Elliott Erwitt et Erwin Olaf : deux expositions sous forme d’hommage

Du Groninger Museum à La Sucrière, ces deux expositions de photographies sont incontournables ce mois-ci.

Les photographes Elliott Erwitt et Erwin Olaf sont morts à quelques semaines d’intervalle. Le premier avait choisi de témoigner de la réalité avec humour, le second préférait la nimber de mystère. Deux expositions photos leur rendent hommage.


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Erwin Olaf, maître de l’énigme

11.15am de Erwin Olaf.
11.15am de Erwin Olaf. DR

Son leitmotiv ? Briser les tabous. À l’instar de cette fameuse série intitulée « Keyhole » (« trou de serrure »), Erwin Olaf, né en 1959 aux Pays-Bas, donnait toujours l’impression au regardeur de pénétrer par effraction dans un territoire fantasmagorique. Quelle que soit la commande – mode ou publicité –, il sourd de chacune de ses images une inquiétante étrangeté.

S’y croisent des femmes obèses, de jeunes hommes nus, des nains casqués et des clowns trop maquillés, dans des décors minutieusement préparés et baignés dans un clair-obscur qui évoque les chefs-d’œuvre de la peinture du Siècle d’or : mettre l’ombre, la part obscure de la nature humaine, dans la lumière.

En 2009, il signait le triptyque I Am, I Wish, I Will Be, trois autoportraits, depuis l’homme dans la force de l’âge jusqu’au malade intubé. Il est décédé à 64 ans du mal dont il souffrait, un emphysème pulmonaire. Reste son œuvre, envoûtante et subversive, entre thriller érotique et film noir *.

* En 2015, le photographe nous avait fait l’honneur d’accepter la carte blanche que nous lui avions offerte (IDEAT #115 à retrouver sur Thegoodconceptstore.com).

> « Erwin Olaf ». Au Groninger Museum, à Groningue (Pays-Bas), jusqu’au 10 mars. Groningermuseum.nl


Elliott Erwitt, comique de situation

Danseuses de spectacle, Las Vegas, Nevada, États-Unis, 1957.
Danseuses de spectacle, Las Vegas, Nevada, États-Unis, 1957. Elliott Erwitt

« Tout est sérieux, rien ne l’est », telle était la devise d’Elliott Erwitt (1928-2023). Soixante années durant, il s’employa à partager sa vision du monde, un monde tragi-comique où l’ironie le dispute à la tendresse. Membre de l’agence Magnum depuis 1953, il immortalisa des légendes : Fidel Castro, Che Guevara, Marilyn Monroe ou Jacqueline Kennedy, mais aussi des enfants, des chiens, des vacanciers à la plage…

Cet homme au regard espiègle n’hésita pas à réunir ses pires photos dans un ouvrage intitulé The Art of André S. Solidor a.k.a. Elliott Erwitt. De son vrai nom Elio Romano Erwitz, il ne manquait jamais de préciser qu’il devait sa carrière à Benito Mussolini : « Qui me chassa du pays quand j’étais jeune », à Susan Erwitt (son épouse de 1977 à 1984) : « Qui me chassa de ma famille un peu plus tard », et à Nicéphore Niépce
(qui inventa la photographie en 1816) !

Il laisse un héritage en noir et blanc, émaillé de clichés emblématiques comme celui de ce couple s’embrassant dans une voiture face à l’océan Pacifique dont l’image se reflète dans un rétroviseur. L’une des plus belles expositions photos à découvrir cet hiver.

> « Elliott Erwitt – Rétrospective ». À La Sucrière, à Lyon, jusqu’au 17 mars. Expo-elliotterwitt.com


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