Ourlée par « la plus belle rade d’Europe », la ville s’est d’abord distinguée par l’art de la construction militaire. Ceinturée d’une armée de forts, elle s’est habituée à se terrer entre son plan d’eau fermé et l’impressionnant mont Faron qui la domine. Divisée entre l’amour de la mer et celui de la garrigue, entre l’armée et les civils, qu’elle ait eu des problèmes d’image n’étonnera personne ! Réservant leurs faveurs à la partie haute de la ville, qui offre des vues étourdissantes sur la rade, ou préférant le quartier balnéaire du Mourillon, ses habitants ont longtemps boudé le centre et son ensemble d’immeubles édifiés dans les années 50 en bordure du port. Avant que l’on ne réalise que cette Frontale du port, signée Jean de Mailly (avec un appartement-témoin de Charlotte Perriand), avait reçu, en 1951, le Grand Prix d’honneur à la Triennale de Milan, érigeant Toulon en laboratoire de la modernité. Au même titre que Le Havre, par Perret, ou Royan, par Ferret. C’est de cette modernité qu’est tombée amoureuse India Mahdavi lors de sa première escale toulonnaise. De ces bâtiments modernistes signés Pierre Pascalet, Georges Narkisian, Jean-Gérard Mattio, Alfred Henry ou Paul Luyton. Mais aussi d’un centre-ville préservé des assauts du béton, partagé entre grandeurs haussmanniennes (le baron fut préfet du Var) et ruelles provençales.
Le cœur ancien, surnommé « Chicago » à l’époque où son ambiance un peu crapuleuse attirait les marins, est devenu depuis une décennie l’objet de tous les efforts de la ville. Hubert Falco, maire de Toulon et président de l’agglomération, est habilement monté dans le train de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine initiée par Jean-Louis Borloo, prenant à bras le corps le cœur de sa cité. Une première levée de 58 millions d’euros a permis à la ville de s’offrir des îlots entiers, de leur redonner leur identité, et de lancer des appels à projets. Très central, ce quartier, typiquement provençal, longtemps étouffé au fil d’un urbanisme brouillon, cachait pourtant des pépites. Le soleil y entre à nouveau. Le quartier a retrouvé ses cours intérieures, ses places aérées, ses hôtels particuliers, à l’image de celui, datant du XVIe siècle, où seront présentés les projets des jeunes compétiteurs de la Design Parade Toulon (du 30 juin au 2 juillet).
Objectif créativité
Les autres expositions et pop-up stores, égrenés lors de ce week-end déco, vont inviter le visiteur à arpenter ce quartier redevenu centre de gravité de la cité, où boutiques, galeries, terrasses, bars et restaurants branchés ont vite fait d’investir les espaces libérés. Les perspectives dégagées y dessinent une logique nouvelle avec les autres pôles urbains. D’un côté, un creuset de l’université, de l’innovation et du numérique, autour du pôle Toulon Var Technologies, de l’autre, un projet monumental confié à l’architecte Corinne Vezzoni sur le site de l’ancien hôpital Chalucet, en passe de devenir, sur trois hectares, un « quartier de la créativité » autour de l’École supérieure d’art et de design. Toulon connaît son « effet Brooklyn ». Séduits par les microcrèches et les immeubles rénovés avec terrasses, les jeunes couples délaissent les quartiers bourgeois pour réinvestir le centre, où l’on croise désormais des têtes connues – la chorégraphe Régine Chopinot, le designer Patrick Jouffret, l’acteur Charles Berling, directeur du Théâtre Liberté, qui vient d’investir un appartement en plein cœur de la vieille ville… En croisant les regards sur ce nouveau visage, la Design Parade marque une ère nouvelle pour un Toulon en passe de réconcilier son histoire et son futur.
Y aller
En TGV, Toulon est à 3 h 45 de Paris. www.voyages-sncf.com
En avion, via l’aéroport de Toulon-Hyères. www.airfrance.fr
Informations sur www.toulontourisme.com et sur www.tpm-agglo.fr