« Tout architecte sérieux se doit d’avoir un sens des responsabilités. C’est la moindre des choses si l’on considère la quantité de ressources que l’on puise dans la société et dans l’environnement pour concevoir nos projets. » La sagesse de Liu Jiakun vient d’être récompensée par le Pritzker Prize 2025, la plus prestigieuse des récompenses de sa discipline. Ils sont en effet rares les architectes à assumer le caractère délétère de ce secteur de la construction, l’un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre.
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Le bon sens récompensé
À 69 ans, le Chinois remporte donc ce prix surnommé « Nobel de l’architecture ». Une fois n’est pas coutume, le jury n’a pas jugé nécessaire de couronner une femme et de combler son grand retard en matière de parité. Il corrige en revanche le déficit de notoriété du talentueux Liu Jiakun qui a uniquement construit en Chine, sans jamais rêver d’Occident.

Toujours ancrées dans les cultures locales, ses réalisations défendent une approche pragmatique et responsable, « libérées de toute contrainte stylistique ou esthétique », selon le jury.
L’identité des lieux où il intervient figure au cœur de ses préoccupations dans un pays où l’urbanisation débridée a entraîné des pertes inestimables pour le patrimoine. « J’aspire toujours à être comme l’eau, à pénétrer un lieu sans y apporter une forme fixe, à m’infiltrer dans l’environnement local et dans le site lui-même », explique celui qui s’attache à valoriser ce qui préexiste plutôt qu’à faire geste.

Parmi ses principaux projets, l’incroyable West Village, à Chengdu, célèbre le vivre-ensemble dans un vaste complexe (135552 m²) mêlant logements, commerces, théâtre et bibliothèque organisés autour d’un important parc paysager et sportif.
Livrée en 2015, cette réalisation convoque une forme atypique, horizontale au milieu des tours, encourageant les interactions entre les usagers par une multitude de petits cheminements palliant l’immensité de l’endroit.

La sagesse de Liu Jiakun s’exprime également par l’absence de fascination qu’il montre envers la technologie. Il privilégie ainsi l’artisanat, les ressources disponibles localement et la simplicité. En témoigne le Musée de la brique impériale, réalisé en 2016 à Suzhou et qui réinterprète le langage traditionnel et célèbre un matériau ancestral.
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