L’appartement ludique et joyeux de Luigi Di Mauro Morandi à Milan

C’est en famille que l’architecte et designer Luigi Di Mauro Morandi nous reçoit dans son bel appartement milanais. L’approche minimaliste du studio Concepta, dont il est le cofondateur, a présidé à la rénovation. Celle-ci a apporté lumière et vitalité aux espaces de vie classiques d’autrefois.

Milan, quartier Porta Romana. Le théâtre Franco Parenti, importante institution culturelle (rénovée par Michele De Lucchi en 2008), a ressuscité un quartier tranquille en faisant venir à lui le public. Dès lors, boutiques, librairies, écoles, bains Misteriosi, restaurants et cafés ont éclos. Luigi Di Mauro Morandi et sa femme, Benedetta, s’y sont installés avec leurs deux filles, Matilde et Nora, il y a cinq ans.


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Joyeux palimpsestes

Lui est architecte et designer au sein du duo Concepta, un studio milanais qu’il a créé avec son amie et consœur Alice Frana, architecte d’intérieur. Milanais d’origine, il se souvient comment, étudiant, suivant les ateliers de Bruno Munari, il eut une révélation : « Dès la première session, il nous a présenté une feuille blanche en nous demandant d’en déchirer les bords, parce qu’un projet, une idée, ne doit pas nécessairement être circonscrit dans un périmètre carré et rectangulaire. »

Luigi Di Mauro Morandi, architecte et designer, avec sa femme, Benedetta, ses filles, Matilde et Nora, et leur chien, Blu.
Luigi Di Mauro Morandi, architecte et designer, avec sa femme, Benedetta, ses filles, Matilde et Nora, et leur chien, Blu. Helenio Barbetta / Living Inside

Cette approche librement conceptuelle a fait germer chez Luigi « une passion pour les facettes, pour les irrégularités » et un désir de voir les choses et les espaces de vie sous des angles inhabituels. Alice, quant à elle, milanaise d’adoption et diplômée de l’École polytechnique de Milan, nourrit une grande sensibilité pour les combinaisons de couleurs. Leurs interventions, minimalistes et discrètes, s’expriment parfaitement ici. La plus perceptible apportant une pureté formelle et matérielle, contrebalancée par l’usage subtil de la couleur et quelques clins d’oeil ludiques.

Dans la salle à manger, table vintage achetée à la galerie milanaise Tempi Moderni. Chaises Universal modèle 4869, design Joe Colombo (Kartell, 1970). Disposés sur le plateau, céramiques de Damiano Groppi et chandelier signé Duccio Maria Gambi. Suspension en laiton avec abat-jour en verre opalin Omega, design Vico Magistretti (Artemide, 1962). À droite, lampe Tizio, design Richard Sapper (Artemide, 1972). Au mur, oeuvre Figura Meccanica, d’Ivo Pannaggi (vers 1926).
Dans la salle à manger, table vintage achetée à la galerie milanaise Tempi Moderni. Chaises Universal modèle 4869, design Joe Colombo (Kartell, 1970). Disposés sur le plateau, céramiques de Damiano Groppi et chandelier signé Duccio Maria Gambi. Suspension en laiton avec abat-jour en verre opalin Omega, design Vico Magistretti (Artemide, 1962). À droite, lampe Tizio, design Richard Sapper (Artemide, 1972). Au mur, oeuvre Figura Meccanica, d’Ivo Pannaggi (vers 1926). Helenio Barbetta / Living Inside

Respecter les caractéristiques de la maison ou de l’appartement, mais l’adapter à la vie de ses futurs occupants est la ligne directrice des deux architectes, qui font de l’écoute le premier de leurs commandements : « Une attention particulière qui nous permet de percevoir ce que le lieu a à offrir – détails d’époque, finitions, revêtements, ambiances – et de comprendre ce que les personnes qui y vivront recherchent réellement. »

Céramiques de Damiano Groppi. Chandelier signé Duccio Maria Gambi. Au mur, Figura Meccanica, d’Ivo Pannaggi (technique mixte sur papier, vers 1926). Les travaux ont laissé apparaître des vestiges de décoration sur les murs, laissés en l’état et associés à des aplats de couleur.
Céramiques de Damiano Groppi. Chandelier signé Duccio Maria Gambi. Au mur, Figura Meccanica, d’Ivo Pannaggi (technique mixte sur papier, vers 1926). Les travaux ont laissé apparaître des vestiges de décoration sur les murs, laissés en l’état et associés à des aplats de couleur. Helenio Barbetta / Living Inside

Un appartement familiale

Leur sensibilité à la notion d’héritage est ici à son comble, puisque l’appartement était celui de la grand-mère de Luigi ! « Ma formation à l’université de Gênes m’a sensibilisé au patrimoine architectural, et cela imprègne ma façon de travailler », explique-t-il. On y retrouve une grande entrée aveugle, une salle à manger, un salon, puis une distribution classique des chambres.

