Hoi Chan Kwok à la galerie Laffanour

Trônes : une expo retrace les chaises culte des années 50 à nos jours

De la création iconique de Charlotte Perriand pour la station les Arcs à la légendaire chaise Dalila de Gaetano Pesce, retour sur l'histoire des sièges les plus célèbres au monde.

Pièce emblématique du design, l’assise, qu’elle soit fonctionnelle ou purement sculpturale, a de quoi faire tomber plus d’un collectionneur à la renverse. Avis aux amateurs intrépides, les chaises culte ou plutôt les « Trônes » font l’objet d’une exposition chez Downtown +, nouvelle entité de la galerie éponyme. Zoom sur trois pièces iconiques.


Lorsqu’une galerie parisienne – monstre sacré du design – du nom de Laffanour / Galerie Downtown invite les nouvelles générations à revisiter ses collections, cela donne un concept baptisé « Downtown + ». Connue pour exposer les plus belles pièces de Jean Prouvé, Charlotte Perriand et Pierre Jeanneret, l’adresse a tout misé sur le travail des architectes modernistes du XXème siècle.

CHARLOTTE PERRIAND. Chaise en bois avec dossier et assise en paille, Ca. 1963
CHARLOTTE PERRIAND. Chaise en bois avec dossier et assise en paille, Ca. 1963 Laffanour

Au tour de Luna Laffanour, fille du fondateur, de poursuivre la lancée et convier la scène contemporaine à dialoguer avec les œuvres de la galerie. L’exposition « Trônes » apparaît comme le premier volet de ce nouveau projet qui ambitionne de confronter art contemporain et design, à travers des expositions tant physiques que digitales.

A l’honneur de cette première édition, le commissaire d’exposition Romain Bitton met en scène les sièges phares de la galerie, des chaises culte allant des années 50 à nos jours, en écho au travail de l’artiste contemporain new-yorkais Tim Wilson, dont les tableaux figurent des intérieurs peuplés… d’assises. Please, have a seat, on vous présente trois de nos « Trônes » favoris !

Fauteuil Elda, Joe Colombo (1963)

JOE COLOMBO. Fauteuil Elda 1005, Ca. 1963-1965
JOE COLOMBO. Fauteuil Elda 1005, Ca. 1963-1965 DR

On a le sentiment de l’avoir toujours connu, et pour cause, ce siège culte occupe aussi bien le grand écran (on le retrouve tour à tour dans Hibernatus (1969), L’Espion qui m’aimait (1977) ou encore The Hunger Games (2012)) que les collections des plus grands musées et amateurs de design.

Signé Joe Colombo, l’un des designers italiens les plus audacieux de son époque, ce « trône » porte en lui toutes les exigences et visions de son célèbre créateur, à commencer par l’utilisation de nouveaux matériaux au profit d’une amélioration du confort de la vie domestique. Nous sommes en 63 et, selon la légende, le designer se serait inspiré de la visite d’un chantier naval et de la découverte des coques de bateau moulées pour miser sur la fibre de verre pour son nouveau fauteuil.

Siège Elda de Joe Colombo
Siège Elda de Joe Colombo Joe Colombo

Il pourra pivoter à 360 degrés et sera aussi rembourré et garni de cuir pour une aisance maximale. Son nom ? Elda, comme la femme du designer, preuve d’amour ultime. Avec son style Space Age et son aspect enveloppant, c’est un combo gagnant ! Toujours édités par Longhi, les modèles vintage ravissent les collectionneurs, à bon entendeur …

Tabouret Elephant, Sori Yanagi, 1954

SORI YANAGI, tabouret Elephant, 1954, fibre de verre et polyester de résine. Polypropylene teinté. H.37 x W.39 x D.36 cm
SORI YANAGI, tabouret Elephant, 1954, fibre de verre et polyester de résine. Polypropylene teinté. H.37 x W.39 x D.36 cm Sori Yanagi

Assistant de Charlotte Perriand lorsqu’elle séjourna au Japon et fils de Soetsu Yanagi (fondateur du mouvement Mingei), Sori Yanagi, est l’une des figures majeures du design industriel japonais. Son tabouret Elephant de 1954 apparaît comme l’incarnation d’un style ludique, minimal et visionnaire. Empilable et léger, il s’utilise aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur et se transporte aisément. 

Une pièce emblématique pour ce designer qui avait à cœur de faire la synthèse entre la tradition extrême-orientale et les préoccupations fonctionnalistes occidentales puisque la coutume au Japon voulait que l’on s’assoie directement sur le tatami. Fabriqué initialement selon la technique de la fibre de verre, ce siège aux allures de pachyderme a été conçu pour faire office de chaise de travail dans le studio du designer. Edité successivement par Kotobuki, Habitat, puis Vitra, on le retrouve désormais dans une version de plastique moulé, plus commune et moins rare que les premiers modèles en fibre de verre. Une chaise culte !

Linguine Chair, Ron Arad , 2020

Chaise Linguine de Ron Arad
Chaise Linguine de Ron Arad Presse

Cousine de la Papardelle et de la London Papardelle, la Linguine Chair est l’une des récentes créations du designer israélien Ron Arad. Avec son esthétique qui traduit une imagination débordante (qui d’autre que lui pour détourner un symbole de la cuisine italienne et en faire une assise ?), ce siège des années 2020 est une œuvre d’art à part entière. Editée à seulement 20 exemplaires (celle-ci étant la numéro 2), la Linguine Chair est réalisée en acier inoxydable tissé, le même matériau que les tapis roulants de l’industrie alimentaire, qui permet une structure résistante et flexible.

Installé à Londres depuis les années 70 après avoir entrepris des études d’art à Jérusalem, le créateur star n’a eu de cesse de hisser la discipline du design à son plus haut degré expressif, flirtant souvent avec la sculpture. Ron Arad s’appuie sur le potentiel des nouvelles technologies pour réaliser ses projets les plus fantaisistes et réussit la prouesse d’allier art et industrie. C’est ainsi qu’il passe de la pièce unique ou édition très limitée en métal à une production en plastique plus conséquente — notamment pour Kartell — en éditant consciencieusement ses créations « en grande série, sans faire mourir leur poésie ». Se prélasser sur une pâte d’acier est désormais un rêve accessible, l’eusses-tu cru ?

> Ces chaises culte sont à découvrir lors de l’exposition Trônes, du 31 mai au 3 juin 2023. Downtown +, 72, rue de l’Université 75007 PARIS