Les années 70 s’invitent dans l’intérieur de Lucia Esteves

Depuis son concept-store bruxellois jusqu’à son appartement, Lucia Esteves met en œuvre ses talents de décoratrice, motivée avant tout par sa sensibilité. Dans son appartement, elle a exprimé sa passion pour les années 70, une réinterprétation dans laquelle elle apporte un souffle contemporain, mue par son goût des créateurs, son énergie et son enthousiasme communicatifs.

C ’est dans le très « français » quartier Brugmann – un peu le Saint-Germain-des-Prés bruxellois avec ses immeubles de style haussmannien et ses hôtels particuliers – que Lucia Esteves vit et travaille, c’est son fief ! L’acquisition de son nouveau logement lui ressemble: spontanée !


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Flamme septante

Elle raconte que, dans l’heure de la signature de la vente de sa maison, elle remarque dans la vitrine d’une agence l’annonce d’un appartement avec, en photo, une magnifique cheminée en laiton seventies inscrite dans un mur en velours vert-mordoré: coup de cœur, visite le lendemain, achat en dix minutes…

Dans le petit bureau aux coloris bruns totalement années 70, rideaux Maison de Vacances. À gauche, lampe à poser Cesta, créée en 1962 par Miguel Milà (Santa&Cole). Sur le fauteuil convertible en velours côtelé Cassina, un incroyable tapis-tableau en peaux de mouton de Carine Boxy.
Dans le petit bureau aux coloris bruns totalement années 70, rideaux Maison de Vacances. À gauche, lampe à poser Cesta, créée en 1962 par Miguel Milà (Santa&Cole). Sur le fauteuil convertible en velours côtelé Cassina, un incroyable tapis-tableau en peaux de mouton de Carine Boxy. © MIREILLE ROOBAERT

« J’ai beau faire partie d’une famille de l’industrie du textile, ce qui m’anime est la création d’univers, trouver l’âme d’une pièce, ce qui se construit autant avec une sensibilité qu’avec des matériaux. J’ai voulu cet appartement-là pour m’exprimer de A à Z et transmettre mon énergie », révèle la décoratrice.

Dans un premier temps, les « racines » de la construction lui paraissant puissantes, Lucia choisit d’en conserver l’essence : le sol de la cuisine, le mur tapissé et la fameuse cheminée du salon. « Je garde autant que possible les éléments d’origine parce que cela fait partie de l’histoire, de la mémoire d’un endroit, comme s’il avait une personnalité. Ensuite, je sublime l’existant. » Pièce maîtresse de son appartement, la cheminée en laiton d’époque a inspiré sa décoration tout en rondeurs et en matières organiques, emblématiques des années 70.

Dans l’esprit du mouvement Mid-Century Modern, des panneaux de noyer d’Amérique donnent de la personnalité au grand couloir. Console des années 70, chinée chez Jean-Claude Jacquemart Antiquités et Décoration, à Ixelles. Fauteuil Tulip, design Eero Saarinen (Knoll). Appliques seventies dénichées chez Rotor DC. Grand miroir Ethnicraft.
Dans l’esprit du mouvement Mid-Century Modern, des panneaux de noyer d’Amérique donnent de la personnalité au grand couloir. Console des années 70, chinée chez Jean-Claude Jacquemart Antiquités et Décoration, à Ixelles. Fauteuil Tulip, design Eero Saarinen (Knoll). Appliques seventies dénichées chez Rotor DC. Grand miroir Ethnicraft. © MIREILLE ROOBAERT

Dans un deuxième temps, les espaces ont été ouverts et redistribués pour faire entrer la lumière et pour profiter des frondaisons de l’avenue Brugmann. Dans la cuisine, le mobilier seventies, avec ses petites arêtes en aluminium, a été conservé et repeint; Lucia a joué le contraste avec un marbre « matiéré » associé à des éléments bleu-vert unis.

Des panneaux de noyer d’Amérique teinté, comme on peut en voir dans les maisons américaines du mouvement Mid-Century Modern (1945-1969), habillent les murs du couloir pour lui donner un caractère sophistiqué. Pour ce projet, Lucia s’est chargée de la direction artistique. Et s’est appuyée sur un architecte, Maxime De Campenaere.

Fauteuils en cuir Amanta, de Mario Bellini (1968, C&B Italia), et tapis-paysage de Carine Boxy.
Fauteuils en cuir Amanta, de Mario Bellini (1968, C&B Italia), et tapis-paysage de Carine Boxy. © MIREILLE ROOBAERT

L’amour des beaux objets

C’est rue Blaes, près des Sablons (un repaire d’antiquaires), qu’elle aime chiner son mobilier: les fauteuils en cuir Amanta, de Mario Bellini (1968, C&B Italia), les incontournables sièges Togo, de Michel Ducaroy (1973, Ligne Roset), les chaises Tulip, d’Eero Saarinen (1956, Knoll)… Seuls accessoires de facture récente, les suspensions en laiton Gervasoni signées Paola Navone, qui font écho à la cheminée.

