Deux expositions qui explorent le genre de la photographie vernaculaire, soit des images du quotidien prises par des amateurs, sous forme d’autochromes ou de tirages papier. Découvertes de ces hommages à la photographie amateur.
1 – « 1,2,3… Couleur ! L’autochrome exposée »
Très attendue depuis l’invention de la photographie, la couleur voit le jour en 1903 grâce à l’autochrome, premier procédé industriel, commercialisé par la Société Lumière en 1907. L’exposition « 1, 2, 3… Couleur ! » présentée au Jeu de paume, à Tours, permet la (re)découverte de la photographie vernaculaire grâce à laquelle les clichés se sont dotées de nombreuses teintes et nuances. Sont ainsi dévoilées des œuvres issues de deux collections dont une quarantaine de plaques (de verre) originales qui rendent compte du format (jusqu’à 18 x 24 cm) et de l’aspect de ces diapositives couleurs.
Le dispositif scénographique donne accès aux images grâce à un système de jumelles encastrées dans les cimaises derrière lesquelles sont placées les plaques. Si la plupart des autochromes sont essentiellement l’œuvre d’amateurs particulièrement motivés, au regard de leur coût trois fois supérieur à celui du noir et blanc, l’exposition montre aussi des diapositives de la Section photographique de l’armée (SPA).
En effet, à partir de la Première Guerre mondiale, une vaste mission cofinancée par l’armée et le philanthrope Albert Kahn donna naissance à de nombreux reportages photo réalisés en autochromes, brossant le portrait de civils et de militaires, mais témoignant aussi des conséquences du conflit sur les paysages urbains et naturels. Des clichés peu diffusés dont les couleurs inspirées par celles utilisées en peinture annoncent le pictorialisme.
> « 1,2,3… Couleur ! L’autochrome exposée ». Au Jeu de paume, à Tours, jusqu’au 28 mai. Chateau.tours.fr
2 – « Tout doit disparaître / Collection Jean-Marie Donat »
Après avoir été exposée au Centquatre, à Paris, en 2022, la collection de photographies vernaculaires de Jean-Marie Donat se découvre au Centre régional de la photographie des Hauts-de-France. À contre-courant des pratiques actuelles de consommation des images, l’exposition retrace, sur la base de cette collection qui court de 1880 à 1990, près d’un siècle de captures de scènes de vie et, plus précisément, l’évolution de la société de consommation des années 30 à 90.
Son titre, « Tout doit disparaître », évoque les messages publicitaires visant à liquider les stocks d’un magasin, comme une piqûre de rappel. Témoignant de l’accumulation, symbole névrotique d’un capitalisme mondialisé, l’exposition se déploie par séries thématiques et aborde des sujets comme les fêtes de fin d’année, les premières voitures et postes de télévision ou encore les mariages. Les tirages invitent à observer les détails comme
les mises en scène… et prêtent parfois à sourire.
Mais derrière l’acte photographique et le fait de collectionner des clichés anonymes se cache un rapport complexe à l’image qui véhicule l’angoisse de la fuite du temps. En croisant ces multiples existences « ordinaires » figées dans le temps subsiste une empreinte. Aussi difficile soit-elle à décrypter, elle permet d’envisager chacun de ces vestiges du passé tout en interrogeant la société actuelle au regard de celles qui l’ont précédée.
> « Tout doit disparaître / Collection Jean-Marie Donat ». Au Centre régional de la photographie Hauts-de-France, à Douchy-les-Mines, jusqu’au 12 février. Crp.photo
À regarder aussi