Entre l’Ouzbékistan et Studio KO s’est nouée une histoire singulière. Alors que Karl Fournier et Olivier Marty mènent plusieurs projets dans ce pays situé au cœur de l’Asie Centrale, le tandem s’est vu confier la réalisation du pavillon ouzbek à la Biennale d’architecture de Venise.
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Karl Fournier et Olivier Marty ont créé Studio KO en 2000 à Paris. Ils débutent leur carrière avec des projets essentiellement résidentiels, des maisons et des villas en France et au Maroc, des appartements à New York et à Hong Kong. Ils signent également la boutique Aesop à Londres en 2013 celle d’AMI à Paris en 2015 et quelques restaurants.
Le point commun entre toutes ces réalisations ? Un attachement viscéral au contexte, la nécessité de ne négliger aucune échelle à travers une approche globale. Mais c’est 2017 que leur histoire prend un véritable tournant avec la réalisation du Musée Yves Saint-Laurent A Marrakech qui place le studio sous le feu des projecteurs médiatiques. Pas de gesticulation architecturale avait indiqué Pierre Bergé, le commanditaire, en guise de brief.
A Marrakech, ils ont su allier tradition et modernité, une approche qu’illustre la façade en briques de terre cuite travaillée à la manière d’un tissu, telle une dentelle.
Depuis, Studio KO multiplie les projets, toujours animé par la volonté de valoriser les savoir-faire locaux et les matières expressives. Si le duo est basé à Paris et à Marrakech, il entretient une relation particulière avec l’Ouzbékistan, et plus particulièrement Tachkent, la capitale, où ils mènent plusieurs projets dont le futur Centre d’art contemporain.
Mal connu en Europe, l’Ouzbékistan, est le pays le plus peuplé d’Asie Centrale, avec quelques 35 millions d’habitants. Remarquable, le patrimoine architectural a inspiré Studio KO, convié par la Art and Culture Development Foundation de la République d’Ouzbékistan (ACDF) à réaliser le pavillon ouzbek de la 18ème Biennale d’architecture de Venise.
Archaism vs. Modernity
Jusqu’au 26 novembre, Venise accueille sa biennale d’architecture 2023 dont la commissaire invitée est Lesley Lokko. « Le laboratoire du futur », c’est le thème général retenu par l’architecte ghanéenne et écossaise, thème auquel Karl Fournier et Olivier Marty ont été invités à répondre. « Notre proposition se lit comme une rencontre d’horizons différents, permettant de porter un regard croisé sur patrimoine architectural ouzbek, pour se plonger dans son passé afin de trouver les outils nécessaires à l’élaboration du monde de demain. Déconstruire ensemble la modernité, en questionnant la notion d’archaïsme, résume Studio KO. Notre participation est avant tout collaborative, plaçant l’humain au centre de notre démarche ».
Dans le pavillon ouzbèque situé dans les murs de l’Arsenale, « Unbuild : Archaism vs. Modernity » est un projet collaboratif né de la visite des ruines des qalas, anciennes forteresses du Karakalpakstan, héritage de la civilisation Khorezm. Au cœur de la proposition, la brique. Un matériau universel, constitutif de l’architecture ouzbèque mais également cher à Studio KO.
Pour réaliser ce pavillon, le tandem a travaillé avec 20 étudiants de l’université Ajou de Tachkent mais également avec le maître céramiste ouzbek Abdulvahid Bukhoriy grâce à qui cet art ancestral a su perdurer.
Entre passé et futur
Plongés dans la pénombre, les visiteurs empruntent un labyrinthe énigmatique, fait de briques vénitiennes issues du réemploi et des briques vernissées fabriquées avec les étudiants en Ouzbékistan. Elles s’entremêlent harmonieusement dans une écriture architecturale et une mise en œuvre artisanale, tutoyant volontairement l’inachevé.
Plus qu’une simple exposition, c’est une expérience immersive et émotionnelle que Studio KO a souhaité partager avec les visiteurs de la biennale. Le corps y est sollicité à travers la matière, l’absence de lumière et l’atmosphère singulière.
Le parcours dans le labyrinthe s’achève par la projection d’un film d’El Mehdi Azzam qui a documenté les workshops et le travail d’Abdulvahid Bukhoriy, restitués sous une forme poétique qui permet aux visiteurs de remettre en perspective la proposition spatiale des architectes. Un pavillon enthousiasmant qui croise les disciplines et les regards, illustrant la vertu première de l’architecture selon Studio KO : sa capacité à émouvoir.