Le beau du mois : des bois enchantés et des néons le soir tombé

Tous les mois, une sélection du meilleur des tendances, objets de décoration et dernières expositions. De quoi se perdre dans ses pensées, passer une nuit électrique et plonger dans une foret magique.

Se promener dans les bois, s’éclairer au néon et être transporté dans un jardin japonais. Le beau du mois de septembre compile le meilleur des tendances, objets de décoration et dernières expositions.  Ou comme susurrait France Gall en 1965 : “Moi, j’aimerai longtemps, lorsque revient le temps, le temps de la rentrée”.


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Soirées désenchantées

“Night Club (Yannis Zegrani)”, 2023, de Pierre & Gilles. Photographie imprimée par jet d’encre sur toile et peinte. © Courtesy des artistes et Templon, Paris – Brussels – New York
“Night Club (Yannis Zegrani)”, 2023, de Pierre & Gilles. Photographie imprimée par jet d’encre sur toile et peinte. © Courtesy des artistes et Templon, Paris – Brussels – New York

Le duo Pierre et Gilles présente en cette rentrée, à la galerie Templon, à Paris, “Nuit électrique”, une exposition qui marque leur longévité et leur rôle de pionniers des questions LGBTQI+. Depuis plus de quarante ans, le couple fusionne peinture et photographie pour créer des portraits oniriques, à la fois subversifs et merveilleux. Leur nouvelle série, conçue au cours des deux dernières années, plonge dans une atmosphère nocturne, hantée par la lumière artificielle des néons.

Les œuvres mettent en scène des personnages familiers comme le marin, l’ange ou le voyou, évoluant dans des décors ambigus, entre cabaret et fête foraine. La jeunesse gay, trans, métissée qu’ils représentent, oscille entre optimisme et désillusion, reflétant les luttes et les victoires d’une communauté encore en quête de reconnaissance.

En contrepoint, deux autoportraits des artistes, l’un mélancolique, l’autre humoristique, montrent Pierre et Gilles face au temps qui passe. Ils révèlent aussi deux nouvelles interprétations de leurs muses, Amanda Lear et Isabelle Huppert, qui éclairent leur travail récent sur la lumière crue, métaphore puissante de la résistance au temps.

> Exposition “Nuit électrique“ de Pierre & Gilles, du 3 septembre au 19 octobre 2024,  à la galerie Templon, 28 rue du Grenier-Saint-Lazare, Paris 3, ouverte du mardi au samedi, de 10 heures à 19 heures.


Tel père tel fille

Céramique de Cécile Nogues.
Céramique de Cécile Nogues.

Dans la famille Laffanour, je voudrais la fille ! Luna Laffanour, dont le père, François Laffanour, a lancé au début des années 1980 la galerie Downtown, spécialisée dans le travail de Pierre Jean Prousé, Charlotte Perriand et Pierre Jeanneret, suit depuis l’an dernier les traces du patriarche, ayant fondé sa propre plateforme, downtomwn+. Là, cette diplômée de l’École Camondo passée par l’Université des Arts de Londres, en Angleterre, fait dialoguer les grands architectes et designers du XXe siècle avec des créateurs contemporains, à travers son regard novateur.

Plus que 15 jours, 9 heures, 7 minutes et 12 secondes, peut-on lire au moment où nous écrivons ces lignes sur le site internet de la galerie, qui ne comprend qu’une seule page, sur laquelle figure le compte-à-rebours en caractères XXL. Et pour cause : du 16 au 30 septembre prochain aura lieu sa prochaine vente en ligne,  comprenant des céramiques d’artistes italiens, américains et français, alliant l’élégance du design vintage à la créativité contemporaine. Parmi les pièces proposées, on retient des œuvres de Pucci de Rossi, le génial Ettore Sottsass, Stan Edmonson ou encore Cécile Nogues, autant de personnalités qui ont du se démarquer par leur originalité et leur maîtrise technique.

> Ceramics, vente en ligne organisée par la galerie downtown+ du 16 au 30 septembre. Plusdowntown.com


Promenons-nous dans les bois

Table d’appoint en bois, Arne Kristian.
Table d’appoint en bois, Arne Kristian.

