En 2050, selon l’ONU, sept personnes sur dix seront citadines. Aussi, comme d’autres continents, l’Europe réfléchit à modéliser la ville du futur. La rédaction consacre un dossier aux villes durables en Europe : en voici un préambule.
Objectif « net zéro»
Le changement climatique, la raréfaction des ressources et la pollution entraînent une sérieuse remise en cause de nos habitudes. Travailler en ville, s’y déplacer, y consommer, prendre plaisir à y vivre en bonne santé deviennent des préoccupations majeures, d’autant que la pandémie de Covid-19 a chamboulé notre perception du milieu urbain. Lors de la COP21, à Paris, en 2015, la « neutralité zéro » s’est invitée dans le débat. Il s’agissait de dégager du carbone a minima, en tout cas pas plus que ce que l’atmosphère peut absorber.
En 2018, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) pousse le curseur jusqu’au « net zéro », l’objectif de zéro émission de dioxyde de carbone (CO2) à l’horizon 2050. Cette norme s’impose maintenant pour « décarboner » production d’énergie, industrie, transport et habitat. Sont mises à contribution les nouvelles technologies, la baisse de la consommation, la création d’économies viables qui englobent le bien-être des populations. Exit les énergies fossiles telles que char-bon, pétrole ou gaz, elles sont remplacées par le solaire, l’éolien, l’hydraulique, la biomasse ou l’énergie nucléaire. Plus simple à dire qu’à faire, car ces derniers doivent être stockées pour pallier l’absence de soleil, de vent ou d’eau.
Une révolution en marche
Complexe, la durabilité repose sur un nombre incalculable de critères. Elle touche directement notre habitat, décarboné via le chauffage électrique (et les pompes à chaleur), les rénovations thermiques et les matériaux novateurs qui améliorent ses performances énergétiques. Elle impacte les transports urbains que les villes régulent, en reliant mieux cœurs de cité et banlieues pour encourager le citoyen à lâcher sa voiture. Bus ou trams sont allégés, fonctionnant aux biocarburants, carburants de synthèse ou hydrogène décarboné. Quant à l’industrie, elle se voit contrainte d’utiliser de nouveaux procédés de production et de capturer ses émissions de CO2 pour les réemployer ou les retenir dans des sites géologiques appropriés.
Éolien, hydraulique ou solaire fournissent déjà aux habitants et aux entreprises une énergie dont les villes tirent une ressource économique en revendant le surplus. Pour plus de cohérence sont créés des voies piétonnes, des pistes cyclables, des jardins partagés et des parcs sauvages. Les constructions sont soumises à des normes neutres, de nouveaux quartiers « net zéro » regroupent commerces, loisirs, culture et réseaux de navettes. Bien sûr, les responsables des programmes repensent finement le traitement des déchets et des eaux, le recyclage et développent même la consommation locavore.
Quel calendrier green ?
Dessinée pour 2050, la feuille de route durable a été rapprochée à… 2030. La situation l’exige. Mais, à ce stade, nulle ville au monde ne réunit toutes les conditions à la fois. Chacune explore différents axes et ce ne sont pas les plus grandes ou les mieux dotées qui forment forcément la tête du peloton. Par exemple, la petite ville de Curitiba, au Brésil, recycle ses déchets depuis 1980 (!). Bonne élève aussi, la minuscule Lahti, en Finlande, élue « capitale verte de l’Europe 2021 ».
Singapour, elle, a imposé une surtaxe automobile qui booste son super-réseau de transports urbains. Londres, capitale la plus peuplée d’Europe, est également la plus sauvage grâce à ses immenses parcs naturels ! Amsterdam ou Copenhague, gagnantes sur le vélo, le sont aussi sur leurs transports en commun électriques. En France, 30 milliards d’euros viennent d’être alloués à la transition écologique, dont 8 milliards pour la décarbonation de l’industrie. Une manne qui lui permettra peut-être de rattraper son retard sur ses concurrentes d’Europe du Nord. Enfin, les villes durables en Europe ne devront pas oublier cet impératif : ne pas exporter ses problèmes environnementaux…