Est-ce parce qu’elle a étudié dans le seul bâtiment signé Le Corbusier aux États-Unis, le Carpenter Center for the Visual Arts construit sur le campus de Harvard, à Cambridge, que l’Américaine Lily Stockman intitule sa nouvelle exposition « Minotaur » ? Réponse à la Maison La Roche, splendide réalisation de l’architecte où elle présente ses derniers tableaux, vibrants de couleurs primaires.
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Dialogue avec Le Corbusier
La Maison La Roche, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco, a été conçue et bâtie entre 1923 et 1925 par Le Corbusier et Pierre Jeanneret. Aux murs à l’esthétique minimaliste, le propriétaire, Raoul La Roche, avait accroché des toiles de Picasso, de Braque ou de Léger, les oeuvres répondant à merveille aux choix polychromiques de Le Corbusier, qui affirmait : « Si tel mur est bleu, il fuit. S’il est rouge, il tient le plan. »
Cette théorie des couleurs, Lily Stockman (né en 1982 à Providence, dans l’État du Rhode Island) l’a faite sienne, estimant elle aussi que la couleur influe sur le ressenti.
Pour sa dernière série de tableaux, elle a donc favorisé les teintes primaires (rouge, jaune, bleu) et les formes abstraites, symétriques, aux bords arrondis, qu’elle réalise à l’aide de lignes se succédant, couche après couche, le pinceau saturé de pigments qu’elle dilue dans de l’huile de noix. Pourtant, certaines lignes se révèlent irrégulières.
Ces imperfections graphiques, qu’elle appelle des « caprices de la main », jamais elle ne les corrige. L’ensemble vibre d’énergie. Il évoque les champs de son enfance cultivés par ses parents dans leur petite ferme du New Jersey, comme les miniatures mogholes qu’elle a étudiées à Jaipur, en Inde, ou les arcs-boutants des immeubles Art déco de Los Angeles, où elle réside.
Diverses influences
Cette exposition, intitulée « Minotaur », rappelle à la fois l’obsession de Le Corbusier pour le taureau, qu’il a maintes fois représenté, et la revue éditée par les surréalistes de 1933 à 1939.
Dans l’éditorial du numéro 9, il est écrit : « En présence d’une actualité de jour en jour de plus en plus dévorante et compte tenu des formes de notre périodicité, nous croyons pouvoir dire que, fidèle à son titre même, Minotaure s’est proposé d’absorber et de dépasser en ce qu’elle a de toujours épisodique, cette actualité. »
Un projet similaire à celui de Lily Stockman, car les lignes qu’elle trace inlassablement, méthodiquement, procurent à celui qui les suit du regard une sorte de paix intérieure.
> « Minotaur », de Lily Stockman. À La Maison La Roche, 8-10, square du Docteur Blanche, Paris (XVIe), du 29 mai au 29 juin. Fondationlecorbusier.fr
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