Hello Tomorrow !: quand le design du passé se conjugue au futur

Jouant à fond la carte du rétro futurisme, la nouvelle série Apple TV+ en met plein les yeux avec ses décors vintage à la sauce science-fiction. Disponible sur la plateforme depuis le 17 février, elle met en scène un monde teinté de nostalgie truffé de gadgets et dénonce les limites du rêve américain.

Dès le générique, le ton est donné. Un téléviseur vidéosphère, une Buick volante et des robots à toutes les sauces, Hello Tomorrow ! nous plonge dans un futur tel qu’on le fantasmait dans les années 50.



Dans ce monde où l’on se déplace en jetpack et où la technologie a supplanté les humains pour toutes les tâches ingrates, Jack Billings est un vendeur itinérant capable de vous vendre un grain de sable en plein désert.

Employé par la société BrightSide, son équipe quadrille l’Amérique profonde pour vendre des résidences sur la lune, étonnamment accessibles à des budgets modestes. Mais les rêves d’une vie plus douce à 385 000 kilomètres de la terre tiendront-ils toutes leurs promesses ?

Sans dévoiler les arcanes d’un scenario qui questionne notre frénésie consumériste, la série est surtout un réjouissant prétexte pour réinventer le design de l’époque fifties, déjà riche en créativité.

Dewshane Williams dans Hello Tomorrow!
Dewshane Williams dans Hello Tomorrow! Peter Kramer et Apple TV

Le progrès par l’objet

Dans Hello Tomorrow !, il y a un gadget pour tout. Du friseur à cheveux mobile au dictaphone transcripteur en passant par la rôtissoire cloche ou la poussette flottante, le quotidien est rythmé par tout un tas de trouvailles plus ou moins heureuses.

« Tout a été conçu pour vous aider, même si vous n’en aviez pas forcément besoin » explique le réalisateur Jonathan Entwistle selon qui « cette mécanisation de la vie normale n’est pas toujours à la hauteur de l’avenir que nous espérions ».

D’après Billy Crudup (qui campe le rôle de Jack Billings) « tous ces gadgets magnifiquement nuls ont quelque chose de romantique mais font sonner faux le rêve américain ».

Les scénaristes reconnaissent d’ailleurs avoir pris un malin plaisir à mettre des objets dans leur script, juste pour voir comment l’accessoiriste Eric Cheripka allait leur donner vie.

Tout comme la cheffe décoratrice Maya Sigel : « Nous lancions des idées en l’air comme un porte-épices rotatif pour la cuisine et le lendemain matin, il était là prêt à fonctionner ».

Haneefah Wood et Hank Azaria dans « Hello Tomorrow!, »
Haneefah Wood et Hank Azaria dans « Hello Tomorrow!, » Peter Kramer et Apple TV

Des robots imparfaits

En plus de son cortège de gadgets farfelus, la série est également animée par de nombreux robots. Et eux non plus, ne fonctionnent pas toujours comme espéré.

Facteur, jardinier, barman, policier ou majordome, chacun accomplit ses tâches avec un succès relatif. « Ils sont hilarants, bizarres, un peu stupides mais aussi plutôt cool » explique le scénariste Stephen Falk. « Mais attention, on n’est pas dans Star Wars, ils ressemblent plus à une poubelle industrielle avec un œil de cyclope ».



Fabriqué par la société Jet SetsLos Angeles), le bot principal de la série est ainsi affublé de plusieurs capots pour lui faire jouer différents rôles.

D’une certaine envergure, il a notamment conduit Maya Sigel à adapter ses décors pour en faciliter les déplacements : « Par exemple dans l’hôtel, le bar a plus de profondeur que prévu pour permettre cette chorégraphie des robots. »

Entre rêve et réalité

L’esthétique spectaculaire de Hello Tomorrow ! passe par de nombreux autres détails. À commencer par une image au format panoramique, hommage au style VistaVision de l’époque fifties.

Pour composer ses décors, Sigel a multiplié les recherches en se plongeant dans une période où les gens regardaient vers l’avenir : « Nous avons examiné les foires commerciales futuristes ou les expositions de cuisine de demain en nous demandant ce qui ferait sens si le voyage spatial était possible ».

Billy Crudup, Nicholas Podany et Haneefah Wood dans « Hello Tomorrow!
Billy Crudup, Nicholas Podany et Haneefah Wood dans « Hello Tomorrow! Peter Kramer et Apple TV

En collaboration avec les costumières, la cheffe décoratrice coordonne sa palette de couleurs et de motifs respectant les lignes géométriques des années 50. Et identifie des lieux de tournage connotés comme un quartier de maisons de classe moyenne à Manhasset (Long Island), la légendaire épicerie Barney Greengrass dans l’Upper West Side de Manhattan ou le hameau de Lido Beach.

Pour une scène de voyage spatial, l’équipe a même tourné toute une journée dans le terminal TWA de l’aéroport JFK (conçu par Eero Saarinen) aménagé pour l’occasion d’un mobilier sur mesure.

L’hôtel Vista Motor Lodge où se déroule une grande partie de l’action fut en revanche créé en studio, à Brooklyn. « Il s’inspire de ces hôtels et restaurants des années 50 qui ont fait avancer le design » explique Sigel.  « Je me suis référée au style d’architecture futuriste Googie que j’ai marié à d’autres choses ».

Enfin pour créer la maquette du complexe résidentiel lunaire BrightSide, la jeune femme emprunte au style moderniste de Palm Springs. « Sa forme est ronde et futuriste, avec un aménagement paysager très minimaliste dans un désert avec des palmiers ».

Satyre contemporaine

S’amusant des codes d’une époque résolument optimiste où tous les rêves étaient permis, Hello Tomorrow ! n’en reste pas moins un miroir de l’Amérique moderne. Car derrière cette fuite en avant régie par le progrès, l’insatisfaction demeure.

Au point d’ailleurs que la seule échappatoire possible semble être de quitter une terre manifestement aliénante. Et tout recommencer à zéro sur la lune.