1/ Adolf Loos superstar à Vienne
Le Hofmobiliendepot est un peu l’équivalent de notre Mobilier National. Fondé pour gérer l’équipement des lieux de pouvoir, il a accumulé au fil des siècles une incroyable collection. Quand on la parcourt, on saisit mieux les grandes évolutions techniques et stylistiques du mobilier européen grâce aux pièces exceptionnelles de la Cour des Habsbourg puis les « period rooms » Biedermeier, courant pionnier de la modernité au début du XIXe siècle. Cet automne, en plus de sa gigantesque collection permanente, le musée rend hommage à un pionnier du design, Adolf Loos (1870-1933), dont on célèbre cette année le 150e anniversaire de la naissance. Après un voyage de quatre ans aux Etats-Unis au mitan des années 1890, cet homme revient dans son pays avec des idées révolutionnaires. Il réfute notamment aux architectes le droit de dessiner l’intérieur d’un immeuble. Il met au point des tables chaises et rangements confortables et colorés, comme pour le Café Museum en 1900. En plus de son exceptionnelle collection de pièces originales, le Hofmobiliendepot propose une exposition de pièces de Loos revisitées par des designers contemporains comme Martino Gamper, Robert Stadler ou le collectif Eoos.
2/ Le design autrichien en étendard
Sous la bannière Naturphilia, deux figures de proue du design autrichien présentaient leurs derniers travaux dans le même studio photo. Alice Stori Lichtenstein est curatrice et elle présente d’habitude ses expositions dans le Schloss Hollenegg, un château appartenant à sa famille situé à mi-chemin de la frontière italienne dans lequel elle convie aussi des designers en résidence. A Vienne, elle a transporté une partie de sa passionnante exposition de mobilier qui fait entrer la nature sauvage dans nos intérieurs. L’occasion de découvrir la MYX Chair de Jonas Edvard en mycélium ou les Mud Vases d’Odd Matter.
Formé à la Design Academy d’Eindhoven, le duo mischler’traxler répond à cet accrochage avec une nouvelle collection d’objets qui sensibilisent à la disparition d’espèces végétales et animales en Autriche. Présentées en exclusivité, leurs lampes pour la galerie bruxelloise Victor Hunt renferment ainsi un (faux) insecte qui vient se heurter au globe de verre quand l’ampoule est allumée.
3/ Le confinement et ses leçons
Durant cette période très particulière, on a pu redécouvrir le plaisir de préparer ses repas, voire de changer la façon de se nourrir. Au vu de cette expérience, la VDW postule que la food et son écosystème (de l’agriculteur au chef en passant bien sûr par le designer) peut être un élément de développement urbain, voire un angle d’attaque pour repenser la ville par des actions concrètes. Pour ce faire, il faut rendre les circuits agroalimentaires plus visibles. La manifestation a par exemple convié des designers qui pensent des cuisines et lieux de repas temporaires et mobiles, d’autres qui inventent des systèmes pour produire son fromage chez soi ou qui incitent à pratiquer le jardinage avec des outils lestés plutôt que d’aller à la salle de sport) ! Mais la manifestation se penche aussi sur les arts de la table, le design culinaire, l’agriculture urbaine, l’hydroponie…
La designer Nadia Zerunian présentait, elle, le travail accompli à distance avec sa confrère suisse Anna Zimmermann durant le confinement. A quatre mains, les deux femmes ont dessiné une collection de neuf objets qui matérialisent la solitude dans laquelle elles ont vécu trois mois durant. Des objets faits main comme des parfums à doser en fonction de son humeur, des kits de remontants différents en fonction de l’heure de la journée…
4/ Quinze ans de collaboration avec les artisans
C’est une des particularités de Vienne : dans toute la ville, subsiste un réseau d’artisans verriers qui continuent de fabriquer et réparer dans leurs pas-de-porte. Verriers, ébénistes, galvanisateurs… Chaque année depuis quinze ans, la Vienna Design Week les encourage à travailler avec des designers pour renouveler leur pratique dans le cadre de son programme Passionswege. Le fruit de ces collaborations avec des créateurs prestigieux (Big Game, Martino Gamper, Max Lamb…) est exposé dans une rétrospective qui met en lumière ces savoir-faire typiquement viennois. Notre coup de cœur ? Le seau à glace d’Alexandre Echasseriau, dessiné comme un glacier qui, en fondant, crée un lac de montagne…
5/ La Suisse à l’honneur
La crise sanitaire a contraint la Vienna Design Week à travailler avec, comme pays invité, son voisin suisse, ce qui a facilité les échanges sur le thème « Comment le design peut aider à trouver des solutions pour faciliter la transformation de la société ? ». Dans une pièce étaient rassemblée une sélection de jeunes studios innovants plutôt que des poids lourds bien établis. Textile, graphisme, arts de la table réalité virtuelle… Les travaux de ces designers couvre de nombreux champs d’application : tapis tissés de résistances pour chauffer la pièce ou vaisselle fabriquée dans une terre locale pour un restaurant de Berne. Dans un deuxième espace, la Suisse montrait des designers qui, à l’opposé, travaillent avec des savoir-faire ancestraux.