Les coups de cœur architecturaux de Laurence Calafat, fondatrice de Cinqpoints

Architecte de formation, Laurence Calafat a fondé Cinqpoints, une maison d’édition d’objets, jeux et papeterie en lien avec l’architecture. Pour IDEAT, elle livre ses coups de cœur… et ses coups de griffe.

Le plus beau bâtiment contemporain du monde ?
La villa Malaparte, d’Adalberto Libera, est une icône absolue.

Le plus émouvant ?
À Berlin, le Mémorial aux Juifs assassinés d’Europe (2005) conçu par Peter Eisenman est très impressionnant.

Le plus beau bâtiment historique ?
Les lieux de culte dans leur ensemble, toutes échelles et religions confondues, sont souvent des sites chargés qui me marquent. Parmi eux, je citerais la chapelle Notre-Dame-du-Haut à Ronchamp (1955) de Le Corbusier, qui m’a fait très forte impression.

Celui qui a le mieux fixé une époque ?
La Glass House de Philip Johnson (construite en 1949 à New Canaan, aux États-Unis, NDLR), pour la radicalité et la modernité de l’écriture.

Celui qui symbolise le mieux le XXe siècle ?
Le Seagram Building de Ludwig Mies van der Rohe à New York (achevé en 1958), pour sa justesse et son élégance.

Le plus bel hôtel ?
Le Santa Maria do Bouro. Il s’agit d’un couvent près de Braga (Portugal) réhabilité en pousada par Eduardo Souto de Moura. Le lieu est sublime et très juste.

Le plus bel aéroport ?
Le terminal TWA de l’aéroport JFK à New York construit par Eero Saarinen dans les années 50, aujourd’hui désaffecté.

La ville la plus intéressante en termes de recherche ?
Brasilia, sans aucun doute !

Le quartier dont l’architecture vous intéresse ?
Il y a toujours un intérêt particulier provoqué par les bâtiments qui s’érigent là où on ne les attend pas. Je pense aux Choux, à Créteil (de Gérard Grandval, 1974), ou encore aux tours Nuages, à Nanterre (d’Émile Aillaud, 1977).

La ville « historique » dont l’architecture vous fascine ?
Venise, d’un point de vue architectural mais aussi urbanistique.

Votre architecte « historique » favori ?
Carlo Scarpa, pour son sens du détail.

Le ou les contemporains les plus passionnants ?
Jacques Herzog et Pierre de Meuron, pour leur démarche de recherche permanente.

Le mouvement ou style architectural qui vous intéresse ?
Plus une démarche qu’un mouvement, celle du collectif bruxellois Rotor est à la fois pertinente, novatrice et tellement contemporaine. (Rotor s’intéresse, entre autres, aux flux des matériaux : ressources, déchets et réemploi.)

Le style le plus pertinent ?
Ce n’est jamais vraiment le style ou l’écriture architecturale qui fait l’intérêt d’un lieu, mais la pertinence de la réponse apportée par l’architecte aux contraintes imposées par le contexte, le programme… Parfois les réponses sonnent juste, et c’est une réussite totale, parfois elles sonnent faux, et c’est un désastre.

Quelles sont les pistes intéressantes à explorer ?
La mobilité reste un domaine à approfondir. La Maison des Jours Meilleurs, réalisée par Jean Prouvé, en 1956, à la demande de l’abbé Pierre, est un modèle d’intelligence spatiale, constructive et économique. Il en va de même pour l’ensemble des maisons démontables (6×6 en 1944, 8×8 en 1945…) qu’il a développées à la même période. La situation des migrants soulève bien entendu des questions politiques et humaines mais également architecturales. La question de loger décemment des familles n’aurait sans doute pas laissé Jean Prouvé inactif. En France, nous avons la chance d’avoir une jeune génération d’architectes brillants qui ont des réponses à apporter.

Un beau livre sur l’architecture ?
J’en citerai deux : Lettre à un jeune architecte, de Fernand Pouillon, et Un amour sans limite, d’Eugène Freyssinet.

Pourriez-vous décrire votre maison ?
Il s’agit d’une maison existante, en cours de ­réhabilitation, dont la description la plus juste pourrait être celle d’un chantier permanent…

À quelle discipline pourrait-on comparer l’architecture ?
À aucune autre. Elle répond à des besoins fondamentaux. C’est la mère de tous les autres arts.

Avec quel mot doit-elle rimer ?
Avec culture, évidemment…