Après une carrière bien remplie en tant que photographe et réalisateur, Arne Kristian, né en 1979, décide de se consacrer à une autre de ses passions : le travail du bois. Enfant, il participe régulièrement aux travaux forestiers au sein de Klein Boeschoten, le domaine familial, l’une des forêts les mieux préservées des Pays-Bas, située dans le parc national de Veluwe. « Depuis mon enfance, j’ai toujours participé à la bonne préservation de notre foret. Son odeur, son calme, sa tranquillité et cette grande étendue d’espace ont quelque chose de magique. Aujourd’hui, je continue à y contribuer, mais en créant des objets sculpturaux à partir du bois que je ramasse. » De ce bois, sélectionné avec soin, naissent des pièces de mobilier minimalistes où se marient sculpture et fonctionnalité.

Chaque objet est façonné à la main, à partir de chêne issu exclusivement du domaine « J’aime expérimenter et repousser les limites, défier les règles conventionnelles pour explorer de nouvelles possibilités. » Arne Kristian ne prélève que le nécessaire, respectant l’équilibre fragile de l’écosystème. Ces créations, à la fois robustes et délicates, témoignent d’une profonde connexion entre l’artiste, la nature et le bois qu’il travaille.

> Collection A series of wooden objects de Arne Kristian, disponible sur Roheframes.com


Invoquer ses sens

“Into Hearthland” de Ranti Bam, 2022.
“Into Hearthland” de Ranti Bam, 2022.

La galerie Andréhn-Schiptjenko accueille du 5 septembre au 12 octobre 2024 l’artiste britannico-nigériane Ranti Bam, le temps d’une exposition intitulée “How do we hold our stories?”. Connue pour son travail sculptural, la Nigérienne utilise l’argile comme un moyen d’expression profondément personnel, mettant en avant ses propriétés malléables et narratives.

L’artiste façonne l’argile avec son corps, transformant ce processus en un rituel où chaque fissure et effondrement révèle la vulnérabilité des œuvres. Les séries Ifa et Abstract Vessel reflètent cette tension entre fragilité et résilience, questionnant les formes traditionnelles de la sculpture tout en invitant à une réflexion sur l’identité, les frontières et la liberté. Ranti Bam, dont les œuvres font déjà présentes de collections prestigieuses, notamment celles du Brooklyn Museum et du Victoria & Albert Museum, s’appuyant sur son héritage yoruba et britannique, explore ici la connectivité ou encore l’eau et ses symboles.

> Exposition “How do we hold our stories?” de Ranti Bam, du 5 Septembre au 12 Octobre à la galerie Andréhn-Schiptjenko, 56 rue Chapon, Paris 3e.


De l’art de méditer

© Philippe Garcia
© Philippe Garcia

« Au début des années 1980, je travaillais souvent au Japon, confie le designer Sacha Walckhoff. En visitant un jour un temple et son jardin, il s’est produit quelque chose d’inattendu : après quelques minutes passées à observer un rectangle de graviers planté de quelques rochers, mon esprit « s’envola » littéralement et je suis resté en état méditatif, jusqu’à ce qu’un jeune touriste russe s’adresse à moi. « N’est-ce pas merveilleux ? », me dit-il avec son accent venu de l’Est. Ça l’était bien sûr et ce fut l’une des plus troublantes expériences de ma vie. »

Une expérience qui marqua à jamais la vie du créateur, puisqu’il s’associe aujourd’hui à Miksi Rugs pour créer Gardens of Wisdom (comprendre : “les jardins de la sagesse”), une collection de cinq tapis inspirée par les jardins zen de Kyoto. Influencé par le Ryōan-ji, célèbre pour ses paysages secs, Sacha Walckhoff en revisite les éléments traditionnels en utilisant du cuir de vache et de la peau lainée, remplaçant ainsi la mousse, le gravier et les rochers des jardins japonais. Les tapis, baptisés Yarimizu (rivière), Tsukiyama (montagne), Setonaikai (mer intérieure), Kurama-ishi (littoral) et Chadô (boire la beauté), symbolisent la rencontre entre l’artisanat uruguayen et la sagesse japonaise.

Pour le designer, cette ligne est un hommage à la nature et à sa place primordiale dans l’art et la vie humaine. Chaque modèle incarne non seulement la sérénité et la beauté des paysages nippons, mais aussi l’engagement pour des matériaux durables, reflétant une philosophie où l’artisanat s’élève jusqu’à la réflexion spirituelle. Cette collection illustre l’impact profond que le Japon a eu sur le designer, une influence qui nourrit toujours autant sa créativité.

> Collection Gardens of Wisdom de Sacha Walckhoff pour Miksi Rugs. Walckhoff.com


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