Comment est né le Solar Egg ?
C’est une commande de Riksbyggen, un promoteur immobilier suédois, pour la ville de Kiruna (Laponie), qu’il va partiellement reconstruire (cette cité minière doit se relocaliser pour continuer à exploiter son riche sous-sol, NDLR). Ils avaient besoin d’un lieu de rencontre où les habitants pourraient échanger autour des défis de cette relocalisation. A Kiruna, où il fait très froid, tout le monde a un sauna. Cela a été notre point de départ.
Pourquoi le Solar Egg se pose-t-il à Paris ?
Cet œuf a eu tellement de succès que nous avons eu envie de le faire voyager. L’événement Swedish Design Moves Paris (jusqu’au 7 janvier, NDLR) nous a donné l’opportunité de présenter cette installation.
Comment l’avez-vous imaginé ?
Il s’agit d’une sculpture pouvant être utilisée de différentes façons : comme sauna mais aussi comme lieu d’échanges autour du climat. En tant qu’artistes, nous ne travaillons pas seulement les formes, les couleurs et les matériaux, nous utilisons aussi le climat. Cela nous intéresse de créer des œuvres où l’on expérimente le froid, la chaleur ou le vent. Dans cet œuf, on va s’asseoir et transpirer autour du poêle en métal en forme de cœur, mais – je l’espère aussi – discuter… Le sauna est un lieu où l’on parle, où l’on se rencontre nu, sans a priori vestimentaire. Et à Paris, qui a été au cœur de la COP21, le réchauffement climatique sera peut-être abordé, même si nous ne souhaitons pas imposer de sujet de discussion.
En France, on discute plus dans les cafés que dans les saunas…
En Suède, c’est un lieu de rencontre, où l’on parle aussi bien du temps qu’il fait que de politique. Enfant, j’y allais systématiquement avec mon père après le sport. Aujourd’hui, avec l’arrivée des téléphones portables, on ne papote plus à l’arrêt de bus ou au café, les échanges ont diminué. L’intérêt du sauna, c’est qu’on ne peut pas y entrer avec son portable !
Quelles ont été vos sources d’inspiration architecturales ?
En 1998, pour le pavillon suédois de l’Expo universelle de Lisbonne, nous avions présenté Climate Chambers II, quatre œufs correspondant aux quatre saisons. Récemment, nous avons travaillé sur des projets contenant des miroirs, notamment sur un énorme iceberg à facettes. Ces idées et nos recherches sur les nouveaux matériaux nous ont servi pour concevoir le Solar Egg. Nous sommes partis d’une forme ronde à facettes qui reflétait l’environnement en 69 images, une façon d’illustrer la fragmentation actuelle de l’information, des conversations et des images.
Pourquoi un œuf ?
Car c’est la source de la vie, le lieu idéal où faire germer la vie ou des idées, une sorte d’incubateur. On s’assoit dans le sauna, on passe un bon moment et peut-être que de nouvelles idées vont éclore… Nous nous sommes aussi inspirés de L’œuf du soleil, un conte de fées de notre enfance de l’auteure suédoise Elsa Beskow, qui parle d’un œuf que le soleil aurait pondu, alors qu’il s’agit d’une orange.
Comment le Solar Egg est-il perçu ?
Nous venons d’inaugurer une grande expo à l’Artipelag à Stockholm. Lorsque vous placez un objet dans un musée, personne ne se demande si c’est de l’art. Mais posé dans la nature, cela pourrait être n’importe quoi : du design, de l’architecture ou tout bêtement un sauna ! Ce sera intéressant de voir comment les gens réagiront à Paris car votre rapport au sauna est différent. Nous avons collaboré avec l’une des stylistes de mode suédoises les plus influentes du moment, Diana Orving. Elle a dessiné un kimono spécialement pour les utilisateurs du Solar Egg.
C’est important pour vous que les gens expérimentent vos œuvres de l’intérieur ?
Pour comprendre une œuvre, vous devez rentrer dedans et donner de votre personne. Pour prendre toute la mesure du Solar Egg, il faudra vous déshabiller et rentrer dans le sauna. Nous créons des sculptures sociales, qu’on ne regarde pas seulement, mais avec lesquelles on interagit. En 1996, nous avions imaginé le Therapy Taxi, une voiture conduite par un psy dans laquelle on pouvait s’allonger et parler de ses problèmes tout en sillonnant la ville !
Où ira le Solar Egg après Paris ?
En janvier, il sera exposé à l’Artipelag de Stockholm, qui nous consacre une rétrospective avant de retourner à Kiruna, où il restera. Cinq Solar Egg ont été édités et deux d’entre eux vont partir chez des collectionneurs, notamment aux Etats-Unis.
Les week-ends des 25-26 novembre, 2-3 et 9-10 décembre.
Séances à 12h30, 14h30 et 16h30, réservables une semaine à l’avance sur le site de l’Institut.
10 € la séance.
Institut Suédois. 11, rue Payenne, 75003. Tél. : 01 44 78 80 20.