Comment vivrons-nous demain ? A priori, pas très bien si l’on en croit le constat fait par Hashim Sarkis, commissaire de la 17e édition de la Biennale d’architecture de Venise qui a ouvert ses portes samedi 22 mai 2021. Cette vaste question, les différents pays participants ont tenté d’y répondre par un salmigondis de propositions purement digitales, à base de QR codes, de vidéos et d’interminables textes à décrypter. Même avec les outils du numérique, montrer l’architecture demeure une gageure…
Le bois éternel
Les Etats-Unis proposent sans doute la proposition la plus réussie avec un projet dédié aux charpentes en bois qui représentent aujourd’hui 90 % de la construction de maisons particulières dans le pays. Le duo d’architectes de Chicago Paul Andersen et Paul Preissner exposent les qualités de cette technique simple à mettre en œuvre, abordable et très flexible dans une série de maquettes. Erigée devant le pavillon, une immense structure en pin propose de l’escalader pour admirer le point de vue unique sur Venise et ses Giardini.
Un peu plus loin, vers la Corderie où se déroule l’exposition principale, c’est l’ancien commissaire Alejandro Aravena qui a été invité à installer une immense structure en bois, œuvre sculpturale composée d’immenses troncs élancés que le public est invité à s’approprier.
Des cabanes finlandaises à travers le monde
C’est aussi une histoire de bois qui a guidé le pavillon japonais, où est exposée une maison des années 50 démantelée dont Jo Nagasaka, le commissaire, propose de réutiliser les éléments pour un nouvel usage et transformer ses anciennes cloisons en étagères, tables… Une façon d’interroger sur le réemploi des matériaux à l’heure de la raréfaction des ressources.
Dans le même esprit, le petit pavillon finlandais dessiné par Alvar Aalto se plonge dans la typologie de la petite maison en bois avec une exposition dédiée aux maisons en kit Puutalo. Imaginées en 1940 pour les réfugiés de la Seconde Guerre mondiale, ces habitations ont ensuite été exportées dans plus de 30 pays, d’Israel à la Colombie, où certaines sont encore debout et habitées comme le montre une série de photos passionnantes sur la façon dont leurs occupants les ont personnalisées au fil des décennies… Autant d’exemples qui démontrent une fois encore que les matériaux naturels sont les mieux armés pour affronter un avenir incertain…
La biennale de Venise 2021 célèbre le vivre-ensemble
Grande question posée par la Biennale de Venise 2021, le vivre-ensemble a animé Christophe Hutin, en charge du pavillon français où il met en avant le rôle des « communautés à l’œuvre » ou l’italien qui présente, lui, une série de communautés résilientes.
De manière moins littérale, le pavillon dominicain s’offre un pas de côté en investissant une église anglicane dont les murs ont été recouverts de panneaux en feuilles de tabac dont le collage sur des plaques de verre constitue une allégorie éclairée du vivre-ensemble. C’est surtout un hommage d’une grande beauté à l’ancienne technique des vitraux typiquement vénitienne qu’elle donne à voir au visiteur.
Aventure humaine par excellence, l’architecture se fait politique dans le pavillon suisse avec le périple le long de la frontière des architectes Mounir Ayoub et Vanessa Lacaille. Les habitants rencontrés leur ont livré leur vision de ces démarcations, des récits qu’ils ont traduit sous forme d’une maquette à l’esprit low-tech.
Au final, le pavillon qui répond directement le plus directement à la question du commissaire, est celui du Rotyaume-Uni. Il se focalise sur l’avenir des espaces publics privatisés en examinant le cas du pub, de la rue, les « common lands » ou les jardins fermés, avec son « jardin des plaisirs privatisés », dérivé sarcastique des « Jardins des délices » de Hieronymus Bosch, un voyage en immersion dans ce que ne doit pas devenir l’espace public…
> Biennale de Venise 2021. Jusqu’au 21 novembre 2021.