Si Jean-Michel Basquiat continue de susciter autant d’intérêt, c’est qu’il a développé une œuvre éclectique, riche et subversive en un temps limité qui aborde de multiples sujets toujours d’actualité comme la mort, les violences policières, le racisme, la musique, l’art… Véritable touche-à-tout, il a contribué à la reconnaissance du street art comme art à part entière. Exposés dans deux institutions parisiennes, ses travaux sont abordés de façon différente : collaborative d’une part et musicale de l’autre.
À la Fondation Louis Vuitton : une valse à deux temps
La Fondation Louis Vuitton prête à nouveau ses murs pour proposer cette fois une fenêtre sur le travail que le peintre a élaboré avec Andy Warhol. Ils auront oeuvré conjointement de 1983 à 1985. En ces deux années seulement, autour de 160 toiles auront été peintes. L’exposition rend compte de cette amitié et aventure exceptionnelle qui réunit deux grands artistes américains de la fin du XXème siècle. C’est par l’intermédiaire du galeriste Bruno Bischofberger que les créateurs, de deux générations d’écarts, se rencontrent. Naîtra de cette intervention une effervescence créative des plus fertiles.
De la multitude de toiles présentées sur les différents niveaux de l’espace d’exposition se dégage le style de chacun, bien qu’il arrive par moment qu’ils deviennent indissociables, comme résultant d’un « troisième esprit », comme le décrivait Keith Haring, ami commun des deux peintres. Ainsi, les logos et autres motifs sérigraphiés par Andy Warhol se fondent avec les mots, les tracés et les personnages de Jean-Michel Basquiat, le tout contribuant à la création d’un langage visuel unique et captivant.
En compléments des monumentales peintures, des photographies montrant Warhol et Basquiat en boxeurs ou en soirée, d’autres oeuvres réalisées en collaboration avec Francesco Clemente ou encore des pièces inédites comme la sculpture Ten Punching Bags (Last Supper) témoignent de la fusion de cette relation. Nourris par les univers de l’un et l’autre, les deux artistes abordent autant de sujets que de supports et de disciplines et offrent un fructueux dialogue.
> Exposition Basquiat x Warhol, à quatre mains, du 5 avril au 28 août 2023 à la Fondation Louis Vuitton
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À la Philharmonie de Paris : Basquiat en musique
C’est par le biais de la musique que la Philharmonie de Paris relève le défi d’aborder l’œuvre de Basquiat autrement. L’exposition Basquiat Soundtracks propose une véritable immersion sonore et visuelle, notamment grâce à de laborieuses recherches dont résulte une partition musicale évolutive capable de se réinventer à l’infini. À l’aide d’une intelligence artificielle, le designeur et ingénieur du son Nicolas Becker a conçu un système capable de produire des scénarios musicaux inédits et progressifs, en s’inspirant sur la façon dont Basquiat lui-même envisageait la musique.
Riche des influences musicales et culturelles du New-York à la veille des années 1980, le peintre cultive en effet des relations diverses et variées avec la scène musicale de son temps. Amateur de styles éclectiques comme la soul, le reggae, le jazz ou encore l’opéra, l’artiste élabore des toiles dans lesquelles ce lien à la musique est tangible. Son vocabulaire graphique, riche en bruits visuels, se construit avec des onomatopées, des citations, des symboles d’éléments d’émission ou diffusion du son (antenne, bouche…) ou encore des pictogrammes rappelant l’univers des bandes dessinées.
Les références à la musique passent également par des allusions biographiques et des représentations de musiciens célèbres comme Charlie Parker (pionnier du be-bop) ou encore Louis Armstrong dans l’oeuvre de Basquiat. Ayant aussi été DJ, musicien dans le groupe Gray, il n’aura cessé de bâtir des ponts entre la peinture et la musique qui l’a continuellement bercée, ce que l’exposition s’attache également à montrer en faisant intervenir d’autres artistes liés à Basquiat tels que Maripol ou encore Merrill Aldighieri.
> Exposition Basquiat Soundtracks, du 6 avril au 30 juillet 2023 à la Philharmonie de Paris