A la galerie A1043, le design réconcilie économie et créativité

Dans le IIIe arrondissement de Paris, la nouvelle exposition de la galerie A1043 démontre que « l’économie des moyens ne signifie pas l’économie de l’intelligence, de la beauté et de la poésie », selon les mots de ses fondateurs, Didier Jean Anicet Courbot et Stéphanie Courbot.

Au sein de la galerie A1043, « ce qui compte, c’est d’abord l’intelligence et la créativité du designer », explique Didier Jean Anciet Courbot pour introduire sa nouvelle exposition baptisée « Economy ». A travers une sélection de pièces des années 1980 à nos jours, celle-ci tord le cou à l’idée que des matériaux coûteux et de lourds moyens de production sont nécessaires pour élaborer un design innovant et inventif. Ici, ce ne sont pas la technicité et la qualité des matériaux qui priment, mais la capacité à concevoir des pièces d’exception à partir de moyens rudimentaires.

Au premier plan, deux chaises Plywood de Jasper Morrison (1988).
Au premier plan, deux chaises Plywood de Jasper Morrison (1988). Galerie A1043

Matériau des plus basiques, le contreplaqué est logiquement au rendez-vous. De manière discrète, sous les cylindres en carton du banc Carta de Shigeru Ban, ou largement exposé aux regards, avec un trépied d’Andreas Brandolini, un buffet sculptural de François Bauchet, ou encore avec les tables et les assises Plywood de Jasper Morrison, qui marquent en 1988 les premières incursions du designer anglais vers le style « supernormal » qui reste sa marque de fabrique. Une approche où l’économie des moyens rejoint souvent celle du geste, à la manière du Ponton de l’atelier BL119, qui dessine un centre de table en chêne aux lignes architecturales.

Centre de table Ponton d’Atelier BL119 (2017).
Centre de table Ponton d’Atelier BL119 (2017). Galerie A1043

Aux designers rompus à l’outil industriel, répondent des créateurs à la démarche peu classique. A l’exemple de Lucas Maassen, représenté par un fauteuil peint par ses enfants en un temps record, afin de ne pas enfreindre la législation qui encadre le travail des enfants. Plus que la forme, « il interroge la racine de l’objet. Comment le concevoir ? Comment le produire ? », souligne Didier Jean Anicet Courbot. Passionné par le travail du designer néerlandais, le galeriste/artiste présente également un autre de ses projets, réalisé récemment avec son compatriote Hossie : une collection d’arts de la table, coulée dans des moules en sable et modelés à la main, qui assume pleinement son aspect brut, voire primitif.

Tasses et cendriers de Lucas Maassen et Hossie, réalisés au sein du projet Free Fondery (2018).
Tasses et cendriers de Lucas Maassen et Hossie, réalisés au sein du projet Free Fondery (2018). Galerie A1043

Ancien élève de Lucas Maassen, Pierre Castignola s’attaque quant à lui aux chaises monoblocs. Découpés puis réassemblés dans un enchevêtrement aléatoire, mais extrêmement précis, les dossiers, les accoudoirs et les pieds des assises les plus vendues au monde façonnent des fauteuils à mille lieues de leur banalité d’origine. Les objets les plus humbles et les plus ordinaires se métamorphosent à nouveau avec les troncs colorés de Katia Jacquet, comme avec une corbeille à fruit de Curro Claret. Imaginé en 1999 par le designer espagnol, l’ensemble composé d’une structure en acier et d’un filet à fruits et légumes est d’ailleurs exceptionnellement réédité par la galerie A1043, cette fois en version dorée.

Fauteuil de la série Copytopia n°17 de Pierre Castignola (2018).
Fauteuil de la série Copytopia n°17 de Pierre Castignola (2018). Galerie A1043

Avec la série « Protected Vases », David Dubois accumule des bols et des vases industriels sous un manteau de tissus et de film plastique thermo-rétractable. Ce projet débuté en 2012 s’élargit avec de nouvelles pièces spécialement conçues pour l’exposition, illuminées par une suspension de Bruno Munari datant de 1961. « Une pièce à la limite du rien », construite autour de trois tiges d’aluminium et trois plaques de fibre de verre, qui rappelle que la simplicité des choses suffit parfois à atteindre l’excellence. A l’image de toute la sélection, qui fait l’impasse sur le marbre et le bronze trop souvent synonymes de design de galerie, pour sortir des sentiers battus, dans la lignées des précédentes expositions consacrées aux pièces de Rei Kawabuko et au méconnu éditeur toulousain Tribu.

> Exposition « Economy » à la Galerie A1043. 47, rue de Montmorency, 75003 Paris. a1043.com

Tables d’appoint de la série Lovebuch de Katia Jacquet (2017).
Tables d’appoint de la série Lovebuch de Katia Jacquet (2017). Galerie A1043