Résidences : quand le design contemporain s’appuie sur l’architecture

Valoriser et s’inspirer de son environnement architectural est la quête de nombreux designers et curateurs aujourd’hui. Cette année, deux événements ont relevé le défi de manière singulière en Europe.

Sous la forme de résidences d’artistes, au cœur d’une maison traditionnelle grecque ou de l’appartement d’un célèbre architecte moderniste, le dialogue entre art et patrimoine est un terrain de création sans limite. Un moyen de découvrir des architectures particulières, d’entrelacer les disciplines et d’impulser ainsi des projets collaboratifs inattendus.

4Rooms, réinventer l’architecture traditionnelle grecque

Architectes et designers travaillent ensemble à réinventer le décor d’une maison traditionnelle sur l’île de Kastellórizo.
Architectes et designers travaillent ensemble à réinventer le décor d’une maison traditionnelle sur l’île de Kastellórizo. Pasquale+Maffini

Depuis septembre, sur l’île grecque de Kastellórizo, une maison à la porte rouge est le lieu d’expérimentations créatives. Il s’agit du projet 4Rooms porté par Silvia Fiorucci et son association la Società delle Api. L’idée ? Créer une série de plateformes en perpétuelle évolution dans lequel artistes, architectes et designers s’entraident et génèrent des collaborations interdisciplinaires. En 2018, une première expérience nommée 5Rooms fut menée dans la demeure de la fondatrice à Grasse : elle avait, à l’époque, confié à cinq designers la conception de différentes pièces.

Au cœur de la villa Porta Rossa, quatre designers internationaux sont invités à rénover une pièce de la maison, dans le cadre du projet 4Rooms. Pour la curatrice AnnaLisa Rossa, l’initiative permet à la fois de soutenir et promouvoir les designers contemporains, tout en créant un échange entre le lieu, la culture et l’héritage méditerranéen.

Après une première édition à Grasse, la curatrice AnnaLisa Rossa tenait à mettre en avant la jeune garde du design dans un autre contexte.
Après une première édition à Grasse, la curatrice AnnaLisa Rossa tenait à mettre en avant la jeune garde du design dans un autre contexte. Pasquale+Maffini

En résultent quatre projets innovants qui célèbrent l’architecture vernaculaire et l’artisanat local. Dès la salle à manger, le studio Superpoly, lauréat de 5Rooms, donne un avant-goût de la résidence avec une planche de paddle et des lignes de pêche upcyclées dans une atmosphère joyeusement colorée. Sur trois étages, les designers invités déploient leur univers empreint d’un souffle méditerranéen. Le studio Studio Brynjar & Veronika révèlent un travail des matières naturelles avec une touche d’ironie et de poésie.

Chez le sculpteur Phanos Kyriacou, l’espace est minimaliste et teintée de bois clair tandis que le tissage est le fil conducteur dans la chambre conçue par la designer Julie Richoz. Enfin, le collectif UND Studio conclut la résidence 4Rooms en créant, avec fantaisie, une chambre semblant sortie d’un dessin animé qui met à l’honneur les particularités du lieu.

Genius Loci, révéler l’esprit des lieux

Au sein de l’appartement d’Auguste Perret, Genius Loci fait dialoguer architecture, design et art contemporain.
Au sein de l’appartement d’Auguste Perret, Genius Loci fait dialoguer architecture, design et art contemporain. Jeremie Leon

En créant Genius Loci, la curatrice et journaliste Marion Vignal souhaitait dévoiler l’architecture exceptionnelle de demeures privées et « en révéler l’esprit » par un dialogue avec la création contemporaine. L’exposition est ainsi vécue comme une expérience immersive où chaque sens est en éveil. Après une première édition remarquée à la villa l’Ange Volant de Gio Ponti, Genius Loci poursuit sa mission en s’installant cette année dans l’appartement parisien d’Auguste Perret.

Ouverte pour la première fois au public, la demeure de l’architecte moderniste témoigne de son esprit sobre mais assurément créatif. C’est dans cet intérieur, où le béton se taille une silhouette néo-classique, que l’événement fait résonner les œuvres d’artistes internationaux, aussi bien avec l’architecture qu’avec la personnalité singulière d’Auguste Perret.

La chouette, animal totem de l’architecte, ponctue ainsi les espaces de l’appartement à travers l’œuvre en bronze de Thomas Houseago et de la silhouette zoomorphe du fauteuil de Pierre Yovanovitch. Et le monde Antique, cher à Auguste Perret, se retrouve dans le travail sculptural de Benoît Maire et le luminaire déstructuré de Martin Laforet. Des échos constants entre chaque œuvre – parfois imaginée pour l’événement à l’image de la création olfactive d’Atelier Ellena – qui anime à nouveau l’œuvre visionnaire d’Auguste Perret.