Pour construire sur les collines de Val di Noto, il faut savoir faire preuve d’humilité. La Casa Bendico ne déroge pas à cette règle. Nous sommes en Sicile, terre d’histoire et de patrimoine, où l’intégration paysagère est un grand sujet. Pourtant, la tentation d’ériger des bâtisses modernistes est belle. « Ça peut être tellement vulgaire et agressif d’imposer un style anachronique », souffle l’architecte Gaëtan le Penhuel, qui a opté plutôt pour cette villa pour une inspiration locale, celle des fermes siciliennes dont l’aspect massif évoque les premiers temples antiques.
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Une maison bioclimatique en Sicile
La construction de cette maison de 250 mètres carrés, qui a demandé à son architecte Gaëtan le Penhuel sept années de travail au total entre la conception et les finitions, s’est révélée ponctuée de défis à relever. Parmi les complexités, notons la sismicité du terrain, mais aussi le climat, la région étant située à la pointe sud de la Sicile, soit aux mêmes latitudes que les villes de Tunis et d’Alger, avec des pics de chaleurs dépassant très facilement les 40°C l’été.
Une double coque de béton assure l’inertie thermique de la villa : une première en extérieure exposée au climat rigoureux et seconde, intérieure, qui permet de conserver la stabilité des températures dans la maison. Entre les deux : un isolant qui empêche la chaleur de rentrer.
Grâce à un système de puits provençal, le froid capté en profondeur sous terre via un tube en métal est dispatché dans les pièces. Le propriétaire, un éditeur italien de livres d’arts, ayant pour projet d’y séjourner six mois dans l’année, il a donc fallu penser la maison aussi bien pour l’été que pour l’hiver. En plus d’une cheminée, un chauffage au sol a donc été installé.
Autre difficulté : construire une maison énergétiquement indépendante dans un lieu où il n’existe ni réseau électrique, ni eau courante. Puisée sous terre puis traitée, l’eau est chauffée grâce à des panneaux solaires, et l’électricité produite par des panneaux photovoltaïques.
De la pouzzolane du mont Etna
« J’ai choisi une forme épaisse et sombre, qui reprend la pente du toit et les angulations des fermes traditionnelles », reprend-il l’architecte Gaëtan le Penhuel. La Casa Bendico sait en effet se dissimuler : posée à un niveau intermédiaire, elle ne se voit pas de loin.
L’ambiance est ici à la fois brute et minimale. De la pouzzolane extraite aux abords du mont Etna – situé à seulement 100 kilomètres du chantier – a été intégrée à la composition de la structure en béton, réduisant ainsi la part de sable dans le mélange. Le matériau, dans une envie de fusion avec le paysage, prend en conséquence les couleurs du sol de la Sicile, claire quand le temps est sec comme la terre et foncée quand il pleut.
Du mobilier en travertin provenant de carrières de la région de Rome orne la villa. « Nous avons bouché les trous avec des pâtes de résine, seulement sur les plans horizontaux, pour éviter l’empoussièrement de ces meubles », note le Penhuel. Une cuisine extérieure, une fontaine, une douche font de ce jardin un véritable Eden sicilien. La piscine, plutôt un couloir de nage, est mise en retrait, à l’abris d’oliviers centenaires, afin d’envelopper cet oasis de calme et de sérénité. À croire que le paradis existe bel et bien.
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