Il y a les clichés de Saint-Malo qui l’ancrent dans les paysages de cartes postales – ses remparts battus par les vents, , ses ruelles aux pavés trempés de sel, ses marées qui sculptent le sable, son Sillon submergé par les vagues… Et puis il y a son histoire, celle où se mêlent les chasseurs d’épices, le poète Châteaubriant, où il est question d’une renaissance après les bombardements de 1944 qui la détruisirent à près de 80%. Et enfin, il y a la ville corsaire que les Malouins défendent pour qu’elle ne devienne pas un dortoir à grande échelle, qui s’étire au-delà de ses fortifications et où les saisons ne dictent plus le rythme de la cité. « Quand l’été se termine, Saint-Malo n’hiberne pas », glisse Charlène, cofondatrice du café-céramique L’Esprit Libre, parfait exemple du renouveau créatif et de l’artisanat breton. Dans ces quartiers où la mer se devine au détour d’une rue, Malouins d’origine et d’adoption redessinent un art de vivre bien ancré entre sel, culture et créateurs locaux.
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Bleuñv : la poésie florale du design breton et les bonnes adresses du patron
À la manufacture florale Bleuñv, qui signifie « fleur » en breton, ouverte il y a trois ans dans le quartier de Saint-Servan, les compositions célèbrent la flore de saison, locale, sauvage et parfois oubliée. « Je travaille avec la ferme florale Phacélie basée à Cancale, sinon je vais glaner dans les talus et bois mes fleurs moi-même, comme la bruyère », précise son fondateur Julien, originaire des Côtes-d’Armor et passé par Paris.
Ses adresses à Saint-Malo du moment ? Le Studio Sauvage pour des sessions de yoga et sa Cantine Sauvage – il parait que « les Bounty et Snickers faits maison de Maud sont à tomber », ainsi que Le Comptoir du Vice, « un bar à cocktails qui organise des soirées drag, ça met un peu de fun dans Saint-Malo ! » Julien conseille également de garder un œil sur la photographe Isabelle Delvallée, qui expose dans la région ses tirages en gomme bichromatée.
> Carnet d’adresses : Bleuñv, fleuriste à Saint-Malo, 35 Rue ville Pépin. Studio Sauvage et Cantine Sauvage, cours de yoga & restaurant végétarien, 77 Rue ville Pépin. Le Comptoir du Vice, bar à cocktail, 4 Pl. Gasnier Duparc.
Saint-Servan, le quartier littéraire qui tourne la page du cliché
Toujours à Saint-Servan, dans la rue principale Ville Pépin, l’on trouve La Droguerie, une librairie indépendante qui attire les lecteurs comme un phare dans la nuit. Mélanie Chesnais et Patrick Coltel, anciens enseignante et ingénieur, ont quitté Tours pour reprendre cette librairie-droguerie il y a six ans. « Nous voulions vivre en Bretagne, car nous avons de la famille à Lancieux. Nous avons surveillé les annonces et avons eu un vrai coup de cœur », raconte Mélanie.
Et pour cause : La Droguerie a conservé son charme d’origine grâce à ses étagères en bois et son escalier patiné. Face à la librairie principale, la section jeunesse et BD complète l’ensemble. « Les habitants nous chuchotaient de ne pas toucher à l’âme du lieu. » Une institution qui ne manque jamais une édition du Festival Quai des Bulles qui se tient du 24 au 26 octobre, consacré à la BD et aux romans graphiques et qui marque l’un des temps culturels forts de Saint-Malo.
« Il y a aussi le Festival Etonnants Voyageurs qui se tient en juin, auquel nous participons également. Lorsque nous ne sommes pas à la librairie, nous fréquentons la salle de concerts La Nouvelle Vague et le cinéma art et essai Le Vauban – La Grande Passerelle. Saint-Servan, c’est un village dans la ville. Nous avons tout ici : à quelques numéros de là, on trouve Ritournelle, une cave à vins vivants qui a aussi son restaurant à Dinard, et plus loin Le Vomb, un petit resto-café suédois ».
> Carnet d’adresses : Librairie La Droguerie, 66 Rue Georges Clemenceau. Salle de concert La Nouvelle Vague, Rue des Acadiens. Cave à vins vivants Ritournelle, 68 Rue ville Pépin. Le Vomb, bistrot franco-suédois, 3 Rue de la Cité.
