« The Fabelmans » dévoile les maisons d’enfance de Steven Spielberg

En salle le 22 février, le film invite les spectateurs à entrer dans l'intimité du réalisateur en relatant les origines de son amour pour le cinéma, des années 50 aux années 60. L'occasion de découvrir les lieux où il a grandi … et la pièce de design iconique qui a bercé son quotidien.

Directement inspiré de ses souvenirs, le scénario très autobiographique de The Fabelmans décrypte la vocation cinématographique de Steven Spielberg. Servant directement l’intrigue, les trois maisons d’enfance du réalisateur y sont reconstituées de manière fidèle ou figurée par Rick Carter, son chef décorateur attitré depuis 30 ans.



Après 50 ans de carrière et l’une des filmographies les plus extraordinaires qu’Hollywood ait jamais compté, l’inventeur des blockbusters doublement oscarisé (La Liste de Schindler, Il faut sauver le soldat Ryan) lève enfin le voile sur les origines de son amour pour le cinéma. Depuis ses premiers émois cinéphiles à l’âge de six ans jusqu’à la fin de son adolescence — caméra Super 8 greffée dans la main — The Fabelmans explore les madeleines qui ont nourri la carrière de Steven Spielberg mais aussi les traumatismes qui l’ont conduit à fantasmer la réalité. Sous l’avatar de Sammy Fabelman, le réalisateur évoque ainsi la trajectoire de sa famille entre les années 50 et 60 jusqu’au divorce de ses parents dont le couple ne résistera pas à un douloureux secret.

Michelle Williams dans le film The Fabelmans par Steven Spielberg aux décors inspirants - IDEAT 2023

Pour donner corps à ses souvenirs, Spielberg s’est de nouveau tourné vers le chef-décorateur Rick Carter, son collaborateur sur 11 films en une trentaine d’années. De la même génération, les deux hommes se sont livrés à un énorme travail d’introspection pour se replonger dans les codes de l’époque sans pour autant chercher à coller absolument à la réalité historique. « Les lieux devaient plutôt correspondre aux réminiscences émotionnelles actuelles de Steven, explique Rick Carter. Car ce que le film explore merveilleusement, c’est justement ce décalage entre nos souvenirs et la résonnance du passé, quand on devient adulte et qu’on s’y penche à nouveau ».

Des demeures cinégéniques

Abordant The Fabelmans comme un road-movie en trois actes, Carter articule principalement son travail autour des trois maisons qui vont égrainer le parcours de la famille jusqu’en Californie. Recréées en studio (à Santa Clarita) à partir de photos et de plans dessinés de mémoire par Spielberg, chacune est fabriquée dans une taille légèrement supérieure à la réalité pour faciliter les mouvements de caméra tout en assurant la sécurité sur un tournage réalisé en pleine pandémie.


Située dans le New Jersey, la première demeure des Fabelman correspond à la petite enfance de Sammy/Steven. Pleine de coins et de recoins, elle illustre l’exploration permanente à laquelle se livre le jeune garçon pour qui tout est prétexte à s’essayer au cinéma. Le garage se transforme en plateau de tournage, un petit placard devient une salle de projection tandis que le mobilier très simple datant des années 40 permet d’évoquer subtilement la présence des grands-parents.

«Toute la famille Spielberg se souvenait d’une magnifique table de Saarinen dans leur cuisine. Une pièce qui exprime bien l’optimisme de la fin des années 50 et qu’on voulait d’une exactitude absolue car elle correspond à un souvenir très fort pour eux. C’est autour d’elle qu’ils se retrouvaient pour les dîners en famille, les devoirs du soir et les conversations».

Bien plus fidèle à la réalité, la seconde maison de Phoenix (Arizona) exprime les influences culturelles et les ambitions d’une famille poussée vers l’ouest du pays. Composée de meubles et d’objets précis issus du passé des Spielberg (comme un portrait du compositeur Brahms ou de la vaisselle en porcelaine bleue), elle illustre l’essor professionnel du père (informaticien) de Steven. « L’ambiance est plus futuriste et davantage ancrée dans les années 50 » note la décoratrice de plateau Karen O’Hara avant d’insister sur un choix particulier : « Toute la famille Spielberg se souvenait d’une magnifique table de Saarinen dans leur cuisine. Une pièce qui exprime bien l’optimisme de la fin des années 50 et qu’on voulait d’une exactitude absolue car elle correspond à un souvenir très fort pour eux. C’est autour d’elle qu’ils se retrouvaient pour les dîners en famille, les devoirs du soir et les conversations ».

Production de la table Saarinen, une pièce design culte présente dans le film The Fabelmans
Production de la table Saarinen, une pièce design culte présente dans le film The Fabelmans Knoll

D’un style Craftsman typique du nord de la Californie, la troisième propriété des Fabelman ne repose en revanche sur aucun réel souvenir d’enfance du cinéaste mais uniquement sur son ressenti. Sombre et rudimentaire, sa décoration évoque surtout le climat maussade qui règne alors dans la famille. Avec des cartons de déménagement qui trainent pour suggérer son intégration difficile.

Les reflets d’une époque

Sammy Fabelman en pleine discussion avec son grand-oncle dans la chambre de sa maison d'enfance, extrait du film The Fabelmans - IDEAT

Incarnant des étapes importantes de l’enfance de Spielberg, chaque maison est à l’image de ce qu’elle a pu représenter dans la vie du réalisateur. Matérialisant tour à tour l’émerveillement, la découverte et les difficultés de l’entrée dans l’âge adulte, ces décors fantasmés portent le sceau d’une vie d’artiste en devenir et révèlent comment l’homme a construit sa légende. « La plupart de mes films sont inspirés de ma vie, reconnaît-il volontiers. Mais The Fabelmans a ravivé ma mémoire au point de la voir se dérouler devant moi ».

À fleur de peau pendant tout le tournage, Steven Spielberg signe ici un film testimonial, mais certainement pas un testament. D’ailleurs le réalisateur préparerait en ce moment sa propre version de Bullitt, avec Bradley Cooper en digne successeur de Steve McQueen.

> The Fabelmans, par Steven Spielberg, en salles le 22 février.

Icône des années 50

Conçue en 1957 par Eero Saarinen pour Knoll, la collection de tables Pedestal complète la série de sièges Tulip (lancés un an plus tôt) dont elle reprend le même système de pied central. Déclinées dans différents diamètres, hauteurs et finitions, leur design repose sur idée toute simple : réduire l’accumulation de pieds qui encombrent habituellement les salles à manger.