Deux expositions de photographie à voir en Espagne

De Joel Meyerowitz à David Goldblatt, la rédaction d'IDEAT est allée dénicher les deux expositions de photographie à ne pas manquer sur la péninsule ibérique.

L’Espagne met à l’honneur deux géants. Nés tous les deux dans les années 30, ils ont traversé le siècle dernier l’appareil photo à la main et l’œil grand ouvert, documentant le pire comme le meilleur. Joel Meyerowitz a parcouru l’Europe avant de retrouver son Amérique. David Goldblatt n’a jamais quitté son pays natal: l’Afrique du Sud. Découverte de ces deux expositions de photographie.


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Joel Meyerowitz en immersion

En 1962, Joel Meyerowitz rencontre Robert Frank. Une épiphanie. Il a 24 ans et vient enfin de trouver sa voie. Il quitte son emploi de directeur artistique dans une agence de publicité, emprunte un appareil photo et parcourt les rues de New York. Autodidacte, il expérimente films noir et blanc et films couleur et, face aux diptyques ainsi obtenus, conclut que le noir et blanc « réduit le monde en nuances de gris ».

Málaga (1966)
Málaga (1966) Joel Meyerowitz

Il choisit alors de le voir en couleur et « à la coulée », une méthode adaptée de la natation consistant à nager en faisant le minimum d’écume, autrement dit à « se glisser dans toutes les situations sans jamais se montrer intrusif ». En 1966 et 1967, son Leica 35 mm pour compagnon, il traverse l’Europe jusqu’aux confins de la Turquie.

À Londres, il immortalise un homme en costume de tweed, vu de dos, les manches relevées sur ses bras tatoués ; à Paris, un groupe de jeunes filles en jupes de tailleur et sacs à main; à Málaga, une famille riant à gorge déployée.

Malaga (1967)
Malaga (1967) Joel Meyerowitz

Des clichés de l’Ancien Monde, celui d’avant Mai 68, et des mouvements contestataires, qui témoignent de l’influence des pionniers de la photographie de rue dont il s’éloignera bientôt, préférant à l’instant décisif – cher à Cartier-Bresson – privilégier le point de vue au sujet. — « Joel Meyerowitz. Europa ». L’une des expositions de photographie à ne pas manquer.

> Au Museo Picasso Málaga, Palacio de Buenavista, C. San Agustín, 8, Distrito Centro, 29015 Málaga, du 15 juin au 15 décembre 2024. Tél. : +34 952 12 76 00.


David Goldblatt au cœur de l’histoire

Pour beaucoup, il incarne le photographe qui a le plus documenté la vie quotidienne en Afrique du Sud, son pays natal. Durant sept décennies, des années 50 jusqu’en 2010, David Goldblatt retraça inlassablement l’histoire de la ségrégation raciale. À sa manière: sans slogan ni revendication. D’ailleurs, il considérait son œuvre comme une « conversation entre lui-même et ses compatriotes ».

The Dethroning of Cecil John Rhodes, after the Throwing of Human Feces on the Statue and the Agreement of the Uuniversity to the Demands of Students for its Removal, the University of Cape Town, 9 April 2015 (« Le Détrônement de Cecil John Rhodes, après le jet d’excréments humains sur la statue et l’acceptation par l’université des demandes des étudiants de la retirer ») (2015).
The Dethroning of Cecil John Rhodes, after the Throwing of Human Feces on the Statue and the Agreement of the Uuniversity to the Demands of Students for its Removal, the University of Cape Town, 9 April 2015 (« Le Détrônement de Cecil John Rhodes, après le jet d’excréments humains sur la statue et l’acceptation par l’université des demandes des étudiants de la retirer ») (2015). 2022.37.515. © THE DAVID GOLDBLATT LEGACY TRUST

Celle-ci, menée en noir et blanc, puis en couleur, prend ici la forme de 150 images, des paysages, des bâtiments et des portraits (l’exposition emprunte son titre, « No Ulterior Motive », « pas d’arrière-pensée », à l’annonce passée dans le journal par Goldblatt alors à la recherche de modèles) qui, innocents au premier regard, révèlent toute l’inhumanité du système de l’apartheid.

Il y a cette dame assise dans sa voiture sur le parking d’un centre commercial, dont l’accès est interdit aux Noirs payés à ranger les Caddie, ou cet homme qui tond la pelouse autour de sa vaste maison construite par des Noirs, dans une banlieue où ils ne peuvent habiter.

Sunday morning: A not White family living illegally in the « White » group area of Hillbrow, Johannesburg (Dimanche matin : Une famille non blanche vivant illégalement dans le quartier « blanc » de Hillbrow, à Johannesburg) (1978).
Sunday morning: A not White family living illegally in the « White » group area of Hillbrow, Johannesburg (Dimanche matin : Une famille non blanche vivant illégalement dans le quartier « blanc » de Hillbrow, à Johannesburg) (1978). 2022.37.515. © THE DAVID GOLDBLATT LEGACY TRUST

Une quarantaine de clichés permet de replacer l’œuvre de Goldblatt dans son contexte, certains signés de ses contemporains, tels que Josef Koudelka ou Shomei Tomatsu, et d’autres, de la nouvelle génération de Sud-Africains comme Ruth Seopedi Motau, Zanele Muholi ou Lebohang Kganye. — « No Ulterior Motive ». ». L’une des expositions de photographie à ne pas manquer.

> À la Fondation Mapfre, à Madrid, du 30 mai au 25 août. Fundacionmapfre.org


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