À côté du buffet d’Osvaldo Borsani, qui date des années 50, étagère remplie de vases des années 40 de la collection Rometti Ceramiche. Le sol des années 50 est resté dans son jus.
À côté du buffet d’Osvaldo Borsani, qui date des années 50, étagère remplie de vases des années 40 de la collection Rometti Ceramiche. Le sol des années 50 est resté dans son jus. Helenio Barbetta / Living Inside

Pour intégrer une cuisine ouverte sur le salon-salle à manger, Luigi a décidé d’abattre les murs de l’entrée. Mais il s’est aussi adapté à ce que les lieux lui suggéraient : « Comme il n’était plus possible d’y conserver le dessin original des sols, nous les avons démontés et reposés en fonction de la nouvelle géométrie des espaces. Il en va de même pour les tuyaux du système de chauffage: ils ne sont plus placés contre le mur de la salle à manger, mais ont dicté le thème de la cuisine “suspendue”. »

Cette cuisine, devenue pièce centrale, a donc été conçue sur mesure telle une « machine à rêver » ! Un panneau en verre dépoli peut être ouvert et orienté dans diverses positions. Un garde-manger permet de ranger les éléments essentiels tout en libérant l’espace du comptoir.

Dans la chambre de Luigi Di Mauro Morandi et sa femme, le lit Vanessa, design Tobia Scarpa (Gavina, 1960), se pare d’une couverture Lisa Corti. La table de chevet est un prototype signé de la confondatrice du studio Concepta, Alice Frana. Lampe et céramiques vintage.
Dans la chambre de Luigi Di Mauro Morandi et sa femme, le lit Vanessa, design Tobia Scarpa (Gavina, 1960), se pare d’une couverture Lisa Corti. La table de chevet est un prototype signé de la confondatrice du studio Concepta, Alice Frana. Lampe et céramiques vintage. Helenio Barbetta / Living Inside

Quant à l’aspect volontairement délabré des murs, il vient d’une surprise. « Alors que nous étions en plein chantier, nous avons découvert des décorations sous plusieurs couches de plâtre. Tout devait être plus neutre, mais nous avons préféré jouer avec la palette existante, en intercalant des aplats. »

L’ambiance ludique qui règne dans la chambre de Matilde et de Nora est aussi créée par l’installation d’un filet suspendu.
L’ambiance ludique qui règne dans la chambre de Matilde et de Nora est aussi créée par l’installation d’un filet suspendu. Helenio Barbetta / Living Inside

Pour le mobilier, Concepta collabore depuis des années avec diverses galeries telle Avanguardia Antiquaria. Parfois, le duo part même d’un meuble et crée l’ambiance autour de lui. « Nous cherchons la pièce la plus en phase avec le projet et avec ceux qui vivront là, car le plus important est que, malgré notre intervention, les habitants sentent que l’espace est le leur. Ils doivent s’y reconnaître et donc connaître les éléments qui le composent. »

La salle de bains arbore elle aussi une palette colorée. Vasque Ceramica Flaminia. Robinet Car, collection « Cartesio » (Cea). Céramique de Faenza, en Émilie-Romagne.
La salle de bains arbore elle aussi une palette colorée. Vasque Ceramica Flaminia. Robinet Car, collection « Cartesio » (Cea). Céramique de Faenza, en Émilie-Romagne. Helenio Barbetta / Living Inside

L’épouse de Luigi, qui a travaillé pour des boutiques de vintage, collabore à la recherche de ces pièces à forte identité. D’autres espaces sont eux aussi assez ludiques, constitués de jeux de hublots, d’échelles, de mezzanines.

Ce qui ravit les deux adolescentes qui vivent ici, déplaçant à loisir ces échelles ou s’allongeant dans les airs pour lire ou rêvasser sur des filets suspendus comme ceux des catamarans. Mais malgré les greniers et les filets flottants, lorsque la famille est au complet, c’est bien autour de la salle de séjour que tout le monde gravite.


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