La ville serait-elle devenue le nouveau terrain de jeu des designers ? À voir le nombre de projets d’aménagement urbain auxquels ils sont mêlés, il semblerait que oui. D’autant qu’au-delà des signes visibles de leur passage – du panneau de signalisation à l’agencement du parvis d’une gare –, ils bénficient d’un champ d’action bien plus vaste qu’on ne pourrait le croire, le mobilier urbain n’étant que l’une des nombreuses facettes de leur arsenal. Ils contribuent aussi à d’autres niveaux à penser la façon dont nous vivons la ville. Dès lors, qu’est-ce qui distingue le design urbain de l’architecture ou même de l’urbanisme ?
« Un urbaniste voit les choses d’en haut, sans les gens, quand un designer se projette dans l’espace avec davantage de nuances et réfléchit d’abord aux usages », résume Olivier Saguez, dont l’agence de design Saguez & Partners a signé la restructuration intérieure du Forum des Halles, à Paris, ou, tout récemment, le terminal S4 de l’aéroport Paris – Charles-de-Gaulle. Selon Olivier Hirt, coresponsable de la chaire d’innovation publique à l’ENSCI-Les Ateliers (école parisienne de création industrielle), le design serait plus transversal par nature que les autres spécialités et donc mieux armé pour répondre aux grandes problématiques urbaines : « En France, l’architecture et l’urbanisme sont historiquement des disciplines d’ingénierie, avec des langages, des méthodes et des outils inscrits jusque dans la loi, quand le design n’est au contraire pas du tout codifié. À partir d’une palette d’instruments plus libre et jamais prédéterminée, la réponse apportée par un designer à une question d’urbanisme peut revêtir des formes très différentes. »
Ainsi, les solutions peuvent être matérielles et passer par la création concrète d’objets ou d’une signalétique, mais aussi beaucoup plus insaisissables. C’est pourquoi le design de service, de l’action publique ou de l’innovation sociale n’est pas forcément visible au premier coup d’oeil, mais détermine bel et bien l’utilisation par les usagers d’un territoire commun. Si le design consiste par essence à répondre à une problématique, il peut employer tous les outils qu’il voudra pour y parvenir.