Le 19 mars prochain, la maison de vente Sotheby’s mettra aux enchères les collections qui habitaient les deux résidences d’Yves Gastou, grande figure des marchands disparue en 2020. De Sottsass à Poillerat en passant par César, les lots sont à l’image du goût du mélange de cet antiquaire à la curiosité tous azimuts.
À lire aussi : Disparition : Yves Gastou (1948-2020), pionnier des arts décoratifs
« Yves Gastou ramassait les objets que d’autres ne voyaient pas »
Ceux qui ont déjà arpenté le quartier de Saint-Germain-des-Près n’ont pas pu rater cette devanture en total look terrazzo, signée Ettore Sottsass, qui se démarque des pierres de taille environnantes. Et dire qu’en 1985 Yves Gastou a dû arriver jusqu’à Jack Lang pour obtenir la permission de revêtir cette façade qui deviendra par la suite culte parmi les amateurs de design. Aujourd’hui, Victor Gastou y est aux manettes, après avoir remplacé son père, décédé il y a quatre ans. Restent un appartement à Paris et une maison à Biarritz, généreux témoignages des passions éclectiques d’Yves Gastou mises aux enchères chez Sotheby’s à travers plus de 300 lots – dont une moitié en ligne du 13 au 20 mars.
Victor Gastou explique : «Il y avait l’idée de partager le goût d’Yves. Je crois qu’un nom meurt quand il n’est plus prononcé. La provenance d’une pièce est toujours très importante pour les collectionneurs, cette magie de la faire voyager dans le temps pour retracer à qui elle a appartenu… Alors c’est peut-être prétentieux, mais j’avais envie de marquer ces objets pour que la mémoire d’Yves perdure dans le temps, que les gens puissent raconter leur Yves et dire : « Ce meuble vient de la vente Gastou », en faisant visiter leur appartement. J’espère qu’ils m’aideront à le faire vivre – mon côté romantique sans doute».
Car c’est le Gastou intime qui se dévoile ici et non pas l’antiquaire. Certes, la grande table basse Goutte d’eau en fonte d’aluminium d’Ado Chale et le cabinet Carapace en laque rouge de François Cante-Pacos auraient parfaitement pu trouver leur place à la galerie ou sur un stand, mais les ensembles de reliquaires, ex votos, croix et autres bondieuseries relèvent, eux, d’une « collectionnite » bien plus personnelle. Autant d’objets qui peuplaient les étagères et notamment la très belle bibliothèque d’André Arbus et Gilbert Poillerat à Biarritz transformée en cabinet de curiosités à profusion par l’enthousiasme accumulateur qui caractérisait Yves Gastou – certains se souviendront de sa pléthorique collection de bagues masculines, publiée dans un livre en 2018 par Albin Michel.
Sotheby’s promet des records de vente
Pas de place pour les hiérarchies chez Yves Gastou comme le confirme son fils : « Il y en a qui sauvent les animaux du bord de la route et d’autres, les objets. Lui avait ce côté-là… de ramasser les objets que d’autres ne voyaient pas, avec son instinct et sa curiosité. Il avait cette capacité à s’étonner devant les choses »… quitte à faire cohabiter une Expansion de César avec toute une famille de toys très pop dans son appartement parisien plein d’humour.
Une liberté et une intuition qui ont toujours guidé Yves Gastou à travers ses découvertes et ses choix parfois audacieux : « Ce n’est pas simple d’avoir autant de spécialités en tant que marchant, confirme Victor Gastou. Passer des années 1940 aux seventies comme il l’a fait, c’est courir le risque de perdre beaucoup de clientèle, mais une fois qu’on a eu des chefs d’œuvre entre les mains, on est aussi obligé d’évoluer. Autrement dit, se reconstruire, créer un nouveau discours et installer une autre image ».
D’expositions en foires, le goût du mélange s’affirme en quelque sorte comme la marque de fabrique Gastou, avant de devenir une véritable tendance dans la décoration. Mais si cette fantaisie ne s’achète pas, le reste en revanche a un prix et les enchères promettent de monter assez haut comme le laisse entendre Florent Jeanniard, Vice-président de Sotheby’s France et responsable du Design : « La désirabilité d’une pièce collectionnée, vue et touchée par Yves Gastou, forcément ça n’a pas de prix. Déjà les ventes de collections ont un supplément d’âme, alors quand celles-ci sont associées a une personnalité aussi respectée, cela a un impact sur le prix. Oui, il y a un gain ». L’abondance, encore et toujours.
> Vente aux enchères en salle le 19 March 202 à 14h30 au sein de Sotheby’s Paris, plus d’informations ici
À lire aussi : Comment expliquer l’incroyable cote des Lalanne dans les maisons de vente ?
