Demeure iconique : la Casa Z de Peter Zumthor, cube de béton et de verre

Au milieu de la nature sauvage des Grisons, en Suisse, la maison-atelier de l’architecte Peter Zumthor se présente comme un havre de paix et de créativité. Découverte de l’une de ses pièces maîtresses, la Casa Z. 

Pape de la slow architecture, amoureux du temps qui passe et du temps que l’on laisse passer, l’architecte suisse Peter Zumthor est sans équivoque l’un des piliers de la discipline. Un éloge de la lenteur qu’il cultive dans ses nombreux projets, et dont l’exemple par excellence est à la fois son atelier et son lieu de villégiature : la Casa Z.


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La Casa Z, d’abord un studio…

Loin de tout, au milieu des montagnes du canton des Grisons situé à l’Est de la Suisse, s’est réfugié l’un des architectes les plus importants des XXe et XXIe siècles. Né à Bâle en 1943, Peter Zumthor s’est rapidement affirmé comme l’une des grandes voix de l’art de bâtir. Lauréat du Prix Pritzker en 2009, il est notamment à l’origine de la Secular Retreat, dans le Devon, en Angleterre, du Pavillons de la Serpentine Gallery de Londres en 2011 ou encore des Thermes de Vals. De l’Autriche au Royaume-Uni, en passant par son pays natal, il a su se construire un style propre, résidant notamment dans des principes fondamentaux qu’il liste lui-même ainsi :  « lieu, matériau, énergie, présence, souvenir, mémoire, images, densité, atmosphère, permanence et concentration ». Des principes qui culminent dans un bâtiment que l’architecte imagine pour lui-même.

Le projet est lancé dans les années 1980, lorsque Peter Zumthor fait l’acquisition d’une ancienne maison de campagne dans le village de Haldenstein en vue d’y installer son atelier. À l’achat auquel succède une démolition, la demeure ne bénéficiant que de peu de lumière naturelle. Une table rase du passé qui laisse ainsi libre court à sa créativité. Le Suisse imagine ainsi un bâtiment rendant hommage à l’architecture locale du canton des Grisons. La structure reprend les codes des anciennes fermes de la région, toute en hauteur, étroites et composées de longs panneaux de bois constituant également sa façade.

Radicale par sa forme rectangulaire, elle se démarque par ses nombreuses ouvertures sous la forme de baies vitrées, baignant le studio dans la lumière. L’intérieur illuminé par la façade sud fait lui aussi la part belle au bois, trouvant sa place au niveau des plafonds et des murs, aboutissant à la création d’un cocon chaleureux dont la monotonie se voit brisée par un sol en béton ciré. Le mobilier est lui aussi sélectionné avec soin, un assortiment de fauteuils LC2 du Corbusier et de pièces en métal qui contrastent avec la chaleur du bois. Une bulle créative d’où il continue de diriger ses nombreux projets, à l’image de l’extension de la Fondation Beyeler à Bâle, sa ville de naissance, ou encore du LACMA, à Los Angeles.

… puis un logement

Une première étape à laquelle succède une seconde construction, débutée bien des années plus tard et achevée en 2005. Extension du premier bâtiment, cette nouvelle aile se dessine en forme de U et s’appuie sur une esthétique toute autre. Le bois s’est fait la malle au profit d’une profusion de métal, de verre et de béton, matière qui constitue la majorité de la structure et s’affiche dans sa version la plus brute sur les façades, elles aussi ouvertes par des fenêtres XXL.

À l’intérieur, l’architecture longitudinale aboutit à la création d’espaces élancés encore augmentés par l’importante hauteur sous plafond. Dans son atelier privé – la frontière entre espace de travail et privé est des plus minces – les baies vitrées donnent sur une jardin planté de fleurs sauvages et d’érables. Des suspensions descendent du plafond à intervalle régulier, tandis que le reste du décor s’inscrit une nouvelle fois dans une esthétique du dépouillement, augmentée par les murs en béton.

Des pièces de Ray et Charles Eames côtoient des créations de Charlotte Perriand, dont la chaise LC7 dans sa version rouge arrive, touche de couleur inattendue dans un lieu où règne la neutralité. Des productions signées, mais aussi de nombreux éléments confectionnés sur-mesure par des artisans de la région. Ébéniste de formation, Peter Zumthor privilégie tout particulièrement le bois, mais aussi le métal à travers des créations comme le poêle du salon réalisé par un serrurier.

Le clin d’œil aux Grisons, évident dans le premier bâtiment qui en reprend les codes architecturaux, se retrouve aussi ici, à l’intérieur. Le verre, quant à lui, reste le matériau principal des deux ailes de la Casa Z. Dans la cuisine, la séparation entre dedans et dehors semble effacée, les baies vitrées faisant le tour de l’espace l’ouvrent sur la forêt environnante et la hotte du plan de travail semble flotter au milieu des arbres. Un havre de paix et de créativité dans lequel il fait très certainement bon travailler.


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