L’Esprit Libre : la céramique prend le large à Saint-Malo
« Nous avons quitté nos vies salariées pour lancer notre commerce, en toute liberté et à notre rythme. » Charlène, Malouine d’origine, et Édouard qui a grandi à Rennes, ont ouvert leur café céramique L’Esprit Libre en juin dernier, dans le quartier de Rocabey. Quant à la cité corsaire, ils la voient aussi changer : « La ville bouge. Quand j’étais jeune, il n’y avait pas grand-chose à faire ici, je sortais souvent à Rennes », avoue Charlène.
Les adresses à Saint-Malo qui les enthousiasment actuellement ? Le Théâtre l’Hermine, à Saint-Servan, Bouiboui Cantine et sa cuisine cambodgienne, CouleurCafé pour un brunch face au Sillon ou encore la boutique Pablo est une fille à Saint-Servan : « Pauline est une artiste qui vend des illustrations florales sous forme d’affiches et de cartes postales. Nous aimerions décorer notre café avec. »
> Carnet d’adresses : Café L’Esprit Libre, 11 B, Pl. Anne de Bretagne. Théâtre l’Hermine, 6 Pl. Bouvet. Bouiboui Cantine, 62 Rue de la Pie. CouleurCafé, coffee-shop, buvette et restaurant, 1 Pl. de la Fontaine. Pablo est une fille, atelier d’illustration, créations en vente chez Noo Boutik, 47 rue Ville Pépin.
La Maison Générale : quand le design breton rayonne jusqu’à Montréal
Ce dynamisme, Dominique Tosiani l’a bien observé. Depuis 2000, il tient les rênes de la boutique familiale La Maison Générale, autrefois La Maison du rideau, fondée par sa grand-mère en 1946. Adresse connue de tout intramuros, elle est à la fois un concept-store de décoration et design doté d’un coffee shop et un studio d’architecture d’intérieur. Celle-ci a une antenne depuis une douzaine d’années à Dinard et, depuis 6 mois, à… Montréal.
«La Maison Générale est avant tout une histoire de famille, dont une partie vit au Canada. » Pour Dominique, qui a jeté l’ancre à Saint-Malo il y a 25 ans, la ville s’est certes gentrifiée mais échappe ainsi à une « mont-saint-michelisation », grâce à des adresses exigeantes. Dominique apprécie particulièrement l’Izakaya Otonali de Bertrand Larcher, le fondateur du Breizh Café, le salon de thé et crêperie Bergamote et conseille de découvrir La Chapelle Saint-Sauveur, « qui accueille de chouettes expositions« .
> Carnet d’adresses : La Maison Générale, boutique de mobilier et décoration, 6, rue Saint Thomas. Izakaya Otonali, restaurant japonais, 53 Quai Duguay-Trouin. Bergamote, salon de thé et crêterie, 3 Pl. Jean de Châtillon.
Le Bistrot du Rocher : sincérité, sel et terroir malouin
C’est aussi entre ces remparts que Le Bistrot du Rocher tient bon la vague depuis plus d’une décennie. Aux manettes, Sylvain Delauney, que l’on a connu au restaurant gastronomique Les Carmes, à Rennes, a choisi Saint-Malo pour retrouver du sens : « Le ticket moyen était trop élevé dans mon ancien établissement, je ne me retrouvais pas dans ma clientèle. Ici, je voulais quelque chose de plus simple, plus libre. »
La part belle est faite aux produits locaux et de marché : légumes de La Petite Claye des Champs, cochons de La Ferme du Pressoir… « Quand je suis arrivé il y a treize ans, personne ne faisait du vin nature », citant pour exemples les récentes caves et bistrots Tandem et Bouliche. Lorsqu’il n’est pas en cuisine, Sylvain file marcher sur la plage du Sillon, « pour sentir la liberté, celle qui m’a ramené ici ».
> Carnet d’adresses : Le Bistrot du Rocher, 19 Rue de Toulouse. Tandem, restaurant, 41 Rue ville Pépin. Bouliche, restaurant, 16 Rue ville Pépin.
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