Paris a sa boule de feu : la vasque de Paris 2024 s’installe dans la légende

On l’avait laissée flotter au-dessus de Paris, comme une apparition. Un an plus tard, elle revient : la vasque olympique de Mathieu Lehanneur illuminera de nouveau le ciel parisien, chaque été jusqu’en 2028. Ni monument, ni gadget, cette création ovni entre design, émotion collective et rêve technologique est désormais un objet rituel.

La vasque Olympique dessinée par Mathieu Lehanneur pour les jeux de Paris 2024 illuminera de nouveau le ciel parisien du 21 juin au 14 septembre 2025. Ce retour, imprévu et compliqué, s’est révélé finalement irrésistible, porté par un élan populaire sans précédent.


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Un retour exceptionnel validé par le CIO (et toute la République)

Un an après, la vasque des jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 revient. Auréolé de son succès planétaire, le ballon volant conçu par Mathieu Lehanneur a fait fi de tous les obstacles et mobilisé dans un même élan rien moins que le président de la République, la Maire de Paris, la préfecture d’Île de France et le Musée du Louvre, dont dépend le Jardin des Tuileries. Toutes ces institutions ont travaillé de concert pour rallumer la flamme.

Un an après, la vasque des jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 revient.
Un an après, la vasque des jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 revient. Felipe Ribon

Fait exceptionnel, le Comité International Olympique (CIO) a donné l’autorisation de son retour, alors qu’il est de tradition qu’elle reste éteinte pour quatre ans à la fin de la parenthèse olympique. Considérée désormais comme « un héritage » des jeux olympiques de Paris 2024, la vasque brillera chaque été du 21 Juin, jour de la fête de la musique, au 14 septembre, date de la nouvelle Fête nationale du sport. Ceci pour trois étés, jusqu’aux jeux de Los Angeles, en 2028.

On ne sait plus comment appeler ce monument insaisissable comme le vent. La Mairie de Paris a simplement annoncé : « Elle est de retour ! » La romancière Sophie Fontanel l’appelle La Boule, ou l’Astre. Dans le livre qu’elle lui a consacré (Couver un astre, éditions Seghers), elle traduit sa rondeur comme l’image parfaite de la non-violence, une bulle d’air silencieuse dont les proportions sont régies par le nombre d’or et suscite l’amour.

Mathieu Lehanneur se refuse à nommer sa création dont il ne se sent pas propriétaire. « En lui donnant un nom, je risque de l’enfermer, dit-il. Le succès de cette « chose-là » c’est qu’elle a fonctionné comme un support sur lequel les gens ont projeté des impressions différentes. Pour certains, la philosophie du Petit Prince de Saint-Exupéry, pour d’autres, une connexion à des êtres qu’ils avaient perdu. Les gens m’ont parlé d’eux-mêmes, personne de son design.» Un comble.

L’émotion comme objectif ultime

Ou peut-être sa plus belle réussite. « En même temps, reprend Mathieu Lehanneur, c’est un objet super dessiné. A chaque petite rondelle, on s’est posé la question du diamètre. J’ai demandé aux ingénieurs que l’on se situe entre la précision horlogère et l’aérospatiale. Puis nous avons réglé les curseurs : il fallait parler d’histoire mais pas de nostalgie, de liberté sans poésie gnan-gnan. Cet objet a été conçu de façon très précise, mais l’objectif n’était pas qu’il soit une démonstration, sinon il ne serait pas devenu un support d’émotion. On a travaillé jusqu’à ce qu’il soit une évidence et qu’il ne reste plus que les poils qui se dressent.»

Considérée comme « un héritage » des jeux olympiques de Paris 2024, la vasque brillera chaque été jusqu’en 2028.
Considérée comme « un héritage » des jeux olympiques de Paris 2024, la vasque brillera chaque été jusqu’en 2028. Felipe Ribon

Avec le recul, quelles leçons tire-t-il de cette aventure ? «  D’abord, qu’un bon projet n’existe pas sans la vision éclairée d’un commanditaire. On m’a déjà demandé de créer quelque chose qui ait autant de succès que l’Iphone. Je réponds : soyez d’abord Steve Jobs. La vasque était un projet très risqué à bien des égards, il y avait mille raisons pour ne pas le faire. Mais grâce à Tony Estanguet, nous avons tenu l’exigence et l’ambition jusqu’à la fin. Ensuite, il y a ce mystère qui fait qu’une chose, faite de boulons, de gaz et d’une peau en toile, gagne une fois assemblée un pouvoir d’émotion si puissant. J’ai toujours été jaloux des musiciens ou des écrivains qui savent nous prendre par surprise et nous transporter. Pour les designers, qui sont dans la matière, c’est très difficile. Nous ne faisons que des choses. Là, j’ai bénéficié d’un beau terrain de jeu et j’ai eu la preuve que c’était possible. Mais je ne dis pas qu’on y arrive à chaque fois. »

La dream team complète a repris du service. EDF, pour la flamme 100% électrique constituée de vapeur d’eau éclairée par des LED, Aérophile, concepteur du ballon captif, Atelier Blam pour le socle en aluminium, Belle environnement pour la gestion de l’eau… Mais la vasque de Paris 2024 avait été démontée et recyclée, y compris les 6200 mètres cubes d’Hélium qui la faisaient s’élever.

« Celle-là était un prototype. Par chance, tout a fonctionné parfaitement. Cette fois, il a fallu la concevoir pour durer trois fois trois mois. La structure de l’anneau avait été conservée, mais tout ce qui se trouve dedans a été optimisé. Le ballon est nouveau, il avait été décousu. » Comme l’aspect général, la couleur de la flamme sera rigoureusement la même. La magie opèrera-t-elle encore au coucher du soleil ? Nul ne le sait et Mathieu Lehanneur n’opère aucun diagnostique. Lui qui jugeait qu’« un bon souvenir vaut mieux qu’une vieille relique » salue la formule d’un retour saisonnier. «  Je ne pouvais pas rêver mieux. »   


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