Le salon Maison et Objet 2024 était placé sous le thème « Tech Eden ». IDEAT a parcouru ses allées et livre son compte-rendu.
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30 ans de Maison et Objet
30 ans que Maison et Objet est la référence en matière de décoration. 30 ans qu’on y déniche les dernières tendances et les marques qui montent. Désireux de se tourner vers l’avenir au lieu de regarder dans le rétro, le salon proposait pour cette édition anniversaire, en collaboration avec l’agence de conseil en tendances Peclers Paris, le thème Tech Eden, qui promet une réconciliation entre technologie et nature, clé d’un meilleur futur.
« Ce thème résume à lui seul les enjeux actuel dans le secteur du design, en termes de durabilité, de préservation de la planète et des ressources et de l’irruption de nouvelles technologies dans la vie des créatifs et artisans, que ce soit l’IA ou l’impression 3D, rappelle Franck Millot, directeur des évènements spéciaux et des partenariats de Maison et Objet. Cette envie d’harmonie, de vivre d’amour avec la nature s’intègre dans l’habitat via des couleurs, des formes organiques et un besoin d’une présence végétale dans le quotidien. La vie urbaine et le digital, de plus en plus présent, nous déconnectent du réel, d’où ce désir de se rééquilibrer par la présence concrète de la nature dans notre environnement. »
Le projet Outonomy de Mathieu Lehanneur pour Maison et Objet 2024
« Il y a 30 ans, à la création de Maison et Objet, je démarrais mes études de design, raconte Mathieu Lehanneur. Je n’avais encore jamais rien créé mais le salon était un objectif, que dis-je… un Graal ! » À 49 ans, le designer de l’année 2024 a semble-t-il réalisé ses plus grandes ambitions. Mettant à profit la carte blanche qui lui est consacrée sur le salon à l’occasion de cette nomination, Mathieu Lehanneur a réfléchi à un abri en tuiles de bois auto-suffisant. « Peut-on imaginer s’inventer une vie différente, une fuite, loin de tout ? » s’interroge-t-il. Il imagine un prototype d’habitat d’un jaune soleil qui donne la pêche, doté à l’intérieur d’une verrière et d’un coin dinette et couchette et, à l’extérieur, d’une mini mare, de ses poissons, d’un jardin aquaponique et même d’un espace sportif. Une bulle hors du temps.
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Les Rising Talent Awards de Maison et Objet 2024
« Haute technologie et savoir-faire« : voici les deux mots fil rouge de cette édition des Rising Talent Awards. D’un côté, les talents émergents qui élargissent le champs des possibles grâce aux nouvelles technologies. De l’autres, ceux qui repoussent les limites du travail de la main.
Audrey Large, née à Bordeaux en 1994, recevait déjà en 2020 le Dutch Design Awards. Représentée par la prestigieuse galerie Nilufar à Milan, la Bordelaise pense des objets fantaisistes inspirés de l’imaginaire du cinéma, qu’elle manipule sur ordinateur avant de les imprimer en 3D. « La sculpture en 3D me donner une liberté de formes infinie, avec une complexité de détails inouïe, confie la jeune femme. Je fais tout dans mon studio, c’est une activité de geek. J’apprends en ligne en me branchant sur les communautés et les logiciels en open source. Contrairement à l’artisanat, enseigné par des maîtres, cet apprentissage est très horizontal et participatif, avec une liberté totale. On cherche seul. »
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Quant à Felix Rasehorn et Robin Hoske, passés par la Weißensee Art Academy de Berlin avant de fonder leur studio, Wint Design Lab, ils ont, en collaboration avec le laboratoire d’innovation Space 10, utilisé la technologie des NFT pour renforcer le sentiment d’attachement qui nous lie à nos objets. L’idée ? La chaise physique est doublée à son achat par sa version virtuelle qui, tel un arbre (ou un Tamagochi!), grandit au fil du temps et réclame de l’attention IRL (le remplacement d’une pièce endommagée, par exemple). Le duo présentait également sur le salon un robot qui réalise des pliages de papier en série et un biotextile innovant : « La matière est un collagène naturel, présent dans le tissu intestinal des vaches. Notre projet vise à reproduire ce tissu grâce à la biotechnologie. Le collagène est déjà utilisé dans l’industrie alimentaire et pharmaceutique. Ses propriétés sont sous-explorées dans le domaine de l’habillement et du mobilier. »
De l’autre côté du miroir, retenons Aurélie Hoegy, qui sculpte à la main, dans son studio, du mobilier d’art qui semble en mouvement en tiges de rotin : « Je suis allée dans son milieu naturel et sauvage, en Indonésie, où je me suis installée durant un mois dans un atelier artisanal traditionnel, raconte-t-elle. Il y a là-bas des lianes de rotin d’une longueur incroyable. J’ai été fascinée par la gestuelle des artisans : ils travaillent avec leur corps tout entier et même avec leurs pieds. Ils dansent avec la fibre. »
Quoi de nouveau dans la déco ?
Comme toujours, l’espace What’s New à Maison et Objet 2024 imaginé par Elizabeth Leriche est une réussite, une immersion dans ce qui fera l’esthétique de demain. Objets déco façon coraux, papiers-peints miroitant comme des cours d’eau, art de la table aux motifs feuillus, guéridons en pierre brute, assises terracotta…
Le thème Tech Eden de cette édition a inspiré à la chasseuse de tendances « Nouveaux mondes », une installation divisée en trois parties, soit trois écosystèmes imprégnés d’une nature futuriste : Meta Vegetal, une jungle luxuriante et fantaisiste, Deep Sea, sorti des profondeurs abyssales et Mineral Desert aux couleurs chaudes et à l’ambiance paisible, invitant au silence.
M&O Factory : zoom sur le design de collection
Dans le Hall 7, l’oeil averti repérait de loin un nouveau venu, la M&O Factory, soit le meilleur du collectible design d’aujourd’hui repéré en septembre dernier à la Paris Design Week Factory. Beaucoup de Français parmi les créateurs sélectionnés, dont Raphaël Pontais et son pouf joufflu en métal et tissu, Alexandre Labruyère et sa chaise Pétiole, l’Atelier Semino et leurs assises boudins très seventies et James Haywood et ses lampes-sculptures fabriquées dans un béton alternatif à base de laitier de haut-fourneau – un sous-produit de l’industrie sidérurgique – et de débris récupérés sur des chantiers.
Baccarat en immersion
Célébrant à la fois les 30 ans du salon et leur 260e anniversaire, la cristallerie Baccarat, située dans la commune du même nom, a fait rêver les visiteurs qui se pressaient à l’entrée de leur stand rouge sang. Dans cette boite géante était projeté de manière kaléidoscopique le film Alchimie, l’expérience immersive, une plongée dans les secrets de cette manufacture où le chaud et le froid s’affrontent pour confectionner des objets d’une rare finesse.
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