Interview : Qui se cache derrière le Studio Œ ?

Découvertes l'an dernier, Lisa Ertel et Anne-Sophie Oberkrome, fondatrice de Studio Œ, sortent de leur Allemagne natale pour conquérir la scène internationale. Rencontre avec deux designers qui ont placé le collectif au centre de leur pratique.

Rencontre à Berlin, dans le quartier de Kreuzberg avec Lisa Ertel et Anne-Sophie Oberkrome, co-fondatricies de Studio Œ. Les deux jeunes designers, adeptes convaincues du travail en collectif, ont vu soudain l’an dernier leur nom clignoter sur le radar des amateurs de design à l’international, grâce à Oto, leur collection de meubles pensés « comme des extensions mobiles d’architecture » pour l’éditeur italien Mattiazzi. Une approche fraiche et précise qui leur ressemble.


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IDEAT : Pourquoi avez-vous choisi de devenir designer ?

Lisa Ertel: Je voulais faire quelque chose de créatif, travailler avec mes mains pour donner vie à une idée. J’ai eu l’occasion d’effectuer un stage chez un menuisier et cela m’a vraiment plu. J’ai donc décidé de m’orienter vers le design de mobilier. Ayant grandi à Karlsruhe, dans le sud-ouest de l’Allemagne, j’avais des amis qui avaient étudié à la HIG (Karlsruhe University of Arts and Design) et j’adorais les objets que je voyais chaque année lors des expositions de projets de diplômes. Cela a fini de me convaincre.

La collection Oto imaginé par de Studio Œ pour Mattiazzi © Florian Böhm (Studio AKFB)
La collection Oto imaginé par de Studio Œ pour Mattiazzi © Florian Böhm (Studio AKFB)

Anne-Sophie Oberkrome : Globalement, cela a été la même chose pour moi.

Lisa Ertel : Nous avons également étudié la communication et nombreux sont nos amis qui travaillent dans cet univers. Cela nous aide beaucoup pour présenter notre travail.

IDEAT : La notion de collectif semble importante pour vous ?

Anne-Sophie Oberkrome : Elle l’est. Après avoir obtenu notre diplôme, nous avons ressenti le besoin de développer des projets de façon collective, en écho à ce que nous avions expérimenté durant nos études. Nous avons donc créé tout d’abord The FAN Collective, puis Many-to-Many, qui est actuellement en pause. Nous travaillons également au sein d’un troisième collectif, The Farm Group. Des opportunités et envies surgissent en permanence, et nous aimons beaucoup cela.

Lisa Ertel : Nous voulions conserver l’énergie qui avait caractérisé nos années d’études en nous donnant simplement  nos propres sujets, sans attendre que quelqu’un veuille bien nous demander de faire quelque chose.

IDEAT : Le studio que vous partagez à Kreuzberg fait également office de collectif informel ?

Anne-Sophie Oberkrome : En effet. Nous organisons de petits événements ensemble. L’été dernier par exemple, nous avons tous travaillé sur une édition de couteaux à beurre. Chacun.e d’entre nous en avait dessiné un puis nous avions dressé une grande table avec (beaucoup!) de beurre, du pain et les avons vendus.

Applique Norman signée Studio Œ. © Studio Œ
Applique Norman signée Studio Œ. © Studio Œ

Lisa Ertel : Nous avons récemment réalisé un projet pour un fabricant de bougies. Nous avons conçu l’emballage, Marcel [Strauß] et Jonas ont réalisé le site web et le graphisme. Et Peter [Oliver Wolff], qui est photographe, a shooté les photos,

IDEAT : Comment définiriez-vous votre travail ?

Lisa Ertel : Nous sommes très ouvertes, nous travaillons aussi bien pour répondre à des commandes d’entreprises que pour développer des initiatives personnelles. Pour l’instant, il s’agit surtout de mobilier, mais nous n’avons pas l’intention que cela soit limitatif.

IDEAT : Qu’est-ce qui vous a attiré à Berlin ?

Anne-Sophie Oberkrome : Nous avions de nombreux amis qui vivaient déjà à Berlin depuis un certain temps, il y avait pour nous un sentiment « de famille »..

IDEAT : Dans quel quartier habitez-vous ?

Anne-Sophie Oberkrome : Nous vivons presque tous à Neukölln, dans ce quartier parfois bruyant et sale, mais magnifique. Je suis très proche de Rixdorf, qui est le vieux quartier de Berlin. Là, on a vraiment l’impression d’être dans un village, parfois même d’être hors du temps, même si des studios de créatifs, des restaurants et des bars y apparaissent sans cesse.

Miroir Cove de Studio Œ pour Our Society. © Peter William Vinther
Miroir Cove de Studio Œ pour Our Society. © Peter William Vinther

Lisa Ertel : J’habite près de Körnerpark, un parc néo-baroque dont la ville prend vraiment soin. Il y a des palmiers, des fontaines, c’est un énorme contraste avec les rues environnantes.

Anne-Sophie Oberkrome : Neuköln est assez proche de Kreuzberg, où se trouve notre studio. C’est un trajet facile et plaisant et, parfois -surtout en été – nous pouvons même nous arrêter le matin au Prinzenbad pour nous baigner. C’est très agréable d’avoir un studio en dehors de son lieu de résidence, cela offre une dynamique dans la ville.

IDEAT : Votre courte collection  très remarquée pour Mattiazzi est en bois, Y a-t-il un matériau ou une technique que vous aimeriez particulièrement explorer aujourd’hui ?

Lisa Ertel : L’émail. À cause de la couleur bien sûr, mais aussi parce qu’il s’agit d’une technique traditionnelle très intéressante qui a été beaucoup utilisée dans l’architecture. Mais elle a en quelque doigte disparu du mobilier.

> Plus d’infos sur Studio Œ ici.


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