Au dernier étage d’un immeuble de la rue de Bretagne, à Paris, ce pied-à-terre en duplex est une merveille d’optimisation et de pragmatisme, tout en esthétique retenue. Quand Christoff Pöll l’a acheté, il n’avait rien à voir avec ce qu’il est aujourd’hui. Malgré l’exiguïté des lieux (37 m2 loi Carrez, 51 m2 au sol) et une mise au propre récente mais sans âme, il se porte acquéreur à l’automne 2020. Visite de cet intérieur imaginé par Anna Postiglione et Alessandra Felici.
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Anna Postiglione et Alessandra Felici : un travail à quatre mains
Le Covid-19 va lui laisser le temps de réfléchir à son aménagement ! Comment réorganiser ces quelques mètres carrés qui tiennent plus du grenier, créer une salle de bains et une cuisine dignes de ce nom, faire entrer une lumière traversante sur les deux niveaux ? Telles des bonnes fées complémentaires, ce n’est pas une mais deux architectes qui vont se pencher sur ce projet : Anna Postiglione et Alessandra Felici. Conseillées par le promoteur, elles travailleront dès lors à quatre mains. Le duo comprend vite les envies du propriétaire.
« Au début, il ne voulait pas faire beaucoup de modifications sur l’existant, même si celui-ci ne correspondait pas tout à fait à ses besoins et à ses goûts, se rappellent-elles. Mais nous, nous souhaitions quelque chose qui parlait de l’histoire de cet appartement, notamment en retrouvant le parquet d’origine. Nous avons cherché à donner l’impression d’un plus grand espace, en supprimant les cloisons et en reproportionnant les espaces de vie, pour créer un duplex en open space très lumineux. L’investissement était plus important, mais pour un résultat davantage à son image. »
La difficulté majeure du chantier a résidé dans la transformation de l’escalier : « L’ancien était envahissant, périlleux et sans style, décrivent-elles. Mais le changer s’avérait extrêmement onéreux, pour des problèmes de logistique et de montage. Nous avons donc décidé de travailler sur l’existant, de l’épurer au maximum afin de l’intégrer de manière plus harmonieuse. »
L’entente est au beau fixe à toutes les étapes : choix des matériaux, du mobilier et même de la décoration. « Nous avons accompagné Christoff dans toutes les phases du programme : chantier, tapisserie, visites de showrooms et d’antiquaires pour la sélection des meubles et des luminaires. » Mais pas seulement. Le propriétaire a des liens privilégiés avec un menuisier qui a de l’or dans les mains, celui auquel on doit les concept-stores Gschwantler que notre hôte a créés dans son pays d’origine, l’Autriche. Si bien que l’autre défi, qui était de concevoir un mobilier personnalisé, a vite été relevé.
« Intervenir sur des appartements de cette taille exige une étude approfondie de tous les espaces à exploiter, précisent les architectes. Nous avons dessiné des meubles sur mesure, choisi les matériaux et confié le travail à l’ébéniste de Christoff. Il est venu sur le chantier pour prendre les mesures, évaluer les modalités de transport à l’étage et revoir avec nous les détails de réalisation sur ses dessins d’exécution. »
Un goût sûr
Christoff a un goût sûr et s’implique personnellement dans l’aménagement de son nid. Issu d’une longue lignée d’entrepreneurs spécialisés dans le tourisme de montagne, au coeur du Tyrol – tourisme de montagne très chic, donc –, il a rejoint l’entreprise familiale il y a une douzaine d’années pour lancer son propre label et orienter son activité sur « l’après-ski ». Pas avec une énième boutique de luxe, mais avec un lieu où l’on se retrouve, où l’on se sent bien et où l’on est certain de dénicher quelque chose de joli et d’original à rapporter chez soi. « La maison mère de Kirchberg, synonyme de chaussures de qualité depuis les années 30, est toujours un magasin très exclusif, explique-t-il. J’ai entrepris l’extension du bâtiment en investissant les locaux voisins d’une ancienne banque pour ouvrir un concept-store. On y trouve de beaux objets, des vêtements, de la maroquinerie, des bijoux, du parfum… Mais c’est également un bar où l’on peut boire un expresso italien digne de ce nom, du whisky écossais, goûter du bacon tyrolien provenant de la ferme familiale… Et si quelqu’un souhaite acheter une bouteille du vin dégusté au bar, une cave a été aménagée dans l’ex-salle des coffres. »
Espaces commerciaux ou pied-à-terre parisien, c’est avec la même exigence que Christoff a mené ses chantiers : « Lorsqu’il s’agit de la qualité des produits et des conseils, je ne fais aucun compromis. »
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