C’est un tissu industriel typique de l’ancienne banlieue rouge de Paris. En souvenir d’une époque où les usines constituaient la force vive de la ville, Pantin entend valoriser par le haut ses sites manufacturiers. L’école des savoir-faire du cuir d’Hermès en est certainement l’un des exemples les plus emblématiques. Située dans le quartier des Quatre-Chemins à proximité du siège, elle prend ses quartier en lieu et place d’une ancienne imprimerie du XIXe siècle, totalement rénovée par l’agence APA de Ludmila Pernot, qui accompagne depuis plus de 20 ans le sellier français dans ses démarches patrimoniales – et même, plus personnellement, les membres de la famille Hermès pour leurs projets privés.
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Réadapter le site en cours de chanter
Dans le but de conserver son héritage ouvrier, la municipalité séquano-dionysienne a obligé l’agence d’architecture à maintenir le volume de la toiture du bâtiment d’origine, marqué par des décennies d’histoire, tout en y insufflant un nouveau souffle. Reposant sur des piliers, la charpente a été restaurée en même temps que l’on excavait un sous-sol. La réfection de cet espace de 2 400 mètres carrés a été en réalité une véritable épopée : Ludmila Pernot a dû en effet redéfinir et réaménager l’espace alors en travaux, son équipe ayant fait preuve d’une adaptabilité sans faille.

« J’ai été contactée en 2016 pour ériger à cet emplacement l’Atelier Petit H, un studio d’upcycling des chutes de matériaux Hermès visant à en faire des objets d’art. Mais en plein chantier, nous avons finalement transformé le bâtiment en un showroom commercial sur demande de la direction », se souvient-elle. Cependant, après une année de fonctionnement, l’entreprise décide à nouveau de changer d’orientation, pour finalement la dédier à l’apprentissage des savoir-faire du cuir. L’agence APA établit tout un travail de recloisonnement pour livrer l’ensemble dans les temps, à savoir en mai 2024.
Lutter contre l’espionnage industriel
L’écriture architecturale du site complète celle de l’espace Jean-Louis Dumas, édifice qui lui, le jouxte. L’école ne dispose que d’une façade sur rue, orientée sud. « Celle-ci a été vitrée au maximum et habillée de briques jaunes afin de rester dans le tissu urbain pantinois », reprend Pernot. La forte proximité avec les bâtiments voisins a incité la conceptrice à poser des stores afin de garantir la discrétion du lieu, le groupe Hermès restant en effet très vigilant sur les questions d’espionnage industriel. « Nous n’avons ainsi pas pu installer de fenêtres au rez-de-chaussée pour des raisons de sécurité », confirme-t-elle.
Le respect du passé se mêle au souci constant d’excellence propre à la maison. Les zones manufacturières sont agencées de manière à favoriser la fluidité des échanges. Dans cet endroit où la précision est de première importance, la qualité de la lumière est de première importance : plus qu’une simple nécessité technique, elle stimule l’énergie créative des artisans. « Ce bâtiment, configuré très en profondeur en raison du parcellaire, dispose d’un apport zénithal grâce à deux verrières sur le toit, équipées d’un double vitrage isolant avec contrôle solaire et de stores extérieur de protection pour éviter l’éblouissement et la surchauffe l’été. »

Par ailleurs, des panneaux acoustiques accolés aux cloisons améliorent l’acoustique, autre élément essentiel à la qualité du travail. La présence du bois apporte en outre de la chaleur d’un point de vue sensoriel. « Je suis heureuse de cette réalisation car les élèves apprécient le projet, ils se sont approprié le lieu, ont conscience de travailler dans de bonnes conditions », conclut Ludmila Pernot, qui souligne le caractère calme et soigné de l’endroit.
70 personnes, jeunes apprentis ou individus en reconversion professionnelle, sont ici formées aux techniques Hermès, sous la surveillance de la direction située à l’étage qui pose un regard sur les ateliers situés dans la fosse, comme aux grandes heures de l’ère manufacturière de la ville.
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