Lucia Esteves a ouvert la cuisine sur le séjour en créant un comptoir dont le soubassement est recouvert d’un carrelage aux accents seventies (HB-Classics). Cette ouverture est encadrée de noyer d’Amérique. Le choix des matériaux donne le sentiment que cette « fenêtre » est d’origine; elle ne dénote pas avec les autres éléments vintage. Appliques du céramiste Tristan Philippe.
Lucia Esteves a ouvert la cuisine sur le séjour en créant un comptoir dont le soubassement est recouvert d’un carrelage aux accents seventies (HB-Classics). Cette ouverture est encadrée de noyer d’Amérique. Le choix des matériaux donne le sentiment que cette « fenêtre » est d’origine; elle ne dénote pas avec les autres éléments vintage. Appliques du céramiste Tristan Philippe. © MIREILLE ROOBAERT

Pour dégoter ses trouvailles, la maîtresse des lieux se rend chez RotorDC, récupérateur de matériaux de construction (voir IDEAT HS architecture #27) et d’objets vintage. On retrouve aussi de sublimes tapis de l’artiste belge Carine Boxy, en peaux de mouton teintées.

Le tapis bleu électrique du salon twiste avec les coloris sourds de l’appartement, apportant une touche actuelle, mais reliée avec les seventies. Des fourrures qui contribuent à créer une atmosphère chaleureuse et un peu sauvage.

Autour de la table années 70 Behr Möbel, petits fauteuils 80’s en pin originaux de Rainer Daumiller (Hanex), chinées par l’architecte d’intérieur Olivier Goethals, pour Lucia. Sur la table, bougeoir empilable Stoff Nagel, design Hans Nagel et Werner Stoff, véritable icône du design des années 60 (Stoff Nagel Copenhagen). Les étagères faisaient partie des éléments d’origine installés dans l’appartement. Suspension Brass en laiton Gervasoni.
Autour de la table années 70 Behr Möbel, petits fauteuils 80’s en pin originaux de Rainer Daumiller (Hanex), chinées par l’architecte d’intérieur Olivier Goethals, pour Lucia. Sur la table, bougeoir empilable Stoff Nagel, design Hans Nagel et Werner Stoff, véritable icône du design des années 60 (Stoff Nagel Copenhagen). Les étagères faisaient partie des éléments d’origine installés dans l’appartement. Suspension Brass en laiton Gervasoni. © MIREILLE ROOBAERT

Des panneaux japonais translucides, qui se superposent pour moduler la lumière, ont été ajoutés devant les fenêtres, en plus des rideaux, un dispositif que Lucia propose aux clients qui lui confient leur intérieur après avoir passé la porte de son concept-store. Car, arrivée à l’étape de la décoration, Lucia a l’impression de « re-sculpter les espaces. »

Sur le lit Gervasoni, couverture, coussins et linge de lit Maison de Vacances. Lampe de chevet des seventies, chinée chez Jean-Claude Jacquemart Antiquités et Décoration. Sur le portant, robe de la créatrice belge Aude De Wolf.
Sur le lit Gervasoni, couverture, coussins et linge de lit Maison de Vacances. Lampe de chevet des seventies, chinée chez Jean-Claude Jacquemart Antiquités et Décoration. Sur le portant, robe de la créatrice belge Aude De Wolf. © MIREILLE ROOBAERT

Elle poursuit: « Je m’appuie sur une harmonie des couleurs et des matières que les lieux ou la personnalité des clients m’inspirent. Je parle plus d’émotions que de prise de mesures… Tout ce qui est invisible et sensible me touche. Je ne me contente pas de vendre des meubles et des objets, j’accompagne ma clientèle. Je ne suis pas enfermée dans un style. Si les années 70 m’attirent, je sais m’adapter. Dernièrement, j’ai travaillé sur un appartement très contemporain. Évidemment, j’ajoute ma patte et celle-ci est assez organique: j’adore les peaux, les plantes, je collabore beaucoup avec des céramistes, j’apprécie l’artisanat, l’empreinte de la main… »

Dans la chambre, Lucia Esteves a osé une moquette violine épaisse! Elle s’harmonise avec la teinte gourmande coloris R486-Le Pétale Pivoine fragile qui recouvre les murs (Ressource).
Dans la chambre, Lucia Esteves a osé une moquette violine épaisse! Elle s’harmonise avec la teinte gourmande coloris R486-Le Pétale Pivoine fragile qui recouvre les murs (Ressource). © MIREILLE ROOBAERT

Lucia aime aussi composer avec la couleur, car celle-ci possède une vocation émotionnelle. Aussi peint-elle toutes les pièces jusqu’au plafond dans des teintes profondes (de la marque Ressource). Plus qu’une capsule spatio-temporelle, l’appartement de Lucia est un livre ouvert sur sa personnalité.


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