Lors de cette deuxième édition du prix de la Monnaie de Paris, dont le but est de transfigurer la médaille, le jury a salué la dimension sensorielle impulsée par le designer Pierre Charrié.
A lire aussi : A voir : l’exposition Monnaies et merveilles à la Monnaie de Paris
« Le 17 novembre, le musée de la Monnaie de Paris dévoilera la façon peu conventionnelle dont il a pensé la médaille en objet artistique et de design. En baptisant ce projet Le Monde renversé, Pierre Charrié a imaginé un miroir dont l’effet vacillant et le reflet inversé viennent troubler notre perception. Il a aussi permis à nos ateliers de se surpasser par ce challenge technique qu’a été l’importante matrice afin que l’objet fini tienne debout sur sa tranche », s’enthousiasme Catherine Monlouis-Félicité, directrice du développement culturel à la Monnaie de Paris et à l’initiative de l’événement.
Pour obtenir l’intrigant effet de basculement, les ateliers ont utilisé du cuivre frappé, plaqué de palladium et poli à l’extrême avec un côté légèrement courbe. Sur cette face a été gravé « Le vrai est-il un moment du faux ? », référence à une thèse de Guy Debord*, une inversion du propos de Hegel dans la Phénoménologie de l’esprit : « Le faux est un moment du vrai. »
Une introduction à différents niveaux de lecture, dont notre rapport aux fake news. Le revers (côté pile) réserve aussi une surprise : les fonds marins de l’océan Pacifique en bas-reliefs, vus du ciel, d’après des images empruntées à la NASA.
« Le monde renversé réside dans l’idée du retournement et dans la capacité à voir au travers des choses. Je me suis inspiré de gravures du XVIe siècle qui décrivent des nuages sur la Terre et des maisons flottant dans le ciel », détaille le designer.
Pierre Charrié ajoute : « La médaille n’a plus de fonction étatique ni de rôle de propagande. Aussi à quelle autre fonction cet objet se prête-t-il à partir de sa forme métallique un peu cylindrique ? J’ai pensé au miroir à main en bronze de l’Antiquité. »
Simple seulement en apparence, la pièce d’orfèvrerie de 10 cm de diamètre devient un doudou narcissique de poche que Pierre Charrié a imaginé sous la forme d’un amusant « culbuto » pour en faire bouger le reflet : « La tranche de l’objet a été finement striée à l’atelier de frappe : ce savoir-faire du moletage est ultra-précis et il existait il y a des siècles, ce qui m’a beaucoup impressionné ! » Une réaction de surprise très communicative.