A Paris, la seconde vie d’un appartement haussmannien haut en couleurs

Dans un appartement haussmannien classique, Thibaut Picard a réussi à insuffler un esprit contemporain vivant, où la couleur joue un rôle essentiel dans la mise en valeur des volumes. Au fil des pièces, le charme opère et une poésie se dégage de ce lieu dont l’architecte a tenu à honorer l’esprit.

Une entrée desservant un double salon et une salle à manger, une cuisine au fond du couloir, des moulures, un parquet point de Hongrie et des cheminées en marbre : un temps transformé en bureaux, cet appartement haussmannien situé dans le XIVe arrondissement de la capitale avait gardé tous les attributs de ce style architectural indissociable du paysage parisien. Retour sur la nouvelle création de l’architecte Thibaut Picard.

Un architecte en adéquation avec son époque

Dans un appartement haussmannien, l’architecte Thibaut Picard a réussi à insuffler un esprit contemporain où la couleur prime.
Dans un appartement haussmannien, l’architecte Thibaut Picard a réussi à insuffler un esprit contemporain où la couleur prime. Didier Delmas pour IDEAT

Sans geste radical, l’architecte Thibaut Picard a projeté les 180 m2 du lieu dans le XXIe siècle, tout en conservant l’essentiel de son identité. Pour ses projets pour des particuliers, le professionnel applique la même recette que pour ceux de l’hôtellerie, où tout est pensé en cohérence. Un sujet qu’il connaît bien puisque, avant de créer son agence en 2019, il a œuvré pour Four Seasons, Hyatt ou Marriott.

Fauteuil Big Talk d’Adam Goodrum (Blå Station). Dans la bibliothèque, vase tricolore Baby Chou signé Pierre Gonalons (Manufacture des émaux de Longwy 1798). À droite, sculpture multicolore d’Alex Zablocki (Galerie Italienne), lampe Nesso de Giancarlo Mattioli (Artemide).
Fauteuil Big Talk d’Adam Goodrum (Blå Station). Dans la bibliothèque, vase tricolore Baby Chou signé Pierre Gonalons (Manufacture des émaux de Longwy 1798). À droite, sculpture multicolore d’Alex Zablocki (Galerie Italienne), lampe Nesso de Giancarlo Mattioli (Artemide). Didier Delmas pour IDEAT

Dans cet appartement haussmannien, il fallait revoir la distribution du vénérable logement pour une famille avec de jeunes enfants. La partie réception est consacrée désormais aux pièces de vie. La cuisine a rejoint la salle à manger, dont les portes vitrées, comme celles du salon, ont disparu. Tout est ouvert. La vaste entrée n’est plus une galerie perdue, mais un cœur habité. Les encadrements des anciennes portes conservent leurs majestueux frontons moulurés, comme un signe de bienvenue. Une menuiserie contemporaine trace des lignes nettes : placard et banquette dans l’entrée, îlot dans la salle à manger et bibliothèque dans le salon.

Sur le buffet vintage, céramique d’Alice Gavalet (Galerie Italienne). Applique murale Tarya (Studio Gong).
Sur le buffet vintage, céramique d’Alice Gavalet (Galerie Italienne). Applique murale Tarya (Studio Gong). Didier Delmas pour IDEAT

« Le luxe, c’est l’impression d’évoluer dans une suite d’hôtel dans la chaleur de son propre appartement. La menuiserie sur mesure, par exemple, fait disparaître les éléments fonctionnels pour mieux mettre en valeur les pièces de design », explique l’architecte. D’une grande simplicité, la cuisine, qui tient sur un mur, est totalement intégrée en volume et en couleur. La moulure du plafond, ajustée sur mesure, renforçant l’illusion. 

Dans l’entrée, sur l’îlot, lampe Three Valleys Wood Fire de Gabrielle Thomassian (Villa Arev). Fauteuil Solo Seat, design Muller Van Severen (Valerie Objects). Coussin Élitis. Tapis Pacome de Floriane Jacques (Habitat).
Dans l’entrée, sur l’îlot, lampe Three Valleys Wood Fire de Gabrielle Thomassian (Villa Arev). Fauteuil Solo Seat, design Muller Van Severen (Valerie Objects). Coussin Élitis. Tapis Pacome de Floriane Jacques (Habitat). Didier Delmas pour IDEAT

