À Vienne, vous exposez Green Light, une lampe en kit imaginée par Olafur Eliasson. Avec lui, vous créez de nouvelles formes d’art sur le dérèglement climatique.
J’ai eu cette idée quand de nouvelles formes documentaires ont émergé, après la vague de l’art conceptuel. Nous avons commencé avec un projet de Kutlug Ataman, un artiste turc qui défend les minorités kurdes à Istanbul. Il les compare à un peuple vulnérable vivant sur une île… Nos expéditions créatives héritent de la pratique des artistes qui « traduisent » l’état du monde.
Est-ce votre passion pour la plongée qui vous incite à explorer les mers en danger à travers une démarche artistique ?
Le travail sur les sons avec Matthew Ritchie a été le déclic. C’est ce qui nous a poussés à enregistrer le son des glaciers en Islande. Depuis, nos projets visent à montrer par des gestes artistiques ce que la planète perd en ressources naturelles. Emmener des créatifs et des scientifiques en bateau, c’est les placer face à l’anthropocène (ère qui marque le début de l’impact de l’Homme sur l’écosystème de la Terre, NDLR) et les confronter aux conséquences des changements climatiques auxquels les habitants des îles sont assujettis.
Le TBA21 a accueilli des installations originales comme le tipi d’Ernesto Neto. Comment choisissez-vous les artistes ?
Je soutiens les jeunes artistes qui montrent un véritable engagement, comme le Suisse Julian Charrière, ancien du studio d’Olafur Eliasson, qui est venu sur l’île Cocos. Il y a aussi le collectif The Propeller Group, de Los Angeles et Hô-Chi-Minh-Ville, d’ex-étudiants du photographe Allan Sekula. Je les exposerai cette année ainsi que Mario Garcia Torres.
The Current a déjà enseveli une exposition (« Treasure of Lima ») et vous ouvrez votre fondation sur Internet. Pourquoi ?
Le format de l’exposition avec catalogue est dépassé et, depuis les années 70, le white cube n’a trouvé aucun successeur. L’art doit conquérir le public de demain ! Et foires et événements laissent une empreinte carbone immense. Je combine donc mes deux passions, l’art et les océans, pour faire changer les choses. Je souhaite aller vers ce qui fait sens, comme avec la sculpture Aerocene de Tomás Saraceno (un ballon d’air montré à Paris lors de la COP21, NDLR). Je demande donc aux artistes de dématérialiser leur travail sans compromettre leur propos. Je vais être la première à lancer une fondation d’art sur le web. J’ai d’ailleurs écrit une chanson humoristique avec les Chicks On Speed, Art Dump, dans laquelle j’évoque un trou pour enterrer ma collection !