Le célèbre designer anglais, Tom Dixon, s’est prêté à l’exercice du canapé, une première pour sa maison d’édition. Ce n’est pas un mais deux modèles qu’il présente, dont les noms « Fat » (« gros ») et « Plump » (« dodu ») laissent peu de doutes sur leur confort. Leur conception répond aussi aux nouveaux usages.
À lire aussi : Interview de Tom Dixon : « Je veux faire une différence dans le monde grâce au design »
IDEAT : Créée en 2002, votre maison d’édition ne proposait pas encore de canapés. Pourquoi ?
Tom Dixon : Au départ, j’avais en tête une marque de lifestyle globale, mais ce n’est pas si simple. Le canapé, c’est une logistique compliquée. Nous vendons dans 120 pays. C’est un tout autre business que celui des accessoires ou des luminaires.
Chacun veut un tissu, des couleurs, des tailles différentes, dans des délais les plus courts possibles. La réflexion a pris du temps. À côté de ça, notre Design Research Studio se retrouvait à acheter les canapés des autres pour ses projets d’aménagements intérieurs… C’était un peu minable, non ? Il nous fallait une ligne de canapés qui nous ressemble.
IDEAT : Le premier s’appelle « Plump », inspiré d’un modèle britannique iconique…
Tom Dixon : Ses contours sont comme le fantôme d’un Chesterfield. J’ai toujours aimé cette assise classique où le dossier est assez bas pour s’accouder parfaitement. Son dessin est adapté à la façon de s’asseoir, qu’on soit relax ou formel.
Nous avons gommé, enlevé, épuré, pour ne garder qu’une silhouette minimale généreuse et confortable, adaptée à tous les environnements, à prix accessible. Dans ses proportions, « Plump » passe par la porte et convient à un petit salon. C’est une leçon que j’ai retenue d’une collaboration avec IKEA, où nous avions beaucoup appris sur les dimensions universelles des canapés.
IDEAT : Quelle est la genèse de « Fat » ?
Tom Dixon : Au départ, notre série « Fat » n’était composée que de chaises et a rencontré un grand succès. Nous voulions compléter la collection. Le modèle avait été dessiné pour notre restaurant Coal Office du quartier de King’s Cross, à Londres.
Il devait être à la fois confortable et minimal car, dans un restaurant, la multiplication des chaises devient vite envahissante esthétiquement. Nous avons accentué la grosseur des pieds en tubes et gonflé le rembourrage du dossier arrondi et de l’assise. Le résultat est simple, robuste et généreux, avec du caractère, sans dominer l’intérieur.
IDEAT : Comment avez-vous adapté ce principe au canapé ?
Tom Dixon : Nous avions l’habitude de photographier les chaises et les fauteuils « Fat » un peu comme un « toi et moi », ou loveseat en anglais. Ça nous a donné l’idée d’un canapé modulable avec certains éléments arrondis que l’on pourrait disposer dans un sens ou dans l’autre, en tournant. Ce qui est bien avec « Fat », c’est que l’arrière est aussi beau que l’avant, car il est né d’une chaise, où le dos est une partie très visible.
On peut se servir du canapé « Fat » comme séparation au milieu d’une pièce. Nous avons prévu le nombre optimal de modules pour imaginer de multiples configurations, que ce soit à la maison, dans un lobby d’hôtel ou d’aéroports. Le dossier bien rembourré permet de s’asseoir dessus de façon informelle.
IDEAT : Que peut-on apporter de nouveau dans un concept de canapé ?
Tom Dixon : L’organisation des maisons a changé. Avant, le foyer était organisé autour de la cheminée, puis de la télévision, qui étaient des points de focale.
Aujourd’hui, on veut bien être ensemble dans le salon, mais chacun est dans sa bulle avec son petit écran bien à lui ou son livre. C’est pour ce type de situations que ce canapé a été inventé. Peu importe dans quelle direction il regarde, on peut même très bien être ensemble, mais dos à dos.
IDEAT : Votre nouvelle chaise du bureau « Fat » répond-elle à un nouveau besoin?
Tom Dixon : Pendant la pandémie de Covid-19, on s’est tous retrouvés à travailler n’importe où chez soi, dans la salle de bains ou sur le balcon, en quête d’un peu d’intimité. Par la suite, le télétravail s’est démocratisé. Lorsque les modes de vie évoluent, c’est là que le designer intervient.
À cette période, je m’étais acheté un fauteuil ergonomique, un truc un peu macho, conçu pour travailler. Nous l’avons jeté au bout de quinze jours tellement il était laid. De quoi avais-je besoin ? D’un fauteuil réglable en hauteur, qui tourne, avec des roulettes. J’ai repris le dessin de la ligne « Fat » avec ces éléments. J’adore ce fauteuil très confortable et adapté au décor domestique. C’est encore un symbole des nouveaux usages.
À lire aussi : La nouvelle teinte de Tom Dixon destinée aux arts de table