Née d’un père normalien, austère, et d’une mère pianiste, fantasque, Andrée Putman s’est construite en gardant le meilleur de chacun : le goût des arts maternel et la rigueur paternelle. Résultat ? Un style emprunt d’élégance, d’harmonie, épuré mais toujours graphique.
Pourtant Andrée Putman commence sa carrière d’architecte d’intérieur et de designer relativement tard. Passé d’abord par le journalisme chez Elle ou Femina, elle devient, en 1958, directrice artistique de Prisunic. Le lieu idéal pour assouvir son ambition de « changer le monde ». Elle y réalise des pièces de mobilier et de décoration à prix abordables.
En parallèle, Andrée Putman se passionne pour le design des années 1930. En particulier celui de Robert Mallet Stevens, Pierre Chareau ou Eileen Gray. Vingt ans plus tard, en 1978, elle crée la société Ecart dont l’objectif est de mettre la lumière sur les maîtres de la création oubliés du plus grand nombre. Putman touche au succès grâce à ces rééditions.
Andrée Putman, star des années 80
Désormais reconnue dans le milieu, Andrée Putman peut passer du métier d’éditrice à celui de créatrice. Cela tombe bien, la décennie 80 sera celle des designers stars : de l’émergence du mouvement Memphis au début de Jean Nouvel et Philippe Starck. Pourtant ce dernier insiste : « La prêtresse, la grande gagnante, c’était Andrée, raconte t-il dans un documentaire diffusée sur Arte. Personne ne l’a égalée. »
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Cette hégémonie débute sans doute par l’aménagement du Morgans à New York. Le premier boutique-hôtel au monde réalisé dans un budget « ridicule ». Tout le style Putman y est déjà : symétrie, épure, melting pot. Et, en point d’orgue, la salle de bain entièrement couverte de carreaux noir et blanc pour former un damier qui deviendra sa signature. Il ne s’agit pourtant que d’un simple carrelage tel que l’on en trouve dans les HLM de l’époque. C’est bien cela sa marque de fabrique : réconcilier les mondes. Introduire des matériaux ou des formes snobés dans des univers luxueux.
A la recherche du beau
Aux murs de l’hôtel, elle accroche des clichés de Robert Mapplethorpe contre l’avis des propriétaires. Mapplethorpe, Andy Warhol, Basquiat, elle les côtoie tous au Club 54 de New York. A Paris, elle partage ses soirées entre Le Palace, summum du cool de l’époque, des concerts de rock ou des dîners mondains. Andrée Putman cherche surtout à s’amuser, « alléger la vie ».
Derrière une silhouette intimidante,se cachait une femme enjouée mais déterminée à concilier l’utile au beau. En 1996, Hélène Pastor, grande fortune monégasque, lui confie un projet d’immeuble sur le rocher. Andrée Putman regarde la commanditaire et lui dit : « Madame, nous allons réaliser un escalier comme votre collier. »
Le résultat est à couper le souffle. Un fait d’autant plus extraordinaire quand on sait qu’elle ne savait pas dessiner. « A aucun moment je ne me vois comme une architecte d’intérieur, admet-elle pour Arte, mais je me vois plutôt comme quelqu’un qui, très tôt, a voulu changer les choses. » Mission accomplie.
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