée en dialogue avec celles de ses contemporains, tels Jackson Pollock, Robert Motherwell ou Mark Rothko, et certaines sculptures de David Smith ou Anthony Caro.
> « Helen Frankenthaler : peindre sans règles ». Au musée Guggenheim, du 11 avril au 28 sept. Avenida Abandoibarra, 2, Bilbao (Espagne). Guggenheim-bilbao.eus/fr
À lire aussi : Exposition : le CAPC de Bordeaux voyage dans le temps