Lago, le restaurant privé qualifié d’ « ovni » par sa cheffe Chloé Charles

Entretien avec l'ancienne candidate de Top Chef.

Après des années à cuisiner tantôt dans des restaurants en résidence, dans l’événementiel ou pour des projets éphémères, celle qui fut la première cheffe à poser ses couteaux chez « Fulgurances, l’adresse », a ouvert Lago en septembre 2022. L’anagramme du prénom de sa fille Olga, qui sonne aussi comme « la go », « la femme » en argot. Chloé Charles a conçu un restaurant privé qui s’adapte aux besoins des clients.


Chloé Charles a ouvert LAGO à l’automne 2022
Chloé Charles a ouvert LAGO à l’automne 2022 Créa Agency

IDEAT.FR : Pouvez-vous nous raconter la genèse de Lago ?

Chloé Charles : Mon expérience chez Fulgurances, pendant huit mois, m’a montré que je n’avais pas forcément envie d’ouvrir mon restaurant. C’est Top Chef qui a finalement transformé l’essai : Lago, j’y réfléchissais depuis longtemps, mais ça tombait sous le sens que c’était là qu’il fallait le lancer. Lors de mes prestations, mes clients faisaient appel à mes services et devaient en outre louer un lieu. L’idée, avec Lago, c’est de leur donner une cheffe et un lieu à privatiser ensemble. J’ai eu la chance de créer un lieu qui est tellement taillé sur mesure que c’est un peu un ovni, mais je n’aurais pas pu rêver mieux.

IDEAT.FR : Comment fonctionne le lieu ?

Chloé Charles : Ce n’est ni un restaurant, ni un traiteur. Chez Lago, on a un labo qui nous permet de servir jusqu’à 500 couverts pour des prestations extérieures, pour lesquelles on cuisine comme pour un restaurant, sauf que c’est à emporter. On reçoit aussi chez Lago – 24 personnes maximum à table, 50 debout. Avec le cabinet d’architectes Bond, on a pensé un lieu modulable en forme de L, avec une cuisine ouverte sur la salle mais aussi sur la rue – les passants nous voient cuisiner de l’extérieur. Une fois tous les convives arrivés, ils prennent l’apéritif dans la cuisine, comme à la maison. Ensuite, ils passent à table dans la deuxième branche du L, imaginé comme un cocon, depuis lequel on ne voit plus la cuisine.

Intérieur du restaurant privé LAGO de Chloé Charles
Intérieur du restaurant privé LAGO de Chloé Charles Fabienne Delafraye

IDEAT.FR : Comment avez-vous été sensibilisée à l’écoresponsabilité en cuisine ?

Chloé Charles : J’ai appris la cuisine avec François Pasteau, qui préparait les produits dans leur intégralité. C’est une éducation : j’ai appris cette manière-là de faire et je n’ai pas pu m’en détacher. Quand on fait à manger pour 60 personnes, on passe un message à 60 personnes. Quand on sert des tomates en hiver à 60 personnes, on leur dit que c’est « OK » de manger des tomates en hiver. Concrètement, je réduis énormément la part de protéines animales, je ne travaille que très peu de produits qui ne viennent pas de France ou d’Europe et je n’utilise que des ingrédients naturels. Pour la partie événementiel, on redistribue le maximum d’invendus, sachant qu’on porte une attention particulière aux quantités, pour éviter la surproduction.

IDEAT.FR : Comment sont imaginés les menus chez Lago ?

Chloé Charles : L’idée, c’est de venir goûter ma cuisine, donc souvent les clients me font confiance. Après, si un client ne souhaite pas manger du chou, on ne lui en cuisinera pas, ou à l’inverse s’il a des idées précises en tête, on peut les réaliser. Ma cuisine est principalement basée sur la gourmandise, je pars systématiquement de la question : « Qu’est-ce que j’aimerais manger ? » Ensuite, on regarde quels sont les produits de saison et on vient apporter de l’acidité, un peu de gras, de la fraîcheur, sur une base de cuisine française classique. La darphin, par exemple, est une de mes recettes phares. J’aime aussi beaucoup utiliser les épices, qui peuvent rendre un plat basique très chouette en 30 secondes. J’ai d’ailleurs créé une gamme d’épices avec la marque Nomie. Niveau produits, je fonctionne par phases : en ce moment, c’est le sel fumé.

Plat imaginé par la cheffe chez Lago
Plat imaginé par la cheffe chez Lago Créa Agency

IDEAT.FR : Depuis 2018, vous participez à « L’École Comestible », en intervenant dans les écoles pour éduquer les plus jeunes au goût : en quoi ça consiste ?

Chloé Charles : Je me suis toujours demandé pourquoi on n’apprenait pas la cuisine à l’école, alors qu’on mange trois fois par jour. Ça a un impact considérable : chacun, quand il va faire ses courses, vote avec sa carte bleue. Éduquer les enfants, c’est primordial pour savoir d’où vient ce qu’on mange, comment ça pousse, comment on peut simplement le cuisiner. Aussi, les lobbys sont présents partout à l’école, qu’il s’agisse de la viande, de la pêche ou encore des produits laitiers. Il est temps qu’il y ait un lobby du bien manger à l’école.