Figure majeure du design Finlandais du XXe siècle, Alvar Aalto (1898 – 1976), architecte, urbaniste, écrivain, fabricant de meubles, fonde la marque Artek en 1935, dessine l’année précédente le tabouret E60 à quatre pieds, souvent copié mais jamais égalé et l’année suivante le vase Savoy édité par Iittala. En parallèle, il signe de nombreux bâtiments, privés et publics, aux espaces semi-ouverts, lumineux, qui flirtent fièrement avec l’extérieur et pour lesquels il s’inspire de la forêt de son pays et de paysages italiens. En toute subjectivité, IDEAT a sélectionné ses 5 préférés.
À lire aussi : Alvar Aalto, plus célèbre architecte et designer finlandais
1 – Sanatorium de Paimio, Finlande (1929-1933)
Alvar Aalto crée des édifices publics avec en tête l’idée que « l’architecte, loin d’être un artiste est un administrateur social » (l’esprit du Bauhaus et la philosophie de Walter Gropius) et persuadé qu’une bonne conception améliore le quotidien des gens. Parmi eux, le Sanatorium de Paimio, en Finlande, construit entre 1929 et 1933, en est l’exemple type. Alvar Aalto dessine les plans et le mobilier de ce centre pour tuberculeux et veut soigner les maux grâce à une architecture au service du bien-être du corps et de l’esprit.
Après une étude détaillée sur les besoins des patients il travaille une approche novatrice de la lumière, des couleurs et des matériaux. Les fenêtres en bandeau laissent entrer le soleil – indispensable dans le processus de guérison de la tuberculose à l’époque – et il veille à éviter la gène oculaire des patients alités grâce à des plafonds plus foncés. Il installe des verres colorés aux fenêtres pour créer une atmosphère apaisante et dessine du mobilier fonctionnel et ergonomique, comme les chaises en bois courbé Paimio, facilitant aux patients la respiration.
2 – Bibliothèque de Viipuri, Russie (1933-1935)
« La bonne architecture est curative, elle fait du bien. » Une vision cultivée par le designer dans tous ses projets, dont la bibliothèque de Viipuri, où le confort du lecteur est la priorité. Dans ce bâtiment en « tête à queue » (deux volumes en décalage l’un contre l’autre), acoustique, bien-être et fonctionnalité vont de paire : le plafond ondulé, en lattes de pin, permet un rendu phonique d’exception en salle de conférence.
Pour un confort optimal, les suspensions, inspirées du soleil et des colline, procurent un éclairage doux, diffus et uniforme. Le lieu est ouvert sur la nature, à côté d’un parc environnant. L’architecte, friand des ouvertures, laisse entrer le soleil, sans jamais déranger le lecteur. Pour le mobilier, il privilégie le bois et signe notamment à cette occasion le fameux tabouret empilable E60 à quatre pieds.
3 – L’immeuble de la rédaction du journal Turun Sanomat, Finlande (1927-1929)
Longtemps influencé par le père de l’architecture moderne, Alvar Aalto inclut dans la conception de l’immeuble de bureaux du journal Turun Sanomat les cinq points clés chers au Corbusier : la grille de colonne avec pilotis, la façade et le plan libres, la terrasse longeant le bord du toit, les fenêtres en bandeau. La devanture affiche la une démesurée du quotidien Finlandais.
Alvar Aalto brouille mêle ici habitat, travail et loisirs dans un style organique grâce à des lignes courbes et des puits de lumière circulaires. Le bâtiment massif abrite, sur cinq étages, salles d’impression, salle de presse mais aussi quelques magasins et des appartements à louer. Il conçoit les lampes des couloirs, les cloisons de séparation entre les espaces de travail… et quelques polices de caractères à la demande du directeur de la publication !
4 – La maison Mairea, France (1937-1939)
Quant il imagine la villa Mairea, Alvar Aalto s’inspire, comme souvent, du travail de l’architecte Frank Lloyd Wright et notamment de sa maison cascade située aux États-Unis. Lovée au sein de la forêt dense des Yvelines, cette maison en L de 450 mètres carrés, réalisée pour un couple d’industriels, Maire et Harry Gullichsen, invite la nature à pénétrer dans l’espace.
Véritable symbole architecturale, elle trouble volontairement la perception de son visiteur, brouillant les frontières entre intérieur et extérieur. Son toit en ardoise – hommage à la Bretagne chérie par ses propriétaires – ses galbes et ses murs à mi-hauteur, inspirés de la tupa, la maison traditionnelle finlandaise, participe à son charme.
5 – La maison Louis Carré, France (1956-1961)
Le galeriste Louis Carré pense d’abord à Le Corbusier pour la construction de son logement. Appréhendant son style « bétonné », il se tourne finalement vers Alvar Aalto. Situé à Bazoches-sur-Guyonne, un terrain de 3 hectares légèrement en pente, en lisière de forêt, accueille la maison Louis Carré. La villa chaleureuse, de plain-pied, est le mélange parfait entre design, architecture et nature.
Mis à part la forme du toit, qui ne devait surtout pas être plat, l’architecte a carte blanche. Il dessine le garage, le portail d’entrée, la piscine et ses vestiaires et pense avec sa femme Aino Aalto, elle aussi architecte, le mobilier et le design intérieur. La patte du Finlandais est omniprésente, du choix des matériaux, simples et de qualité – de fines lattes de pin, des revêtements en chêne, du hêtre, du cuir, des briques… – à l’éclairage naturel. Il intègre à la décoration plusieurs de ses classiques, dont les assises ergonomiques en contreplaqué courbé Paimio, le tabouret E60, le fauteuil Model 400, le canapé Modèle 65…
En bonus : le Palais Finlandia, Finlande (1967-1971)
La salle de concert de 1750 places compte une salle de musique, un restaurant et, depuis 2012, le Filandia Café décoré avec les meubles originaux d’Alvar Aalto. Situé en plein cœur d’Helsinki, le Palais Finlandia, conçu en 1962 et construit entre 1967 et 1971, fleure bon les influences brutalistes. De l’extérieur, ses trois volumes irréguliers en marbre blanc dominent, contrastant avec le granit noir de l’intérieur.
Dès l’entrée, on retrouve les favoris du designer : le bois ondulé, plusieurs murs blancs stoppés à mi-hauteur, quelques colonnes à facettes… La série de suspensions en acier A110, aussi appelée Hand Grenade (1952) apportent des tons chauds. Dans le foyer central, en plus d’une moquette colorée, les tables noir et or, avec à leur côté, un cendrier sur pied, frappent par leur originalité.
À lire aussi : Les 10 designers scandinaves à connaître absolument