Lorsque vous êtes designer ou architecte, même connu, faire un projet avec l’éditeur américain Knoll vous délivre une sorte de certificat de validation. Pour Willo Perron, collaborer avec une maison qui compte dans son catalogue les créations des plus grands designers et architectes reste, selon ses propres termes, « un honneur incroyable ». Comme si son nom s’ajoutait à une liste de visionnaires.
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Le « new cool » de Knoll
Visionnaire, l’homme l’est assurément. Né à Montréal, ce directeur de création et designer s’est installé en Californie au début des années 2000, d’où il a imaginé des pochettes d’album, la scénographie de tournées pour Kanye West, Jay-Z, Drake et Rihanna, tout en assurant la direction créative de défilés de mode pour Alexander Wang.

Ces dernières années, il a diversifié son activité, proposant des expositions pour Cartier, des défilés pour Chanel et ce canapé pour Knoll. Un projet d’abord conçu au studio de Willo Perron à Silver Lake, quartier bohème de Los Angeles, et ce, à titre d’exploration personnelle, sans destination précise, avant d’être finalement édité par Knoll. « Il y aurait eu plus de pression si nous avions su où le canapé Pillo finirait! » s’amuse le designer.
Il rencontre Jonathan Olivares, vice-président senior design de Knoll, lui-même designer, lors d’un dîner à Milan chez des amis communs. Partageant entre autres un vif intérêt pour la Formule 1, les deux hommes sont illico devenus amis. Résidant tous les deux à Los Angeles, ils se revoient au studio de Willo.
Là, ils ne vont plus parler de voitures, mais de design. Les antennes de Jonathan captent tout de suite la fréquence émise par le premier prototype de Pillo. Les experts de Knoll viennent à sa suite et le perfectionnent selon leurs normes. Ce canapé trouve rapidement sa place chez l’éditeur sans brief préalable.« Quand ils ont livré ce sofa, il était impeccable. C’est le fruit d’un processus très symbiotique », s’enthousiasme encore son designer.
Knoll s’est arrêté sur ses premiers prototypes pour en faire quelque chose de très spécifique, en étoffant par exemple certains détails du canapé. Pour Perron, Pillo repose sur trois attributs. « Le premier, c’est l’idée élémentaire de formes répétitives, empilées les unes sur les autres. Le deuxième, la pureté du matériau, beau, élégant mais décontracté, ce qui est très moderne. »
Pas de sofa qui glace quand on s’assied. Le designer voit même, troisième atout, de l’humour dans cette forme de coussins empilés. « La magie opère là où l’élégance, la modernité, l’humour et la praticité se côtoient », conclut-il.

Une touche d’impertinence
Chez Knoll, créer un canapé sans pied frôle la sédition. Pas pour Perron, qui y voit davantage une absence de prétention. Comme une impression de s’asseoir par terre dans un salon chic ? « C’est très pratique dans la vie quotidienne! J’aime l’idée que Pillo puisse prendre de la valeur lorsqu’il est porté, un peu comme un Levi’s 501 », tranche celui pour qui la beauté sans confort n’existe pas en design.
Il déplore l’idée de beaux meubles inutilisables. Lors du dernier Salone del Mobile à Milan, sur le stand de Knoll, à nouveau rebâti en maison américaine moderniste par les architectes belges du studio Geers et Van Severen, il n’y a pas eu de bataille idéologique à propos de la pertinence ou non de cette nouvelle typologie. Son auteur a trouvé l’accueil formidable.
« Les gens semblent l’apprécier. Moi-même, j’aime les choses qui sont faites le plus simplement. C’est paradoxalement ce qui rend Pillo spécial. Il laisse place à l’interprétation et j’espère que les gens l’expérimenteront dans différents environnements. »

Jonathan Olivares a toujours dit veiller à développer chez Knoll un programme universel qui fonctionne en harmonie avec les sphères culturelles et géographiques les plus variées. Il œuvre à un Knoll pertinent partout, tout en l’inscrivant dans le XXIe siècle.
Willo Perron confirme : « Jonathan et moi étions tous deux très enthousiastes à l’idée que le canapé Pillo fasse partie de sa collection. Mon style est beaucoup moins structuré, ce qui va à l’encontre de la plupart des pièces traditionnelles de l’éditeur. Un nouveau point de vue, qui conserve néanmoins l’élégance du style Knoll. »
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