Reykjavík : gastronomie et culture dans la capitale d’Islande

À la fois solaire et énigmatique, la capitale de l’Islande est une ville inclassable qui ne cesse de surprendre. Nourrie de légendes locales et du brassage des cultures avoisinantes, la cité la plus septentrionnale de la planète interroge aujourd’hui son histoire pour mieux bâtir son avenir.

À Reykjavík, près du cercle polaire arctique, le soleil d’automne peine à atteindre l’horizon. Les passants se font plus rares dans les rues, cloîtrés chez eux ou dans des bars animés jusqu’au petit matin. Une fois la nuit tombée et la chasse aux aurores boréales terminée, on se dit qu’il faudrait peut-être goûter la ville dans l’assiette, mais dans un pays où le requin fermenté tient lieu de gourmandise, la cuisine régionale pâtit de sa réputation.


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La capitale de l’Islande, sous ses airs de paradis isolé, élargit désormais son horizon à une destinée internationale.
La capitale de l’Islande, sous ses airs de paradis isolé, élargit désormais son horizon à une destinée internationale. Benedicte Drummond pour IDEAT

Reykjavík compte pourtant de nombreux lieux gastronomiques qui valent le détour, de la modeste cabane de pêcheurs Sægreifinn, où le poisson frais se déguste en brochettes assis sur des tonneaux, aux adresses étoilées, comme Óx ou Sümac. Parmi les derniers venus, l’hôtel chic et design Reykjavik Edition dispose d’un restaurant à la cuisine locale hors pair.

À quelques minutes de là, chez Yuzu – à la déco signée par le Studio HAF –, les burgers prennent un accent japonais des plus surprenants. Mais si certains établissements proposent aux voyageurs des menus en langue anglaise, des limites ont été posées aux velléités de l’oncle Sam: le roi du burger aux savates jaune et rouge et son confrère Dunkin’ Donuts ont ouvert, mais vite refermé leurs portes, faute de clients. Ici, tout se risque et se discute.

Projet de cœur d’un graphiste et de son compagnon, Mikado propose une sélection de parfums, de bougies, de pièces en céramique et d’objets de design des plus raffinés. Les esthétiques japonaises et scandinaves se mêlent ici à la perfection pour aider les clients à transformer leur intérieur en un havre de paix.
Projet de cœur d’un graphiste et de son compagnon, Mikado propose une sélection de parfums, de bougies, de pièces en céramique et d’objets de design des plus raffinés. Les esthétiques japonaises et scandinaves se mêlent ici à la perfection pour aider les clients à transformer leur intérieur en un havre de paix. Benedicte Drummond pour IDEAT

« Nous ne savons pas ce que nous ne pouvons pas faire… alors nous tentons tout! », plaisante Halla Helgadóttir, la directrice d’Iceland Design and Architecture, une agence qui milite pour des solutions durables. Dans les échoppes, on retrouve la même hésitation entre la préservation d’un héritage et l’envie d’extension à l’international.

Près du port, dans le fishpacking district (centre industriel de la pêche), les nombreuses boutiques de designers, comme Mikado ou Smids-Budin, prônent une esthétique locale, tandis que les multinationales de mode bon marché fleurissent aux alentours. Même l’imposante église luthérienne Hallgrímskirkja, dont le bâtiment reprend les colonnes de basalte typiques du pays, a longtemps fait débat.

Lovée dans une petite cabane en bois, Baka Baka, la première boulangerie du pays, propose désormais des tartines aux champignons et aux courgettes, ainsi que des œufs brouillés pour un déjeuner sur le pouce. Le soir, les verres à vin remplacent les miches de pain sur les étagères pour un apéro se prolongeant jusque tard dans la nuit.
Lovée dans une petite cabane en bois, Baka Baka, la première boulangerie du pays, propose désormais des tartines aux champignons et aux courgettes, ainsi que des œufs brouillés pour un déjeuner sur le pouce. Le soir, les verres à vin remplacent les miches de pain sur les étagères pour un apéro se prolongeant jusque tard dans la nuit. Benedicte Drummond pour IDEAT

Il aura fallu attendre presque cinquante ans entre la commande en 1937 à l’architecte d’État Guðjón Samúelsson (1887-1950) et la consécration de l’édifice en 1986. Les critiques trouvaient que le mélange des styles manquait de cohérence. Malgré les désaccords, l’église incarne aujourd’hui une cité en plein essor où la question de la sauvegarde de l’architecture est devenue pressante.