L’appel de la couleur

Dans la cuisine-salle à manger, table Allungami de Metrica (Cinna). Chaises B32 et B64 de Marcel Breuer(Knoll).Fauteuil Carimate signé Vico Magistretti (Fritz Hansen). Sur le buffet vintage, lampe Earth de Marie Michielssen (Serax). Portrait signé Martine Martine. Suspension trouvée sur Litfad.com. Tapis Carte postale (Mapoésie).
Dans la cuisine-salle à manger, table Allungami de Metrica (Cinna). Chaises B32 et B64 de Marcel Breuer(Knoll).Fauteuil Carimate signé Vico Magistretti (Fritz Hansen). Sur le buffet vintage, lampe Earth de Marie Michielssen (Serax). Portrait signé Martine Martine. Suspension trouvée sur Litfad.com. Tapis Carte postale (Mapoésie). Didier Delmas pour IDEAT

Outre le réaménagement de cet appartement haussmannien, l’ambiance est métamorphosée par la palette chromatique – la passion de l’architecte Thibaut Picard –, qui l’utilise pour redéfinir les volumes. Ainsi de la galerie d’entrée habillée de gris-bleu et son plafond ton sur ton. « Le principe du “color block” (peindre murs et plafond d’une seule couleur, NDLR) rend cette pièce compacte comme une boîte. C’est un espace dépouillé et plus sombre, car il n’y a pas de fenêtre. La cuisine et le salon, éclairés par la lumière du jour, apparaissent en contraste plus léger avec leur plafond blanc. »

L’entrée est formalisée par un placard et une banquette sur mesure. Coussins Élitis. Totems lumineux Ciluzio (AAMA Design). Portemanteau Anemone signé Fabrice Berrux (Bonaldo). Tapis Pacome de Floriane Jacques (Habitat).
L’entrée est formalisée par un placard et une banquette sur mesure. Coussins Élitis. Totems lumineux Ciluzio (AAMA Design). Portemanteau Anemone signé Fabrice Berrux (Bonaldo). Tapis Pacome de Floriane Jacques (Habitat). Didier Delmas pour IDEAT

L’architecte Thibaut Picard n’aborde pas un projet avec des coloris prédéfinis. C’est le lieu qui dicte ses tonalités. « En fréquentant le chantier à toute heure, on peut déterminer les couleurs qui fonctionnent entre elles, selon les variations de la lumière et le dialogue qui s’établit entre les pièces. Elles créent toujours des surprises. C’est un cheminement intellectuel. Voilà pourquoi je conçois la palette tardivement », précise-t-il. Dans le salon d’un gris léger, la bibliothèque couleur Thé de Chine, de chez Ressource, prend des reflets bleus ou verts suivant la lumière naturelle.

Dans la salle de bains des enfants, zelliges Tsquare Mint Tea (Terratinta Ceramiche). Carrelage du tablier de la baignoire Confetti (Quintessenza Ceramiche). Robinetterie Luxe Rose Gold (Lusso Stone).
Dans la salle de bains des enfants, zelliges Tsquare Mint Tea (Terratinta Ceramiche). Carrelage du tablier de la baignoire Confetti (Quintessenza Ceramiche). Robinetterie Luxe Rose Gold (Lusso Stone). Didier Delmas pour IDEAT

Dans la salle à manger, la cheminée en marbre rouge a inspiré la teinte vert amande des murs aux accents parfois gris, parfois vert foncé. « Mes clients avaient demandé à repeindre le marbre, mais je les ai convaincus de garder cette pièce historique telle quelle. Grâce à sa couleur, la cheminée est devenue un élément fort. » Au contraire des meubles et du buffet ancien de la cuisine, qui se fondent dans les murs peints du même ton. Le regard est alors plutôt attiré par les chaises de collection autour de la table.

Dans la chambre parentale, tête de lit surmontée du papier peint Pins et Cyprès, collection « Les gravures anciennes » (Ananbô). Applique Diabolo (Stilnovo). Taies d’oreiller et housse de couette Society. Tapis de couloir Codimat.
Dans la chambre parentale, tête de lit surmontée du papier peint Pins et Cyprès, collection « Les gravures anciennes » (Ananbô). Applique Diabolo (Stilnovo). Taies d’oreiller et housse de couette Society. Tapis de couloir Codimat. Didier Delmas pour IDEAT

Quant à la chambre parentale, l’architecte l’a littéralement scénographiée. Un mur au centre de la pièce sert d’appui au lit d’un côté et de dressing de l’autre. La tête de lit en menuiserie sur mesure intègre éclairage et rangements. Sa teinte rouge laquée contraste avec le papier peint en grisaille. La couleur, encore et toujours.