Dix ans avant de l’acquérir, Cécile Halley des Fontaines avait déjà eu un coup de cœur pour cet espace en feuilletant une revue de déco qui présentait l’œuvre de l’artiste peintre Claire Basler, l’ancienne propriétaire : « On voyait très peu de la maison, mais nous avions adoré sa façade sur jardin de guingois. Nous ne savions absolument pas où elle se trouvait. Nous avons cherché longtemps dans Paris, jusqu’au jour où un agent immobilier nous l’a présentée… » Architecte, fondatrice d’une agence d’identité globale, elle cherchait un espace qui puisse à la fois accueillir les collaborateurs de son agence et les six personnes qui composent sa famille. « En plus du volume, nous avons trouvé ici une lumière extraordinaire et un jardin magnifique, riche de plus de soixante variétés de rosiers anciens, plantés avec amour par l’ancienne propriétaire », ajoute-t-elle. Il a fallu transformer l’atelier d’artiste de 7 mètres de hauteur sous faîtage en véritable maison de famille, construire à l’intérieur du volume existant et recomposer l’espace. Par exemple, la cuisine ouverte sur un immense séjour a vu son plafond être abaissé afin d’y apporter plus d’intimité. « Ici, l’esprit industriel ne pouvait et ne devait pas être gommé, au risque de perdre l’âme du lieu. En même temps, l’existant était une construction industrielle pauvre, dépourvue de tout élément architectural de caractère en dehors de la charpente. Nous avons gardé des éléments comme la coursive, que nous avons divisée en deux et déplacée pour créer une circulation à l’étage. »
Au rez-de-chaussée, le vaste espace de vie de 180 m2 jouxte l’agence de Cécile : « C’est un endroit mixte. Pendant la journée, je reçois mes clients et organise des réunions sur la grande table. Le soir, nous nous retrouvons ici avec mon mari et nos quatre enfants. » Cécile a privilégié cet espace commun. Les cinq chambres à l’étage sont de taille plus modeste, de 8 à 15 m2 chacune. Cécile raconte : « Mon mari souhaitait se sentir dans une véritable maison de famille. J’ai donc introduit des matériaux de caractère qui auraient pu se trouver là depuis la construction du bâtiment : les portes anciennes et leurs serrures, par exemple, apportent beaucoup de cachet. Je les ai choisies avec de simples moulures, surtout pas ostentatoires pour qu’elles se fondent dans le lieu comme si elles avaient toujours existé. De même pour le carrelage que j’ai récupéré chez un brocanteur et qui aurait déjà pu faire partie de la maison… Ces matériaux ont apporté le charme et la chaleur qui manquaient lorsque nous avons récupéré l’usine vide. »
Monochromie évolutive
Côté coloris, Cécile a opté pour un camaïeu de gris qui changent de teinte au cours de la journée : « Je cherchais une couleur douce et enveloppante qui jouerait avec toutes les lumières du jour, parce qu’une couleur délimite l’espace », explique-t-elle. Le mobilier et le textile viennent animer cette monochromie. « Il n’est pas facile de meubler une telle pièce. Même un tapis XXL de 4 x 3 m paraît perdu ! Mais j’aime ce côté dépouillé. C’est reposant. Vivre dans 300 m2 décloisonnés change tout et donne une immense sensation de liberté de vie et de mouvement. Un peu comme si nous étions en vacances toute l’année. » Cette nouvelle adresse a également changé sa façon de travailler : « En arrivant ici, j’ai gagné un espace uniquement dédié à mon travail. Cela m’a permis de développer mon activité en proposant à de jeunes graphistes de me rejoindre. C’est aussi une manière de proposer une vitrine de mon univers », conclut-elle. Lumière, couleur, jardin sont ainsi devenus des sources d’inspiration quotidienne pour cette ancienne architecte passée par les Ateliers Jean Nouvel. L’espace qu’elle a créé dans cette ancienne chaudronnerie révèle un vrai sens de l’harmonie, celui d’une personnalité aussi rigoureuse qu’intuitive.