Dans la vieille ville, les nombreuses maisons aux façades colorées sont encore visibles, car elles ont plus de 100 ans et sont protégées par la loi, contrairement à des bâtisses plus récentes – même signées par des personnalités de renom – qui ont été détruites.

« La ville a poussé comme un champignon dans les années 20 et 30. Le gouvernement et les experts abordent enfin sérieusement l’idée de sa préservation », explique Halla Helgadóttir. Il ne s’agit plus de faire une hiérarchie chronologique, mais bien de se pencher sur la valeur culturelle d’un héritage dans son ensemble.


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Recyclage à grande échelle

Dans les rues de
Dans les rues de Benedicte Drummond pour IDEAT

Comme une mise à jour de la remarque de l’ancien Président français Valéry Giscard d’Estaing (1926-2020), en 1976, si l’Islande non plus n’a pas de pétrole, elle a eu une grande idée : s’en passer. Reykjavík produit la quasi-totalité de ses besoins en électricité grâce à l’activité géothermique et hydraulique de ses ressources naturelles et propose d’être entièrement libérée des énergies fossiles d’ici à 2050.

Les traditionnels bains publics et sources d’eau chaude se popularisent, comme l’atteste le Sky Lagoon, ouvert en 2021 dans le sud-ouest de la ville. Peut-être parce que la matière première est rare sur ces terres désertiques, les Reykjavikois sont passés maîtres dans l’art du développement durable.

La marque de design danoise a ouvert un showroom au cœur de la capitale islandaise, où se mêlent un fauteuil Hippo et des tables d’appoint en pierre, imaginés par Kristian Sofus Hansen – fondateur de Norr11 – et Tommy Hyldahl, et des vases Capsule III en verre, signés Argot. Sur les étagères, des vases anthropomorphes d’Anissa Kermiche réveillent l’intérieur 9 avec leurs touches de féminité sensuelle.
La marque de design danoise a ouvert un showroom au cœur de la capitale islandaise, où se mêlent un fauteuil Hippo et des tables d’appoint en pierre, imaginés par Kristian Sofus Hansen – fondateur de Norr11 – et Tommy Hyldahl, et des vases Capsule III en verre, signés Argot. Sur les étagères, des vases anthropomorphes d’Anissa Kermiche réveillent l’intérieur 9 avec leurs touches de féminité sensuelle. Benedicte Drummond pour IDEAT

L’artiste engagé Ólafur Elíasson, auteur de la façade de l’imposant centre philharmonique et palais des congrès Harpa, a installé un studio de recherche à Marshall House, dans une ancienne usine à poissons. Dans la rue Eyjarslóð, le Studio Plastplan propose une collection de mobilier urbain en plastique recyclé, tandis que les boutiques de seconde main sont nombreuses dans le centre-ville. Ici, la créativité n’est pas un effet de mode, mais un mode de survie.

Ainsi l’église Hallgrímskirkja est commissionnée pendant la dépression des années 30 et Harpa sort de terre alors que le pays est frappé de plein fouet par la crise financière de 2008. L’année suivante, le festival DesignMarch voit le jour, comme solution possible au cataclysme économique.

Situé en plein cœur de la ville, Ion City Hotel offre tout le confort moderne aux voyageurs qui cherchent un piedà-terre pour explorer facilement les alentours. Le lieu a concentré ses efforts sur des chambres au design efficace et un personnel chaleureux. Les repas se prennent à l’extérieur, comme dans la délicieuse boulangerie Sandholt, plus loin dans la rue.
Situé en plein cœur de la ville, Ion City Hotel offre tout le confort moderne aux voyageurs qui cherchent un piedà-terre pour explorer facilement les alentours. Le lieu a concentré ses efforts sur des chambres au design efficace et un personnel chaleureux. Les repas se prennent à l’extérieur, comme dans la délicieuse boulangerie Sandholt, plus loin dans la rue. Benedicte Drummond pour IDEAT

Reykjavík se pose aujourd’hui en symbole d’une nation à la croisée des chemins, qui se bat pour exister sur la scène internationale tout en protégeant son image de paradis isolé. La sculpture en acier poli The Sun Voyager, qui célèbre les 200 ans de la capitale, raconte l’histoire d’un peuple venu de Mongolie à bord d’un navire éternellement tourné vers le soleil couchant.

Après de nombreux débats, la sculpture de Jón Gunnar Árnason (1931-1989) est finalement installée sur un promontoire au bord de l’Océan… face au nord. Reste à savoir si ce compromis emblématique indique une fausse route ou simplement une nouvelle direction.


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