Vieillot, le verre soufflé souffre à tort d’une réputation peu flatteuse. Pourtant, la jeune garde du design se saisit de ce matériau et de cette pratique pour le faire pleinement entrer dans le XXIe siècle. Pamela Sabroso, créatrice américaine, est de cette équipe.
Des luminaires aux inspirations botaniques, aux coloris vifs et aux allures joyeuses et organiques. C’est ce qu’a présenté l’artiste verrière Pamela Sabroso lors de Design Miami 2022. Avec «Luminous Wallflowers», la créatrice, qui revendique son statut à mi-chemin entre design et artiste, nous invite à savourer la douce lueur d’un néon, plongeant au coeur d’une fleur en verre soufflé, habillée d’un rose mate et pastel, soutenue par une tige de verre strié.
«J’ai lu quelque part que les fleurs sont des blagues de la nature et c’est vrai !» s’exclame Pamela Sabroso. « Les fleurs apportent un sourire sur mon visage, quelle que soit la tristesse du monde. Une arme nucléaire pourrait détruire l’humanité en quelques secondes. Au milieu de cette situation extrêmement surréaliste qui menace notre existence, je suis réconfortée par la chaleur constante du soleil. Ce même soleil, impressionnant, qui brillait pour nos ancêtres, qui vivaient en harmonie avec la nature. Mes fleurs sont le reflet de ma tentative de cultiver une existence harmonieuse similaire, à travers l’immobilité et la contemplation, une interprétation fantaisiste de fleurs poussant vers la lumière. Elles rappellent aussi au public de ralentir et de prendre le temps de sentir leur parfum.»
Installée à Brooklyn, l’Américaine évoque ses premiers contacts avec les arts et les arts décoratifs : « Quand j’étais enfant, j’étais inspirée par les travaux de broderies de ma mère, et aimais dessiner des filles dans des tenues à la mode. Des décennies plus tard, ce n’est qu’au lycée que j’ai commencé à m’intéresser à autre chose qu’au dessin, où mon professeur d’art au secondaire m’a encouragée à poursuivre une carrière d’artiste, puisque je m’intéressais au travail de l’argile.» Alors qu’elle va étudier la céramique à la Virginia Commonwealth University en 2001, elle s’inscrit à un cours de soufflage de verre débutant. « Et j’ai été captivée! J’ai consacré des heures et des heures à apprendre à travailler cette matière.» Depuis, la jeune femme n’a qu’un but, « exprimer la joie et le plaisir que j’éprouve à travailler la matière et mettre en valeur sa beauté et sa fluidité. Je travaille également avec le néon pour créer un éclairage dramatique ou romantique. Le néon et le verre forment un duo parfait.»
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En 2008, elle déménage à New York pour travailler comme technicienne de studio chez Urban Glass. « Travailler chez Urban m’a apporté de nombreuses opportunités qui ont enrichi ma pratique artistique comme collaborer avec d’autres artistes et donner des cours en plus d’être étudiant.» Haut lieu de la création verrière contemporaine créé en 1977, Urban Glass a été fondé par trois diplômés en école d’art qui souhaitaient poursuivre leurs expérimentations.
Par la suite, l’organisation à but non lucratif a proposé des cours pour les néophytes. Aujourd’hui, Urban Studio accueille près de 350 artistes et 1000 étudiants. Parmi l’équipe enseignante, Jeff Zimmerman, grand nom de la discipline. « Nous avons travaillé ensemble de nombreuses années. La façon dont il utilise le matériau, son esthétique et son design ont grandement influencé mon travail. (…) Ces studios accessibles au public, comme Urban Glass sont très influents dans la carrière de nombreux artistes. Aussi bien les artistes établis, les designers et les étudiants débutants peuvent s’inspirer les uns des autres. Je trouve essentiel à ma créativité de m’entourer de personnes aux différents parcours de leur parcours !»
Outre ce goût pour le travail collectif, la créatrice revendique son statut de « full-time flâneur », partageant son temps entre sa pratique artistique et un temps libre présenté comme nécessaire à la création. Une déclaration poétique, qui fait évidemment écho à ses délicates créations, mais qui étonne à l’heure de l’ultraproductivité.