Microtopies 2025 : des projets radicaux pour repenser l’espace public

Installations façonnées par de jeunes collectifs d’architectes, d’urbanistes, de paysagistes, de designers et d’artistes, les nouvelles Microtopies, ces micro-architecture qui comptent bien repenser l'espace public, viennent d’éclore dans la métropole lilloise, révélant des lieux devenus presque invisibles et des imaginaires fascinants. IDEAT y était, voici celles que nous avons aimées.

Cabane vivante, Kiosque du Promontoire, Chenille du Bois-Grenier… au total, 10 Microtopies sélectionnées par un jury d’expert en avril ont surgi de terre lors de ce premier week-end de juillet 2025 dans la région, allant de Lille à Bois-Grenier, en passant par Don, Erquinghem-Lys, Loos, Marquette-lez-Lille, Quesnoy-sur-Deûle, Ronchin, Villeneuve d’Ascq et Wattignies. Comme chaque année depuis 2022, certaines disparaîtront à la fin du festival organisé par le WAAO (Centre d’architecture et d’urbanisme), en décembre prochain, tandis que d’autres perdureront, prolongeant ainsi le rêve. « Les Microtopies sont des micro-utopies d’architecture. Le nom vient d’un assemblage : micro pour “petit”, tópos pour “lieu”, et utopie parce qu’elles abordent des sujets profondément ancrés dans des dynamiques et des luttes sociétales, politiques et écologiques. Du coup, ce ne sont pas de petits objets », précise Faustine Horgnies, architecte-médiatrice, responsable pédagogie et activités culturelles au WAAO.


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Microtopies : ce que le participatif peut produire de mieux

Petites par la taille – environ 6 m² – mais grandes par les messages qu’elles portent, les Microtopies reposent sur trois grands piliers : « Premièrement, le recyclage : elles doivent fortement privilégier le réemploi de matériaux, comme des rebuts de chantier. Deuxièmement, le côté participatif : leur construction doit impliquer des structures socio-éducatives présentes sur le territoire de la MEL ainsi que les habitants du quartier. Troisièmement, l’ancrage paysager : l’écosystème, certes humain, mais aussi végétal et animal, dans lequel elles sont implantées doit être pris en considération », précise-t-elle. Pour encourager les participants à respecter ces fondements, une matériauthèque a été mise à leur disposition, grâce notamment au partenariat de l’Atelier des Façadiers et de divers quincailliers, permettant un recyclage et un accompagnement jusqu’à la visserie.

Le coût d’une Microtopie est évalué en moyenne à 10 000 €, financé de manière tripartite par le WAAO, la Métropole et les communes intéressées. Ainsi, chaque équipe lauréate dispose d’une enveloppe de 5 000 € pour concevoir, de A à Z, son œuvre. Car oui ! Comme le montre cette quatrième édition, les Microtopies ne sont désormais plus de simples cabanes, mais de véritables installations artistiques et fonctionnelles. Voici 4 projets qui ont accroché le regard d’IDEAT.


1. À table ! : le jeu de la mémoire collective

« Les garçons, les filles, à table ! ». Cette Microtopie rend hommage à une phrase profondément ancrée dans la mémoire collective et vise à rassembler plusieurs générations autour d’une tablée monumentale et singulière. Conçue par Rémi Deschodt, Louis Duboys Fresney, Baptiste Pernot et César Spriet, elle associe des blocs de béton permanents – évoquant les contours de l’ancienne cité populaire de Wattignies – à des éléments organiques comme le bois et les plantes.

Cette Microtopie rend hommage à une phrase profondément ancrée dans la mémoire collective et vise à rassembler plusieurs générations autour d’une tablée monumentale et singulière.
Cette Microtopie rend hommage à une phrase profondément ancrée dans la mémoire collective et vise à rassembler plusieurs générations autour d’une tablée monumentale et singulière. Benoit Gaboriaud

Surtout, elle est équipée de toits capables soit de créer des zones ombragées, soit de récupérer l’eau de pluie de manière simple, mais efficace, permettant ainsi d’arroser aussi bien les plantes de l’installation que celles alentour. Véritable aire de pique-nique multifonctionnelle, elle est parfaitement en phase avec les exigences du festival, dont l’ambition première est d’offrir aux habitants de véritables espaces de vie.


2. Refuge(s) : petit hôtel, maxi biodiversité

Petit hôtel situé à Villeneuve-d’Ascq, Refuge(s), œuvre de l’agence ANMA, s’inscrit lui aussi parfaitement dans cette démarche. Constitué de trois strates faites de tissu, d’échafaudages et de plantes, il n’existe pleinement que grâce à la vie qu’il abrite. À sa base, insectes et petits mammifères y trouvent l’ombre nécessaire pour se reposer durant l’été.

Petit hôtel situé à Villeneuve-d’Ascq, Refuge(s), œuvre de l’agence ANMA, constitué de trois strates faites de tissu, d’échafaudages et de plantes, n’existe pleinement que grâce à la vie qu’il abrite.
Petit hôtel situé à Villeneuve-d’Ascq, Refuge(s), œuvre de l’agence ANMA, constitué de trois strates faites de tissu, d’échafaudages et de plantes, n’existe pleinement que grâce à la vie qu’il abrite. Benoit Gaboriaud

La partie située à mi-hauteur est, quant à elle, réservée aux humains, qui peuvent s’y prélasser dans des hamacs en corde ou observer, tels des guetteurs perchés, le monde naturel alentour. Enfin, le sommet accueille des volatiles de toutes espèces, dans une harmonie utopique, mais ici bien réelle.


3. Le Kiosque du Promontoire : privilégier le partage

Quant au Kiosque du Promontoire posé à Marquette-lez-Lille, il incarne de manière significative l’un des principes fondamentaux du festival : le partage des compétences. Pour le réaliser, Luis Alarcon, Pamela Cumbal, Vincent Dumay et Grégoire Paulet ont fait appel aux Compagnons du Devoir du Tour de France.

Le Kiosque du Promontoire incarne de manière significative l’un des principes fondamentaux du festival : le partage des compétences.
Le Kiosque du Promontoire incarne de manière significative l’un des principes fondamentaux du festival : le partage des compétences. Benoit Gaboriaud

Spécialistes des techniques de la terre cuite, le collectif a, pour ériger sa structure, partagé leur savoir-faire avec les maçons de l’Association ouvrière. Le kiosque sert ainsi à la fois de repère visuel le long de la promenade urbaine et de scène couverte, grâce à une charpente ornée de toiles en tissu indigo.


4. La Cabane vivante : s’impliquer dans le collectif

Elle aussi située sur une voie verte, La Cabane vivante de Ronchin met en valeur un matériau local – autre objectif fort de cette manifestation – : l’osier tressé. Pour la concevoir, Ambroise Carle, Benjamin Cuvelier et Camille Viala ont proposé à l’association Atelier Paille de mettre la main à la pâte.

La Cabane vivante de Ronchin met en valeur un matériau local – autre objectif fort de cette manifestation – : l’osier tressé.
La Cabane vivante de Ronchin met en valeur un matériau local – autre objectif fort de cette manifestation – : l’osier tressé. Benoit Gaboriaud

Cette Microtopie constitue une nouvelle preuve de la volonté du WAAO d’impliquer les habitants dans les évolutions de leur cadre de vie : une initiative exemplaire.


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