A Bilbao : Les vibrations chromatiques de Lee Krasner
Si, pour certains, le nom de Lee Krasner est définitivement lié à celui de son illustre mari, Jackson Pollock, chantre de l’action painting, pour beaucoup, il n’évoque rien. Dommage, car cette artiste américaine (1908-1984) fut elle aussi une pionnière de l’expressionnisme abstrait, ce mouvement crucial dans l’histoire de l’art moderne, après la Seconde Guerre mondiale. Dans ses premiers autoportraits, en 1928, elle défie, pinceaux à la main, le regardeur – et le milieu artistique new-yorkais tout entier nourri de préjugés antiféministes – de lui nier son statut d’artiste. Ses peintures monumentales et vibrantes de couleurs scellent la rencontre chaotique entre figuration et abstraction (Prophecy). L’exposition de Bilbao présente cinq décennies de recherches intensives, cinquante années de travail, qu’elle qualifiait d’autobiographique : « Mon sujet, c’est moi ! »
> « Lee Krasner. Couleur vive ». Au musée Guggenheim, à Bilbao, jusqu’au 10 janvier 2021.
Bruxelles : Créatures tissées
Tapisserie, aquarelle, vannerie, céramique : la plasticienne britannique Caroline Achaintre, née en 1969, appartient à cette génération qui fait œuvre de médiums longtemps considérés comme mineurs. Mais qu’elle tisse, modèle, dessine ou grave, elle bouscule les traditions pour sculpter des créatures hybrides – mi-fantastiques, mi-fantomatiques – qui dialoguent entre elles et transforment l’espace de l’exposition en scène de carnaval. Elle se dit influencée par les arts primitifs, les films de science-fiction et l’iconographie du heavy metal. La fantaisie en plus, comme en témoignent les titres de ces pièces : MissTique, Monmec ou Quasimodo. S’agit-il de masques, d’animaux, de monstres ? Les formes anthropomorphiques de cette artiste, étrangement familières, autorisent toutes les interprétations et nous interrogent autant qu’elles nous émeuvent.
> « Vue liquide. Caroline Achaintre ». À la Fondation Thalie, à Bruxelles, jusqu’au 13 décembre.
Bruxelles : Télescopage de matières
Avant sa fermeture pour travaux, le Kanal-Centre Pompidou donne carte blanche à John M. Armleder, un plasticien qui a investi les six étages de l’ex-garage Citroën, à Bruxelles. Exposé pour la première fois en 1973, John M. Armleder (né à Genève en 1948) est à la fois peintre, sculpteur, performeur, archiviste, curateur, collectionneur, éditeur, libraire, galeriste… D’abord proche du mouvement Fluxus, il crée ensuite des « Furniture Sculptures », des tableaux abstraits présentés avec un fauteuil ou un sofa. Il qualifie sa pratique de « philosophie du râteau ». « Je ramasse tout ce qui m’intéresse, et je prends un délicieux plaisir à mettre tout en compost et à utiliser ce compost tel quel. » Au Kanal, il propose des installations immersives, une sorte d’autoportrait chinois de celui qui évoque volontiers Picabia, qui, comme lui, « a fait mille choses différentes, mais les a toujours toutes menées en même temps ».
> « It Never Ends. John M. Armleder & Guests ». Au Kanal-Centre Pompidou, à Bruxelles, jusqu’au 25 avril 2021.